Quand Max Pacioretty a été choisi capitaine par ses coéquipiers, nous étions plusieurs à approuver cette décision. Entre P.K. Subban, Andreï Markov, Tomas Plekanec et lui, le choix semblait évident. Subban, le seul qui aurait pu le chauffer, n’avait ni la maturité ni la popularité dans le vestiaire pour battre Pacioretty au final.

À ce moment-là, il était le seul attaquant de puissance de l’équipe. Il jouait de façon inspirée et souvent en dépit de blessures diverses. Il avait une certaine prestance, mais il n’était pas le plus expressif. Il avait accepté sa nomination avec fierté, même s’il n’en réalisait pas toutes les implications dans un marché comme Montréal, où le capitaine porte beaucoup plus sur ses épaules que la lettre « C » qui l’identifie.

Pacioretty connaissait un peu l’histoire de l’organisation quand même. Maurice Richard, son frère Henri, Doug Harvey, Jean Béliveau, Serge Savard, Yvan Cournoyer et Bob Gainey étaient parmi ceux qui avaient joué ce rôle avec distinction et fierté. Pour Pacioretty, cette nomination ne pouvait donc s’agir que d’une simple marque d’estime de son vestiaire. Ces anciens capitaines, tous des Glorieux dans le plus pur sens du terme, avaient inspiré leurs coéquipiers de diverses façons. Ils avaient tous été des leaders. Au moment de sa nomination, Pacioretty donnait l’impression de pouvoir emprunter la même voie.

Quand plus rien ne va pour une équipe, il est impérieux que les vétérans, notamment le capitaine, jouent leur rôle. Le capitaine doit être un rassembleur. Les plus grands capitaines, qui l’avaient compris, ne laissaient jamais l’équipe s’endormir sans réagir.

« Quand nous connaissions trois défaites consécutives, je convoquais une réunion, m’a déjà dit Cournoyer qui, à l’instar de Béliveau, a remporté 10 coupes Stanley. On se parlait dans la face et on recommençait à gagner. »

Cournoyer parle en connaissance de cause. Il était le capitaine de l’équipe lors de la séquence de quatre coupes Stanley consécutives vers la fin des années 1970.

Bien sûr, avec tout le talent que possédaient les équipes du passé, c’était plus facile de faire tourner le vent. Le Canadien dans sa version actuelle n’a pas tout ce qu’il faut pour arriver à se retourner sur une pièce de 10 cents. Toutefois, ça ne veut pas dire que Pacioretty ne pourrait pas regrouper ses coéquipiers et les inviter à prendre conscience de l’urgence de la situation, comme le faisait Cournoyer par exemple. De plus en plus, on doute qu’il y ait suffisamment de leadership en lui pour lui permettre de mettre son pied à terre. Il s’acquitte de ses responsabilités face aux médias et à l’occasion d’événements communautaires, mais ça s’arrête là. Plutôt réservé, on ne l’imagine pas faire un esclandre au centre du vestiaire quand l’équipe se comporte d’une façon embarrassante comme ce fut le cas samedi, à Ottawa.

Que s’est-il passé pour que les choses déraillent de cette façon dans son cas? Pacioretty ne joue plus avec le même entrain, même si je reconnais qu’il a connu un meilleur match contre les Canucks, ce qui ne l’a pas empêché de disputer un 16e match sans but. Il ne fonce plus au filet avec la même détermination, une manoeuvre qui faisait de lui un attaquant particulièrement dangereux. Ses tirs proviennent d’angles qui facilitent la tâche des gardiens. Parfois, son comportement est teinté d’une agaçante mollesse. On le sent investi de responsabilités trop grandes pour lui, une carence beaucoup moins évidente quand tout va bien.

On peut se demander sur quelles bases il a été choisi. Parfois, l’ensemble de l’équipe opte pour le joueur vedette ou pour celui qui exerce le plus d’influence. Au départ, c’était assez difficile de savoir s’il avait de l’influence. A-t-on cru qu’il traînerait l’équipe offensivement durant plusieurs saisons ou a-t-on simplement choisi un homme qu’on aimait bien?

Même s’il constitue une amère déception, on est encore très loin du commentaire attribué à Michel Therrien concernant « le plus mauvais capitaine dans l’histoire du Canadien », une remarque que l’ex-entraîneur a toujours fortement démentie et sur laquelle personne n’a réussi formellement à le contredire. Curieusement, cet incident, qui avait fait beaucoup jaser, était survenu encore une fois à la suite d’une saison désastreuse de l’équipe au cours de laquelle on lui avait reproché de s’acquitter pauvrement de ses responsabilités de capitaine.

Actuellement, alors que le Canadien se dirige lentement mais sûrement vers une seconde exclusion des séries en trois ans, Pacioretty le marqueur et Pacioretty le chef de file sont manquants. S’il était le type de leader qu’il devrait être, ça ne ferait pas toute la différence au niveau des performances de l’équipe, mais on aurait au moins la certitude qu’il n’est pas indifférent à la chute du Canadien.