MONTRÉAL - Qu’il s’appelle Patrick Roy, Mathieu Darche, Daniel Brière, Marc Denis ou peu importe le nom que vous préfériez dans la liste des candidats potentiels, le prochain directeur général du Canadien sera plus que le simple porte-parole du vice-président des opérations hockey.

 

« Je n’accepterais jamais un poste de directeur général si je n’avais pas les pouvoirs reliés à ce job. Je ne demanderais donc pas à un directeur général d’accepter un rôle que je serais le premier à refuser », que Jeff Gorton a tranché en guise de réponse à l’une des nombreuses questions reliées à la gestion à deux têtes du Canadien.

 

Le « monstre à deux têtes » créé par Geoff Molson dans le cadre de la restructuration annoncée lundi après le congédiement de Marc Bergevin.

 

Tout cela est bien beau.

 

Mais parallèlement au fait qu’il assure vouloir travailler en équipe et vouloir mettre son expérience et ses connaissances au service de celui qui deviendra le 18e DG du Canadien de Montréal, Jeff Gorton est seul maître à bord en ce moment.

 

Il assistera à son deuxième match du Canadien samedi à Nashville. Il continuera à rencontrer les joueurs, à apprendre à connaître tous les membres de l’organisation, à apprendre à connaître leurs qualités, leurs façons de faire, à relever aussi leurs défauts.

 

Depuis qu’il est débarqué au centre d’entraînement de Brossard en milieu de semaine, Gorton fait ce que tout nouveau grand patron fait : il analyse. Il prend des notes sur les choses qui lui plaisent, sur celles qui lui déplaisent. Il dresse une liste de changements à apporter. Des changements qui s’imposent au premier coup d’oeil. D’autres qui viendront en temps et lieu.

 

Jeff Gorton coule les fondations de ce qui sera sa gestion pour les prochaines années. Combien d’années? « On parle d’un contrat à long terme » qu’il a répondu évasivement sans vouloir quantifier le long terme.

 

Voilà une bien vilaine façon de donner du poids aux prétentions qu’il tient à être transparent. Quel est donc le problème de dire qu’il est sous contrat pour trois, quatre, cinq ou six ans?

 

Mais bon!

 

Un brin de scepticisme

 

Tout ce que Jeff Gorton fait en ce moment aura donc un impact sur les paramètres qui dicteront le travail du prochain directeur général. D’où le brin d’incompréhension et de scepticisme à l’égard de la complicité qu’il entend établir avec son directeur général. Une complicité à géométrie variable puisque le 18e DG devra accepter de patiner entre des balises qu’il n’aura pas installées alors que c’est justement son job de le faire.

 

Parce qu’il a travaillé sous les ordres d’un président des opérations hockey (John Davidson) à New York et qu’il comptait même sur un conseiller au propriétaire des Rangers en Glen Sather, Jeff Gorton sait très bien dans quel genre de gestion il s’embarque.

 

« C'est l'homme pour la job »

Il sait très bien que des jours houleux viendront lorsque des positions divergentes s’entrecroiseront dans le cadre de décisions importantes à prendre en matière de transactions, d’embauches de joueurs autonomes, d’abandons sur de jeunes joueurs qui n’inspirent plus confiance.

 

« Des fuck you s’échangent dans tous les bureaux quand vient le temps de prendre de décisions difficiles. C’est normal. On peut être en désaccord. L’important est que la meilleure décision soit prise pour le bien de l’organisation. »

 

Je veux bien.

 

Mais cette décision finale reviendra à qui? Au jeune DG ou à son VP de patron? Et après deux ou trois ans, ça deviendra pire encore.

 

« J’arrive à Montréal. Je préfère voir les choses du côté positif que de m’attarder aux possibilités que nous ayons des ennuis. Plusieurs équipes travaillent de cette façon autour de la LNH. Si elles réussissent, nous y arriverons aussi. Je n’ai pas un gros ego. Je n’accorde pas d’importance aux titres. J’ai de l’expérience. J’ai des connaissances. Je comprends bien les personnes et les situations. Je serai en mesure d’aider celui qui sera DG. Et ce directeur général aura des liens directs de communication avec notre propriétaire. Il pourra négocier avec les autres DG. C’est le job d’un directeur général d’échanger avec ses homologues. Je serai là pour l’appuyer. »

 

Patrick Roy? Oui, non, peut-être…

 

Qu’il s’appelle Patrick Roy, Mathieu Darche, Daniel Brière, Marc Denis ou peu importe le nom que vous préfériez dans la liste des candidats potentiels, le prochain directeur général du Canadien entrera en fonction après les Fêtes.

 

Patrick Roy ne doit pas se faire trop d'illusions

C’est aussi ce que Jeff Gorton a laissé entendre vendredi en indiquant que nous étions déjà en décembre et que Noël arrivait très vite.

 

Est-ce que Patrick Roy pourrait être DG du Canadien malgré son caractère bouillant et le fait qu’il soit plus grand et gros que nature?

 

« Je connais et respecte Patrick Roy pour qui il est et pour tout ce qu’il a réalisé dans le hockey. Je n’ai peur de rien et de personne. Sa candidature est donc aussi intéressante que toutes les autres. S’il est sur les rangs, il sera rencontré. Sa candidature sera étudiée. Nous allons choisir le meilleur candidat pour pourvoir le poste. Un candidat avec qui j’aurai une liaison de confiance, avec qui j’aurai de la complicité. Un candidat qui pourra bien me compléter et un candidat que je pourrai guider et aider à devenir meilleur. Je viens d’arriver. La liste de candidats n’est pas finalisée. Les rencontres ne sont pas encore commencées », que Gorton a lancé confirmant plus tard que la sélection finale serait faite après Noël.

 

Alors : est-ce que Patrick Roy pourrait être le 18e directeur général du Canadien?

 

Ma réponse est oui il le pourrait. Il a les connaissances et les compétences pour faire le travail et bien le faire. Il a aussi le front de bœuf, l’attitude un brin ou deux belliqueuse nécessaire pour composer avec la pression reliée à ce poste.

 

Mais si vous me demandez s’il sera le 18e DG du Canadien, ma réponse tend plus vers le non que le oui.

 

J’ai bien peur que son divorce houleux avec Joe Sakic et l’Avalanche il y a quelques années lui flotte au-dessus de la tête comme un gros nuage noir qui annonce des orages. Attendons de voir si le vent de renouveau qui souffle sur le Canadien pourrait chasser ce gros nuage. Mais j’ai bien peur qu’il soit ancré au-dessus du Centre Bell à jamais.

 

Est-ce que le partisan du Canadien accueillerait à Montréal un Mathieu Darche, un Daniel Brière, un Marc Denis ou un Martin Madden fils avec autant d’enthousiasme qu’un Patrick Roy.

 

« Je veux un DG qui a un regard différent »

Je ne crois pas non. En fait je suis convaincu que non!

 

Patrick Roy est membre du temple de la renommée du hockey. Il a joué un rôle de premier plan dans les deux dernières conquêtes de la coupe Stanley. Il est adulé par bon nombre de partisans.

 

Il est aussi détesté par quelques autres. C’est un fait. Mais derrière la haine, se cache toujours une dose certaine d’amour. Il ne faut jamais l’oublier. Comme il ne faut jamais oublier que la pire chose qui soit en matière de relation est l’indifférence.

 

La pire chose qui menace le Canadien en ce moment n’est pas les défaites s’accumulent en série. C’est plutôt le fait qu’il commence à perdre dans l’indifférence.

 

Le partisan qui a tiré chandail et casquette sur la glace jeudi soir a rendu service à la haute direction du Canadien. Il leur a envoyé le message que les défaites lui faisaient mal.

 

Le jour où les partisans de moins en moins nombreux à se déplacer vers le Centre Bell encaisseront les revers comme s’ils étaient normaux, qu’ils encaisseront les éliminations des séries comme si elles allaient de soi, et bien là le Canadien sera vraiment dans le trouble.

 

La candidature de Patrick Roy ne peut assurer un retour du Canadien au sommet de la LNH. Elle assure toutefois l’entrée en scène d’un ancien joueur et d’un homme de hockey qui brassera la cage et refusera les demi-mesures. Avec tous les éclats qui en découlent. Pour le meilleur et pour le pire.

 

Est-ce suffisant pour préférer Roy à une candidature plus discrète et qui pourrait être aussi valable? Peut-être même plus?

 

On le saura après les Fêtes.

 

Ce qui est clair, c’est que la sélection du prochain directeur général est plus que la sélection d’un homme de hockey qui apprendra dans l’ombre de Jeff Gorton au début pour en sortir un jour.

 

C’est la sélection d’un homme de hockey par qui la relance à long terme de l’organisation passera ou échouera.

 

D’où l’importance de ne pas se tromper.

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