FOXBOROUGH, Mass. - Dans une rivalité marquée par tant de grands moments, il pourrait sembler difficile d'identifier une partie plus mémorable que les autres entre le Canadien de Montréal et les Bruins de Boston. Mais peut-être que l'honneur revient à un match joué il y a presque 45 ans.

Menée par Jean Béliveau, son vénérable capitaine, la formation montréalaise a marqué six buts sans réplique, dont cinq au troisième vingt, en route vers un gain de 7-5 dans le vieux Garden, l'intimidant château fort des Bruins.

Pour plusieurs observateurs à Boston, il s'agit de la pire défaite dans les annales de l'organisation. À Montréal, ils sont nombreux à croire que c'est la plus grande remontée de l'histoire du Tricolore.

Lors de ce match, le deuxième des quarts-de-finale, le jeudi 8 avril 1971, Henri Richard avait porté le score 5-2 avec un filet marqué tard en deuxième période.

Béliveau, deux fois, Jacques Lemaire, John Ferguson et Frank Mahovlich ont ensuite déjoué Eddie Johnston - préféré à Gerry Cheevers pour ce match - devant une foule médusée et incrédule.

Le Canadien a éventuellement gagné la série en sept rencontres face à une formation qui avait établi multitude de records individuels et collectifs durant la saison.

« Sans être ultra-confiants, nous étions arrivés avec l'idée que nous pouvions rivaliser avec eux, note Réjean Houle, qui en était alors à sa première saison complète dans la LNH. »

« Nous n'avions rien à perdre, ajoute-t-il. Nous savions qu'ils avaient une meilleure équipe, et nous savions que Bobby Orr était le meilleur joueur au monde. Mais nous avions de bons trios, de bons jeunes, et l'acquisition de (Frank) Mahovlich nous avait aidés. »

Propulsé par les 14 buts de Mahovlich - un record de la LNH à l'époque - et par les performances miraculeuses du gardien recrue Ken Dryden, le Canadien a poursuivi sa route vers une improbable conquête de la coupe Stanley, la 17e de son histoire.

Aucun espoir

En 1970-71, le Canadien n'avait pas une mauvaise équipe, bien au contraire. Il avait obtenu 42 victoires et 97 points en 78 matchs, bon pour le troisième rang dans la section Est. De plus, il avait terminé en deuxième position dans la ligue avec une récolte de 291 buts.

« On oublie qu'il y a plus de joueurs au Temple de la renommée venant de cette édition du Canadien que de celle des Bruins », fait remarquer Dick Irvin, commentateur et analyste des matchs de l'équipe à la radio et à la télévision à l'époque.

Malgré cela, personne ne lui donnait la moindre chance. Cette saison-là, les Bruins avaient édité de nouvelles marques de la LNH avec 57 victoires, 121 points et 399 buts.

Les quatre meilleurs marqueurs de la LNH portaient l'uniforme des Bruins. Phil Esposito avait inscrit 76 buts et 152 points et Orr, un défenseur, avait terminé au 2e rang avec 102 passes et 139 points.

« Les Bruins avaient la meilleure équipe de la ligue cette année-là, affirme Yvan Cournoyer, le rapide ailier droit qui avait lui-même récolté trois points lors du fameux match numéro 2. »

« Toutefois, je pense qu'ils ont pêché par excès de confiance durant cette série, renchérit-il. La même chose nous était arrivée en 1967, quand nous avons affronté Toronto en finale. Nous pensions avoir gagné la coupe Stanley avant que la série commence. Ce revers nous a ensuite aidés à respecter les autres équipes. »

De tels propos de l'ancien marchand de vitesse du Canadien viennent, jusqu'à un certain point, corroborer une anecdote d'Irvin.

« Plus que les cinq buts en troisième, je me souviens d'un moment précis. Avant de revenir en ondes pour le début de la troisième période, Orr et Derek Sanderson patinaient ensemble et riaient. En voyant l'image sur l'un de ses écrans, notre réalisateur Ralph Mellanby m'a dit 'Je ne pense pas qu'ils devraient rire ; ce match n'est pas terminé'. »

Le triomphe du Canadien avait été d'autant plus étonnant que l'entraîneur-chef Al MacNeil avait décidé de faire appel à Dryden, qui n'avait disputé que six matchs en saison régulière, au lieu du vétéran Rogatien Vachon.

Dryden avait été exceptionnel au point de remporter le trophée Conn-Smythe à titre de joueur le plus utile à son équipe. Mais Irvin regarde dans une autre direction quand vient le temps d'identifier le joueur-clé du Tricolore.

« Je crois que Mahovlich a joué un rôle plus important encore. Si Sam Pollock n'avait pas fait son acquisition quelques mois plus tôt, je ne pense pas le Canadien aurait gagné la coupe Stanley. »Top 5 faits marquants Bruins vs Canadiens