Le Canadien doit un gros merci à Andrei Loktionov pour sa victoire de 4-3 arrachée en tirs de barrage aux Devils.

Oui, David Desharnais qui a marqué deux buts, dont celui qui a fait la différence, mérite tous les honneurs et la première étoile qu’il a obtenue. Oui, Peter Budaj s’est imposé deux fois en tirs de barrage pour assurer la victoire. Oui, les vétérans Plekanec, Gionta et Brière ont pris la relève aux autres trios qui ont été plus ordinaires au New Jersey. Oui, Markov et Subban, malgré son erreur coûteuse qui aurait pu faire plus mal qu’elle n'a fait mal au Canadien en fin de troisième période, ont connu un autre match solide. Oui, le Canadien, collectivement, a trouvé une autre façon de gagner.

Je sais tout ça.

Pourquoi alors remercier Loktionov? Parce qu’il a réveillé le Canadien.

Contre des Devils qui jouaient mieux que le Canadien pour un deuxième match en 48 heures, Brian Gionta était le seul à avoir marqué jusque là. Le capitaine avait donné les devants à son club en milieu de première période sur l’attaque qui a suivi une poussée des Devils qui venaient de frapper le poteau au lieu de prendre les devants 1-0.

Fort de cette avance, le Canadien s’est alors mis à se défendre. Trop. Je veux bien croire que les Devils ne forment pas un club dangereux offensivement, mais au lieu de maintenir le rythme qu’il imposait au premier tiers, le Canadien s’est placé sur les talons en période médiane. Il l’était encore en troisième jusqu’à ce que Loktionov ne crée l’égalité.

Comme me le faisait remarquer Michel «Le Tigre» Bergeron avec qui je suivais le match dans les bureaux de l’Antichambre, le Canadien jouait alors à l’économie. Il ménageait ses énergies en se disant qu’il devait en garder pour maximiser ses chances face à des Bruins reposés qui l’attendent à Montréal.

Le Canadien avait toutefois oublié une chose : avant de penser au deuxième match en deux soirs qui nous attend, mieux vaut gagner le premier.

Tout à recommencer

Tout étant à recommencer, le Canadien s’est alors remis à jouer.

Et lorsque Michael Ryder, avec l’aide bien involontaire de David Desharnais qui a fait dévier la rondelle qui s’est retrouvée dans la lucarne, a donné les devants 2-1 aux Devils, le Canadien n’a vraiment plus eu le choix. Il a dû revenir sur le bon bout des pieds. En équilibre sur les orteils et non dangereusement sur les talons.

C’est là que tout est parti.

La victoire n’est pas tombée du ciel. Le Canadien a dû se remettre à patiner. À travailler. Mais avec des efforts beaucoup plus convaincants que ceux offerts jusque là, Lars Eller a créé l’égalité à son tour.

Moins de trois minutes plus tard, P.K. Subban a bousillé cette avance. Pas question de planter Subban et de remettre en cause ses chances de représenter le Canadien aux Jeux de Sotchi simplement parce qu’il a levé les yeux trop vite et perdu la rondelle aussitôt après pour permettre à Patrik Elias de redonner les devants aux Devils.

Subban était tout croche. Il s’en voulait. Et c’est normal. Mais comme ma grande philosophe de mère l’explique depuis toujours, il n’y a que ceux qui ne font pas la vaisselle qui n’en casse jamais.

Coupable, Subban? Bien sûr. Mais en 28 minutes de jeu contre les Devils – l’utilisation la plus généreuse des joueurs des deux équipes – Subban a fait plus de bien que de mal dans le cadre du match d’hier.

Plus qu’un simple gars de chez nous

Avec 66 secondes à faire au match, le Tricolore aurait alors pu baisser les bras. Facilement. Mais quand une équipe est sur une bonne lancée, qu’elle joue avec confiance, qu’elle croit en ses chances, elle donne un petit coup. Au cas où.

Et c’est exactement ce qui est arrivé.

Pendant que Budaj retraitait au banc à la faveur d’un sixième attaquant, Brian Gionta – qui fait mentir la grande majorité de ses détracteurs, du moins ceux qui sont capables de reconnaître que leurs critiques étaient injustifiées, ou au moins exagérées – a décoché un bon tir au filet.

Un tir que Cory Schneider aurait sans doute facilement gobé dans sa grosse mitaine, n’eût été la présence devant lui de David Desharnais qui a fait dévier la rondelle sous la barre et dans le fond du filet.

Il fallait voir la réaction de P.K. Subban pour réaliser à quel point ce but faisait du bien au défenseur qui voyait sa bévue être effacée et au reste de l’équipe.P.K. Subban

L’attaquant de l’heure chez le Canadien aurait pu faire la différence en prolongation. Mais Max Pacioretty n’a pu profiter de l’échappée qu’il venait de s’offrir, car son bâton s’est rompu sous son poids alors qu’il s’apprêtait à décocher un tir.

Malheureux, Pacioretty? Peut-être un peu. Mais il a été le premier à féliciter son petit joueur de centre lorsqu’il a marqué le but qui a fait la différence. Un but qui ne figure pas à la fiche de Desharnais. Comme celui qu’il avait enfilé à Columbus, il y a dix matchs. Mais un but qui fait du bien à l’équipe. Et tout autant à celui qui le marque.

Depuis ce match du 15 novembre, Desharnais est rendu à trois buts et six mentions d’aide en dix matchs. Ce n’est pas rien. J’espère que ceux qui prétendaient que « le petit gars de chez nous » endossait l’uniforme du Tricolore seulement à cause de la langue qu’il parle trouveront une façon de reconnaître qu’ils avaient tort. Au moins un peu. On verra…

Est-ce que le Canadien méritait de gagner le match de mercredi au New Jersey? Peut-être pas. Mais il l’a gagné. C’est tout ce qui compte.

Est-ce que le Canadien méritait de gagner le match de lundi contre les mêmes Devils? Peut-être pas. Mais il l’a gagné.

Et c’est en gagnant des matchs qu’il ne devrait pas toujours gagner qu’un club met des points en banque et qu’il ne pique pas tragiquement du nez lorsqu’il perd un match qu’il aurait pu – ou dû – gagner ou qu’il affronte un adversaire simplement trop fort pour lui ce soir-là.

C’est exactement ce que le Canadien a fait mercredi et lundi face aux Devils. C’est ce qu’il fait depuis que Michel Therrien compte sur un club en santé.

Où tout ça le mènera?

Impossible à dire. Mais tant qu’il sera plus près de la première place de sa division, voire de son association, que d’une exclusion des séries, le Canadien échappera au dangereux tourbillon de critiques qui l’aspire vers le bas du classement quand les choses commencent à mal aller.

De fait, avez-vous remarqué que lorsque les choses vont bien chez le Canadien, elles vont très bien. Mais que lorsqu’elles se mettent à mal aller, elles vont très mal?

Je cherche encore une explication savante ou non pour expliquer ça.

Je vous fais signe dès que je la trouverai. Ou que j’aurai une petite idée…

Le match en chiffres

2 – La séquence de matchs au cours desquels le Canadien n’a pas accordé plus de deux buts s’arrête donc à 11…

3 – Daniel Brière a prouvé son grand talent de passeur en servant à son capitaine une passe parfaite sur le premier but du match. Brière récoltait ainsi un point dans un troisième match de suite…

4 – Après 49 minutes 50 secondes de hockey typiquement associé aux Devils et à leur système éteignoir, les structures défensives sont allées directement chez le diable alors que les deux équipes ont échangé quatre buts en 10 minutes 10 secondes. De quoi donner des cheveux gris aux coachs, mais de quoi réveiller des amateurs qui avaient besoin d’un sérieux remontant…

15 – Avec sa victoire aux dépens des Devils, le Canadien a maintenant récolté 15 points sur une possibilité de 16 à ses huit derniers matchs. Il en revendique 20 sur une possibilité de 24 lors de ses 12 dernières rencontres…

415 – Complice du but de Brian Gionta, Tomas Plekanec a récolté son 415e point en carrière avec le Canadien. Un point qui le hisse au 32e rang dans l’histoire du Tricolore sur un pied d’égalité avec Yvon Lambert…

554 – Francis Bouillon était de retour au sein de la formation après avoir raté quatre des six dernières parties. Il disputait mercredi son 554e match dans l’uniforme du Canadien. Se faisant, il a rejoint Terry Harper au 47e rang des joueurs ayant disputé le plus grand nombre de matchs dans l’uniforme tricolore…

12 742 : Je ne sais pas combien d’amateurs de hockey occupaient le Prudential Center hier soir. Je ne sais pas non plus si les Devils ont dit la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Mais on doit les féliciter de ne pas nous avoir pris pour des cruches en annonçant une salle comble, se contentant d’un chiffre de 12 742 spectateurs…