On maugréait fort depuis des mois dans certains milieux de Québec. Les nostalgiques, qui ne sont pas encore remis du départ des Nordiques et qui sont restés marqués par une rivalité quasi viscérale entre Montréal et Québec, acceptaient mal que le Canadien soit la première équipe professionnelle à fouler la glace d'un édifice tout neuf qui fait la fierté de la ville, avec raison.

N'importe qui, mais pas le Canadien. Pourtant, se serait-on souvenu très longtemps du premier match professionnel dans le Centre de PKP si cette rencontre avait opposé les Islanders de New York aux Sabres de Buffalo, mettons? Pouvait-on espérer faire salle comble avec des équipes pour lesquelles on aurait si peu d'attachement?

Comme cela avait été le cas au cours des visites précédentes du Canadien dans le vieux Colisée, c'est evenko, propriété de Geoff Molson et de son groupe, qui était le promoteur de ce match. Dans ces circonstances, le promoteur achète les droits de ce match, accorde un montant forfaitaire à l'équipe visiteuse pour couvrir ses frais d'entraînement et de déplacement et devient le seul maître à bord dans l'édifice pour la journée.

Ça explique pourquoi les amateurs ont été étonnés que l'annonceur-maison provienne de Montréal et que l'animatrice de foule soit celle du Centre Bell. Avant la rencontre, en plein Centre Vidéotron, l'annonceur a mentionné à la foule que ce match était présenté par Bell. Durant toute la soirée, on a fait la promotion des spectacles à venir au Centre Bell et des boutiques souvenirs du Canadien. Sur les écrans géants, on voyait s'activer les gens de RDS, diffuseur exclusif de la partie.

Après chaque but du Canadien, on avait droit au « Allez Montréal », de Loco Locass. De quoi donner de l'urticaire aux bonzes de Québecor et chatouiller l'orgueil des inconditionnels des Nordiques dont le coeur ne battra jamais pour le Canadien.

La soirée s'est néanmoins déroulée avec beaucoup de classe. Il n'y a pas eu de gestes déplacés. Les employés de la maison ont été polis et courtois. Le Canadien, qui a eu pleinement le temps de s'emparer d'une bonne partie de la place disponible au Québec depuis l'exil des Nordiques, a été chaleureusement accueilli. Des huées pas très dominantes ont marqué quelques percées de P.K. Subban et n'ont pu enterrer les « Go Habs Go » des fans du Canadien qui réclamaient plus d'action. Faut dire qu'avec quelques milliers de chandails rouges dans la place, il en aurait fallu beaucoup pour étouffer l'enthousiasme des amateurs attachés à la Flanelle.

On dira ce qu'on voudra, la présence du Canadien a été plutôt profitable pour la ville de Québec, lundi soir. Ce match a fait déplacer la presse étrangère de la Ligue nationale. Tous les médias du Québec, incluant massivement ceux de Montréal, ont assuré la couverture de l'événement. Le gratin du Québec y était, comme c'est le cas pour les soirs de grande première. Comme l'édifice, qui prend la relève du vétuste Colisée, est absolument spectaculaire, une bonne partie des villes du circuit, grâce aux reportages qui ont suivi, savent que Québec a maintenant tout ce qu'il faut pour que les Nordiques puissent renaître de leurs cendres.

On ne voulait pas que le Canadien soit de la soirée, mais une presse nationale, qui n'a rien oublié de la rivalité Québec-Montréal et qui s'est amenée pour faire revivre un brin d'histoire, a permis que le Centre Vidéotron reçoive un éloge unanime.

Le somptueux amphithéâtre, qui est un hommage à l'ingénierie québécoise et aux entreprises de chez nous qui ont participé à sa réalisation, est la nouvelle carte de visite de Québec. Lundi, la ville n'a pas raté sa rentrée dans le cercle du hockey professionnel. On sait qu'elle est prête à revenir dans les ligues majeures.

Ne manque plus qu'une équipe et des revenus pour assurer sa survie. Mais une chose à la fois. Apprécions d'abord cette immense soucoupe volante qui peut être vue à des kilomètres à la ronde.

Par contre, à en juger par le temps qu'il faudra y mettre pour bâtir une formation de l'expansion issue des rejets des 30 autres partenaires de la Ligue nationale, peut-être devrait-on accepter avec plus d'empressement les quelques centaines de dossards tricolores qui viendront garnir les estrades certains soirs.

Dans un contexte qui s'annonce difficile, on ne peut pas cracher sur la moindre source de revenus.

On doit beaucoup à Edgar Théorêt

Mercredi soir, sept personnalités, qui ont marqué le Québec par leurs accomplissements sportifs, seront intronisés au Panthéon des sports du Québec. Dans une soirée à guichets fermés, Alexandre Bilodeau, Alexandre Despatie, Anthony Calvillo, Jennifer Heil, Julie Sauvé, Larry Smith et Martin Brodeur verront à jamais leurs brillants parcours inscrits dans la riche histoire sportive du Québec. L'unique absent sera Brodeur qui, pour des raisons nébuleuses, a choisi de rester à St. Louis.

Il s'agira du 25e banquet annuel du Panthéon des sports du Québec. On en profitera pour donner un coup de chapeau à Edgar Théorêt qui, à titre de fondateur du Panthéon, a tenu cet organisme à bout de bras pendant plus de 20 ans avant qu'on lui accorde l'appui qu'il avait longtemps sollicité.

Il y aura maintenant 206 intronisés à ce panthéon. Malgré les médailles olympiques, les championnats du monde, les coupes Grey et les coupes Stanley, aucune de ces personnalités n'aurait bénéficié de cette reconnaissance pleinement méritée n'eut été de l'acharnement de Théorêt à mener ce projet à terme. Sans lui, le Panthéon des sports du Québec ne serait pas sur le point d'obtenir son propre musée, l'autre ultime objectif de ce bâtisseur qui nous a quittés en janvier dernier sans avoir eu la chance d'être témoin de cette réalisation Pendant des années, alors qu'il n'y avait pas le plus petit local pour entreposer les artéfacts et souvenirs sportifs rattachés à des événements significatifs, le « musée » qui habitait tous ces objets d'une grande signification résidait dans le sous-sol de sa résidence.

Ex-directeur technique, puis directeur général de la Fédération de natation du Québec, Théorêt a travaillé inlassablement pour mettre en lumière les exploits de nos athlètes. Sans lui, il n'y aurait pas de banquet ce soir. Sans lui, il y aurait longtemps qu'on aurait oublié quelques-unes de nos plus grandes réalisations sportives.

La soirée se tiendra sous la présidence d'honneur du directeur général du Canadien, Marc Bergevin. Edgar aurait été fier de voir la plus grande entreprise sportive au Québec épauler son bébé qui a bien mûri avec les années.