Le score laisse croire à une victoire facile. Sans appel. Ce n’est pas tous les soirs qu’on inflige une raclée de 6-2 aux champions en titre de la coupe Stanley. À un club aussi gros, aussi puissant que les Kings de Los Angeles.

Mais attention ! Si vous n’avez pas vu le match, je vous inviterais à consulter le chiffre de tirs au but pour connaître l’allure réelle du match. Dans cette colonne, le Canadien s’est fait manger tout rond. Il a accordé 46 tirs aux Kings. Il n’en a obtenu que 20.

Les Kings ont décoché un total de 92 tirs contre seulement 41 pour le Tricolore. Et même s’ils ont donc eu possession de la rondelle beaucoup plus que le Canadien – il faut avoir la rondelle en simonac pour tirer 92 fois – les Kings ont malgré tout asséné 32 mises en échec aux joueurs du Canadien qui ont riposté avec 19 coups d’épaule.

Normalement, le club qui a le plus de temps de possession se fait frapper plus souvent qu’il ne frappe. Ça vous donne une idée de la domination des Kings.

En étirant l’élastique un peu, j’irais jusqu’à dire que les Kings ont obtenu plus d’occasions de marquer que le Canadien a obtenu de tirs. Bon ! On va s’entendre sur autant…

Pourquoi ont-ils perdu ? Pourquoi ont-ils encaissé leur pire revers de la saison ?

À cause de Carey Price.

Six beaux buts

Pas question ici de jouer au rabat-joie. Pas du tout.

Pas question de minimiser la qualité des six buts marqués par le Canadien non plus! Jiri Sekac a fait dévier un tir frappé de P.K. Subban sur son premier but du match, il a démontré beaucoup de calme, de finesse et de précision sur son deuxième en logeant la rondelle dans la lucarne.

David Desharnais a complété une très belle poussée amorcée par Brandon Prust et continué par P.A. Parenteau. Une poussée rapide, incisive qui a permis à Desharnais de mettre fin à une séquence de 52 matchs de suite sans marquer à cinq contre cinq. Mettez-en que c’est long.

Sven Andrighetto a marqué un deuxième but en trois matchs – il revendique trois points – et sa capacité de profiter de ses chances combinée au retour en forme et en santé de Michael Bournival a poussé la direction du Tricolore à retourner Eric Tangradi à Hamilton. Une bonne nouvelle pour Andrighetto qui mérite pleinement de prolonger son expérience avec le grand club. Surtout que les Dieux des statistiques, nos amis du Elias Sports Bureau soulignent que le Suisse est la première recrue du Canadien à enregistrer au moins un point à ses trois premiers matchs dans l’uniforme tricolore depuis Pierre Mondou en 1977-1978.

P.K. Subban et Andrei Markov ont aussi marqué et l’attaque massive y est allée d’une soirée de deux buts en trois occasions.

Comme quoi l’attaque a fait sa part.

Déchaînés, mais muselés

Pas question n’ont plus de diminuer la victoire du Canadien en insistant sur le fait qu’il affrontait une fois encore un club qui débarquait à Montréal après avoir joué la veille.

Les échos de vestiaire du CH

De fait, ce serait une insulte à l’endroit des Kings que de prétendre qu’ils avaient les jambes molles, le souffle court et qu’ils jouaient sans conviction pour expliquer la victoire du Tricolore.

Surtout que de la façon dont les Kings ont amorcé le match, le score final aurait facilement pu être inversé si Carey Price n’avait pas été aussi dominant devant son filet, si son vis-à-vis Martin Jones n’avait pas été aussi ordinaire devant le sien.

Carey Price a stoppé les 14 tirs des Kings en première. Quatorze tirs qui se sont traduits par huit occasions de marquer (c’est mon évaluation) au cours des 20 premières minutes. Vingt minutes au cours desquelles, le Canadien a été dominé outrageusement.

En période médiane, Price a répété l’exploit réalisant 14 arrêts sur les 14 tirs des Kings. Quatorze tirs qui ont généré cinq autres (je me sentais même conservateur dans mon évaluation) occasions de marquer.

Pendant que Price multipliait les miracles – et ça semblait tellement facile – Martin Jones donnait un but sur quatre tirs en première et deux sur sept tirs en deuxième.

C’était 3-0 Montréal alors que les Kings auraient facilement pu mener par un, deux ou trois buts.

En troisième, Price a été humain accordant deux buts sur les 18 tirs des champions de la coupe Stanley. J’espère que vous vous rendez compte que deux buts sur 18 tirs, c’est parfois, même souvent, le résultat d’une soirée de travail de 60 minutes pour plusieurs gardiens de la LNH.

Mais chaque fois que les Kings se rapprochaient, le Canadien reprenait les devants aussitôt avec de beaux buts marqués aux dépens du gardien visiblement dépassé par les événements.

Première étoile acclamée

Est-ce que Jonathan Quick aurait offert une meilleure opposition ? Une meilleure chance de gagner aux Kings ? Une meilleure opposition à Carey Price ?

Bien sûr que oui. Mais Quick était assis derrière la baie vitrée et non devant le filet. Et même s’il s’est montré généreux, ce n’est pas tant Jones qui a donné le match au Canadien que Price qui l’a volé aux Kings.

L'étoile de la soirée

De fait, lorsque Michel Lacroix a effectué une pause pour se gonfler les poumons avant d’annoncer l’identité de la première étoile, les partisans l’ont pris de court en hurlant le nom de Carey Price une seconde avant que la grosse voix de notre Willy national ne résonne aux quatre coins du Centre Bell.

Après avoir savouré la performance que venait de leur offrir Carey Price, après l’avoir vu mettre les mains sur la coupe Molson remise au joueur du mois pour un deuxième mois de suite – on peut peut-être déjà lui octroyer celle de décembre – les partisans savaient que Price était le seul à mériter cette première étoile.

Une première étoile qu’on aurait pu et dû déjà lui décerner après le premier tiers. Car c’est là que le match s’est joué.

Les Kings auraient pu marquer un, deux, trois voire quatre buts en première et personne n’aurait osé blâmer Price tant les assauts des champions de la coupe Stanley étaient incisifs.

Mais Price a fermé la porte.

Il l’a fermé à forces égales repoussant 27 des 29 tirs des Kings, il l’a fait en blanchissant les Kings en cinq attaques massives au cours desquelles ils ont obtenu 16 tirs – c’est énorme – il s’est même permis un petit arrêt alors que son équipe profitait d’une attaque massive.

Comme si ce n’était pas déjà suffisant, Price s’est aussi distingué en dégageant son territoire à trois ou quatre reprises au cours du match en imitant Martin Brodeur avec quelques bonnes premières passes sur des sorties de zone.

Fausser la donne

Lorsque mon ami et collègue Dan Pou qui a fait le voyage de Québec pour assister au match a demandé à Michel Therrien si, en dépit de la victoire, il devait s’inquiéter du fait que son équipe avait été autant dominé par un club qui en était à un deuxième match en deux soirs, le coach du Canadien s’est braqué. Il n’a pas aimé la question et il l’a souligné. Ce qui est très bien. Un coach doit défendre son club. Surtout après une victoire de 6-2.

Mais une fois cette défense de première ligne bien érigée, Michel Therrien a convenu que les Kings avaient très bien joué, que son équipe n’avait sans doute pas connu son meilleur match, mais qu’elle avait été opportuniste.

Tout ça est vrai.

Mais ce qui est plus vrai encore c’est que Carey Price a faussé la donne hier. Une fois encore. Et ce qui est vrai aussi de la réalité du Canadien, c’est que quand Carey Price va, tout va pour le Canadien.

Chiffres du match

1 : Manny Malhotra a récolté sa première passe et son premier point dans l’uniforme du Canadien. Ila toutefois encore brillé aux cercles de mises en jeu avec une efficacité de 77 % soit 17 en 22…

2 : deux joueurs seulement des Kings n’ont pas obtenu de tir sur Carey Price hier. Pas de grande surprise avec le défenseur Matt Greene, mais une grosse surprise avec Jeff Carter qui s’est contenté d’un petit tir décoché – sur les 92 des Kings – un tir qui a été bloqué en défense par le Canadien…

8 : Capitaine des Kings, Dustin Brown a été victime de huit arrêts de Carey Price. Non seulement Brown a été blanchi mais il a terminé son match avec un différentiel de moins-3…