Le Canadien avait promis de se battre. Il a tenu promesse. Dans le cadre d’un grand match, vraiment un très grand match de hockey, le Tricolore a amorcé la rencontre en force. Il s’est démené ensuite. Il s’est aussi défendu par moment, c’est vrai. Mais le Canadien a fait tout ce qu’il devait faire pour gagner... et plus encore.

Non seulement le Tricolore a su éviter l’élimination, mais en marquant trois fois aux dépens de Tuukka Rask – le 4e but a été marqué dans une cage déserte – alors que Carey Price signait son premier jeu blanc des présentes séries, il a ravivé l’espoir d’une victoire mercredi, à Boston, où sera disputée la septième et dernière partie de cette guerre opposant les deux grands rivaux.

Bon! Les Bruins ont haché finement le Canadien samedi au Garden. Peut-être croient-ils qu’ils répéteront l’exploit une fois de retour devant leurs partisans. Claude Julien a d’ailleurs terminé son point de presse d’après-match en indiquant qu’il n’anticipait rien de moins qu’une victoire de son équipe lors du match décisif.

Mais pour que ce souhait se réalise, il devra s’assurer que son club joue mieux qu’il n’a joué lundi au Centre Bell. Bien mieux. Sinon les Bruins et tous ceux qui les avaient choisis gagnants à l’aube de la série contre le Canadien passeront l’été à se dire qu’ils auraient dû gagner.

Plus prudent que son vis-à-vis, Michel Therrien s’est contenté de dire avec raison que « tout peut arriver dans une septième partie et c’est la beauté des septièmes matchs. »

Maintenant que son équipe a taillé en pièces les Bruins deux fois plutôt qu’une, lors des 3e et 6e matchs présentés au Centre Bell, Therrien devra vendre à ses joueurs la conviction qu’ils peuvent réaliser le même genre d’exploit sur la glace du Garden. Plus facile à dire qu’à faire. Mais s’ils jouent comme ils l’ont fait hier, ils mettront toutes les chances de leur côté.

Bon du début à la fin

Acculé au pied du mur, le Canadien se devait de prendre le contrôle dès la mise en jeu initiale. Il se devait aussi de ne pas l’échapper ensuite. Il peut dire mission accomplie sur toute la ligne.

Dans un match où la très grande majorité des joueurs se sont donnés corps et âme à la cause de l’équipe, le Tricolore a sans doute connu sa meilleure soirée de travail dans toutes les facettes du jeu. Pas surprenant que Michel Therrien ait qualifié cette partie de « meilleure performance collective de son équipe de l’année. »

Max Pacioretty, qui brillait par son absence depuis le début du duel contre les Bruins, a marqué un but magnifique en deuxième période pour doubler l’avance de son club. Rejoint au centre de la patinoire par Nathan Beaulieu, Pacioretty a effectué une feinte brillante devant Tuukka Rask sous les yeux médusés de Zdeno Chara. Pacioretty a ajouté une passe sur le premier but de Thomas Vanek marqué lors d’une attaque massive.

Vanek, à qui on peut reprocher un certain manque d’implication encore hier soir, a toutefois démontré qu’il peut surgir de nulle part pour inscrire deux buts. Bien posté à la droite de Tuukka Rask, il n’a eu qu’à tirer dans une cage presque déserte. En fin de rencontre, après que David Desharnais eut poussé les Bruins à commettre un revirement en raison de la qualité de son échec-avant en zone neutre, Vanek a une fois encore profité d’une cage déserte pour marquer.

Pas question de minimiser ces deux buts. Mais il serait bon pour le Canadien et ses fans de voir l’Autrichien s’imposer dans les situations plus corsées. Oui, il a réalisé quelques belles passes encore hier. Mais au-delà de ses deux buts, on est en droit de s’attendre à plus d’un joueur de ce talent.

David Desharnais n’a récolté qu’une passe hier. Mais de la façon dont il a joué, avec l’énergie qu’il a déployée, il aurait mérité un bien meilleur sort sur le strict plan des statistiques.

Invité à relancer le Canadien vers la victoire en dépit du fait qu’il n’avait encore jamais joué dans la LNH en séries éliminatoires, Nathan Beaulieu s’est très bien tiré d’affaire. Outre la passe récoltée sur le but de Pacioretty, Beaulieu a démontré le même flair offensif qu’il affichait en saison régulière lorsque le Canadien a fait appel à ses services. Malgré son manque d’expérience et le style robuste des Bruins, Beaulieu n’a jamais semblé intimidé, mal à l’aise, pas à sa place.

Avec cette entrée en scène réussie, Beaulieu a donné raison à Michel Therrien et l’état-major du Canadien de lui avoir fait confiance. On se demande même comment il serait possible de ne pas faire appel à ses services une fois encore mercredi.

Ginette et la foule

Après avoir absorbé la surdose d’énergie offerte par Ginette Reno – elle a maintenant une fiche de 4-1 depuis le début des séries – le Canadien a ensuite profité de l’appui de ses partisans pour maintenir le rythme. Il faut dire que les partisans n’ont pas eu d’autre choix que d’encourager leurs favoris. Non seulement Lars Eller a reçu un cadeau – un mauvais bond sur une réception de passe de Kevan Miller derrière son filet a permis à l’attaquant du Tricolore d’hériter de la rondelle dans l’enclave – pour lancer son club en avant dès la troisième minute de jeu, mais le Canadien a tellement déployé d’énergie sur la patinoire que le spectacle offert obligeait les fans à célébrer.

Amorcées à l’extérieur du Centre Bell dès le milieu de l’après-midi, les célébrations se sont multipliées tout au long du match. Les partisans ont passé les dernières minutes de la rencontre – comme plusieurs autres au cours de la partie – debout, en hurlant tout en faisant tourner au-dessus de leur tête les serviettes blanches reçues à l’entrée. La fête se poursuivait toujours à l’extérieur du Centre Bell au moment d’écrire ce texte. Elle donnait même l’impression de pouvoir se prolonger encore longtemps.

S’ils ont assisté à la dernière partie du Canadien cette saison, les partisans présents au Centre Bell – même ceux des Bruins – pourront se vanter d’avoir assisté à un des beaux matchs de hockey de la saison. Cela dit, de la façon dont le Canadien s’est battu, débattu et a gagné lundi, il est sérieusement permis de croire que la troupe de Michel Therrien pourrait mettre le cap sur New York ou Pittsburgh jeudi matin pour y prolonger sa saison au lieu de rentrer à Montréal pour amorcer les vacances.

Quel match le Canadien a offert. Les Bruins aussi. Car si la troupe de Claude Julien a semblé prise de court en début de rencontre – il était pourtant évident que le Tricolore ouvrirait toutes grandes les valves dès le début – elle s’est vite remise au travail.

Les Bruins se sont frottés à quelques occasions à Carey Price. Rien de surprenant là. Ils se sont aussi rivé le nez sur un poteau alors que Loui Eriksson a vu son tir qui venait de complètement déjouer le gardien du Canadien ricocher sur la barre transversale. Encore… C’était d’ailleurs la 10e fois depuis le début de cet autre grand rendez-vous Boston-Montréal en séries qu’un tir des Bruins frappait le poteau au lieu des mailles du filet. Méchante différence…

Impossible de dire si un but d’Eriksson sur le jeu aurait miné les chances de victoire du Canadien. Ce qui est clair toutefois, c’est qu’après avoir évité le pire sur ce tir, Price a été intraitable ensuite. Fort d’une performance de 26 arrêts, le gardien n’a pas multiplié les miracles devant son filet. Bon! Il en a réalisé un aux dépens de Milan Lucic en période médiane. Il a aussi joué de chance lorsque David Desharnais a plongé derrière lui pour stopper une rondelle qui était sur le point de traverser la ligne rouge. Dans son geste de désespoir, Desharnais a non seulement sauvé un but, mais il a évité de mettre la main sur la rondelle ou de l’immobiliser dans la zone réservée au gardien ce qui aurait entraîné un tir de pénalité.

Au-delà du vol de Price aux dépens de Lucic et du sauvetage de Desharnais, le Canadien a été meilleur que les Bruins. Simplement. Complètement.

Oui, les Bruins ont passé de longues séquences en territoire du Canadien s’échangeant la rondelle à leur guise comme si le Tricolore s’en remettait simplement à son gardien. Mais comme ils l’avaient fait trop souvent lors du premier match, les Bruins ont cherché le jeu parfait en multipliant des passes qui ont fait avorter des séquences plutôt que mener à un but qui n’est jamais venu.

Parlant de séquence, quoi dire de celle qui s’est prolongée pendant plus de cinq minutes (5 :11) en deuxième période si ce n’est qu’elle a offert plus de beaux jeux, de belles passes, de mises en échec et d’occasions de marquer que certaines parties entières au cours de la dernière saison? Une des plus belles séquences de jeu qu’il m’ait été donné de voir depuis que je couvre le hockey (1994), depuis que je suis le hockey (depuis toujours)…

Et dire qu’on aura la chance de profiter d’un match décisif en prime. Ça promet!