(RDS.ca) - Bonjour chers internautes. Heureux de vous retrouver de nouveau cette semaine. Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir laissé vos nombreux commentaires la semaine dernière. Je ne pensais pas avoir autant d'admirateurs! Je suis vraiment content de collaborer avec le RDS.ca et j'espère que vous apprécierez mes prochains textes.

En début de chronique, je vais poursuivre ce que j'avais entamé la semaine dernière sur le cheminement de ma carrière. Par la suite, je vais répondre à des questions reçues au cours de la dernière semaine.

Mon arrivée à Edmonton

Lors de mon arrivée à Edmonton, j'ai trouvé la situation difficile. Lorsque qu'on est habitué de demeurer à Montréal, une ville où il y a beaucoup de choses à faire, et qu'on se retrouve à Edmonton où tout est "country", c'est passablement différent. À l'exception du West Edmonton Mall, il n'y a rien à faire à Edmonton.

De plus, à mes débuts avec les Oilers, je demeurais dans un hôtel puisque je ne savais pas si j'étais pour rester dans la Ligue nationale. Ça rendait la situation encore plus difficile.

Toutefois, ce qui fait qu'aujourd'hui j'aime la ville et que je considère Edmonton comme mon chez-moi, c'est que j'ai plusieurs amis là-bas. Je connais autant de personnes à Edmonton qu'à Montréal. De plus, la vie est plus facile en habitant dans ta propre demeure.

Populaire auprès des partisans
Il faut dire aussi que les partisans d'Edmonton m'ont adopté très rapidement. Il y a deux ans, j'ai été élu le joueur le plus populaire de l'équipe. Sans vouloir être arrogant, je m'en doutais un peu que cet honneur me reviendrait. Les gens aiment bien les joueurs qui jouent de façon robuste, qui créent de l'ambiance et qui se battent. Avant moi, il y avait eu un certain Dave Semenko qui avait aussi le numéro 27.

Une autre chose qui a peut-être joué en ma faveur est que je me m'implique beaucoup auprès de la communauté. Je réponds à plusieurs courriels, je visite des écoles et j'envoie à des enfants environ 50 à 100 photos par la poste à chaque jour. J'essaie de garder les pieds sur terre et l'argent ne m'est pas monté à la tête. Sans les partisans, le hockey ne serait pas ce qu'il est présentement. J'essaie donc de redonner aux partisans ce que l'on reçoit.

J'espère jouer toute ma carrière à Edmonton

Présentement, il me reste une autre année de contrat avec les Oilers et j'espère jouer toute ma carrière ici. Tout le monde parle argent, mais, selon moi, il n'y a pas de meilleurs endroits pour jouer au hockey qu'au Canada.

Je me sens également plus en sécurité au Canada. Avec tout ce qui s'est passé aux États-Unis au cours des dernières années, je ne sais pas si c'est la meilleure chose au monde que d'élever une famille là-bas. Je suis fier d'être Canadien et je vais faire tout en mon pouvoir pour poursuivre ma carrière au Canada.

C'est certain qu'on ne peut pas contrôler une éventuelle transaction. Toutefois, ce que je sais, c'est que si je quitte les Oilers, ça ne sera pas pour une question d'argent.

Bon début de saison

Cette saison, malgré la perte de notre capitaine Doug Weight, qui a été échangé aux Blues de St-Louis, notre formation connaît un très bon début de saison. Les succès des Oilers au cours des dernières années sont le résultat d'une équipe jeune et dynamique. Ce ne sont pas des gros joueurs autonomes, qui gagnent entre huit et dix millions par saison et qui amassent 100 points par année, qui font gagner des équipes. Il faut que le noyau de joueurs demeure ensemble. Ici, à Edmonton, nous avons pratiquement le même noyau de joueurs depuis cinq ans.

C'est certain que lorsque Doug Weight est parti, il y avait plusieurs sceptiques à Edmonton. Toutefois, je crois qu'il y a eu un effet positif auprès des joueurs. Au lieu de regarder jouer Doug, les joueurs ont élevé leur jeu d'un cran et ils veulent assumer leur rôle. Selon moi, une équipe est plus forte lorsque les 20 joueurs poussent dans la même direction au lieu qu'il y ait un seul joueur qui pousse et que les 19 autres le suivent.

En plus de perdre Doug Weight, nous avons perdu les services d'un autre bon élément depuis environ un mois, soit Ryan Smyth. Ce dernier était notre meilleur marqueur cette saison lorsqu'il a été blessé. Toutefois, l'équipe a maintenu le rythme.

Un autre aspect important de nos succès, c'est qu'on joue à quatre trios. Il y a plusieurs équipes qui jouent seulement à deux ou trois trios et qui sont brûlées lors des séries. Avec les Oilers, les quatre trios contribuent. De plus, nous avons de la profondeur. Lorsque nous avons un joueur blessé, il y en a un autre qui est prêt à prendre la relève.

Meilleur joueur de 4e trio

Il y a un peu plus d'un mois, on a mentionné que j'étais le meilleur joueur de quatrième trio du circuit. C'est un beau compliment, mais je dois dire que je ne joue pas seulement sur le quatrième trio. Notre entraîneur, Craig MacTavish, m'utilise avec presque toutes les unités à chaque match. Il arrive de me retrouver sur le premier ou le deuxième trio.

Une autre raison pour laquelle j'ai mérité cet honneur, c'est que, pour un joueur de quatrième trio, je suis beaucoup utilisé. Habituellement, un joueur de quatrième trio joue de trois à quatre minutes par partie. De mon côté, je joue en moyenne une dizaine de minutes par match. Quand vient le temps des séries, je suis encore plus utilisé en raison de mon agressivité.

Équipe olympique

Je crois que les dirigeants d'Équipe Canada ont choisi les meilleurs joueurs disponibles. Chez les Oilers, nous aurons deux représentants. Il s'agit de l'attaquant Ryan Smyth et du défenseur Eric Brewer.

Pour ce qui est de Brewer, il était vraiment content d'avoir été sélectionné. Il ne s'attendait pas à cela. Pour lui, c'était un honneur d'être seulement en nomination. Il s'est déjà arrangé avec des agents de voyage et toute sa famille sera présente à Salt Lake City. Pour lui, c'est vraiment un rêve qu'il réalise.

Pour ce qui est de Ryan Smyth, il était déçu lorsqu'il a subi sa blessure en raison de la longue période d'inactivité qu'il l'attendait. Pour lui, c'était la fin du monde.

Toutefois, il a recommencé à patiner lundi. Il a mentionné qu'il n'avait presque plus de douleur et il reviendra au jeu prochainement. C'est donc dire qu'il devrait être en forme pour les Jeux de Salt Lake City.

Dossier Patrick Roy

Dans le dossier Patrick Roy, il est important de ne pas toujours vivre dans le passé. C'est certain qu'il faut respecter un joueur qui a remporté la Coupe Stanley ou le trophée Vézina. Toutefois, on ne peut pas toujours revenir sur ces exploits et penser que l'on a droit à des privilèges.

Les dirigeants d'Équipe Canada veulent gagner autant que tous les Canadiens. S'ils avaient cru que Patrick avait une coche sur tous les autres au moment où ils ont sélectionné leurs huit premiers joueurs, ils l'auraient ajouté à leur liste. Ces gens-là connaissent le hockey.

De plus, c'est certain que tous les choix ne peuvent faire l'unanimité. Tous les entraîneurs veulent voir leur gardien à cette compétition.

Selon moi, les trois gardiens qui ont été choisis sont excellents. La différence entre les bons gardiens de la ligue est presque inexistante. Ce n'est pas comme si on avait à choisir entre Mario Lemieux et moi par exemple. Je ne crois pas que la faute reviendra au gardien si on ne gagne pas la médaille d'or.

Maintenant, je vais répondre à des questions qui m'ont été posées par les internautes au cours de la dernière semaine. En passant, lorsque vous laissez une question, n'oubliez pas d'inclure votre courriel. Parfois, je vais répondre individuellement.

La question qui est revenue le plus fréquemment est celle-ci: "Est-ce que tu aimerais poursuivre ou terminer ta carrière avec le Canadien?"

D'abord, je dois dire que le seul fait de jouer dans la Ligue nationale est un honneur. Pour moi, l'équipe avec laquelle j'évolue importe peu tant que je suis dans la LNH. Je suis bien à Edmonton et j'aimerais bien passer toute ma carrière à cet endroit. Toutefois, si Wayne Gretzky a été échangé, il est également possible que je change de camp un jour. Si ça venait à arriver, c'est certain que Montréal serait une ville plaisante, surtout en fin de carrière.

Lorsqu'on est plus âgé, c'est plus facile de jouer dans l'Est, car les voyages sont moins longs et c'est moins fatigant pour les vétérans.

De plus, c'est sûr j'aimerais jouer devant mes amis plus souvent.

Je dois dire cependant que le Canadien n'était pas vraiment mon équipe favorite lorsque j'étais jeune. Même si Montréal formait une bonne équipe, je n'aimais pas trop leur style défensif. Je préférais les formations qui marquaient plus de buts.

Voici une autre question qui m'a beaucoup été posée: "Est-ce que tu as été victime d'incidents racistes au cours de ta carrière?

Je dois dire que c'est différent selon les catégories. Entre cinq et 14 ans, ce fut la pire période. Lorsque l'on est enfant, les jeunes sont portés à nous attaquer. Leurs parents leur passent des remarques qu'ils nous transmettent par la suite. De plus, j'ai joué au hockey mineur à Sorel-Tracy et nous étions la seule famille noire de l'endroit.

Les gens dans les estrades, mes adversaires et et même mes coéquipiers me traitaient de "nègre". C'était l'enfer. La raison pour laquelle j'ai continué à jouer au hockey est que tout le monde me disait que je ne réussirai pas dans ce domaine. L'orgueil a pris le dessus et j'ai voulu leur faire avaler leurs paroles. Ce fut une source de motivation.

Le raciste est une des raisons qui a poussé ma famille à revenir dans la région de Montréal. Mon père aussi était victime de raciste à l'usine où il travaillait.

Entre 16 ans et dans le junior, c'était moins pire puisque j'étais plus gros et je pouvais me défendre. Dans le bantam AA, il y avait également un autre noir dans mon équipe, alors la situation était différente.

Dans le junior, il y a eu quelques incidents, mais surtout avec des gens dans les estrades. À Hull, les gens me traitaient de nègre ou de singe. Toutefois, Peter Worrell (un noir qui joue présentement avec les Panthers de la Floride) s'alignait avec les Olympiques. Ça n'avait pas vraiment de sens. Dans le junior, les gens dans les estrades sont parfois spéciaux. Toutefois, aucun incident n'est survenu avec des joueurs.

Dans la Ligue américaine, il y a eu des incidents, mais toujours avec le même joueur: Greg Smyth. Ce dernier évoluait avec la filiale des Maple Leafs de Toronto. Il a d'ailleurs déjà évolué avec les Nordiques de Québec. Il s'est fait suspendre à vie dans la Ligue américaine en raison d'incidents du genre. Il me traitait de nègre 20 fois par partie. Il m'a fait perdre la tête à plusieurs reprises.

Encore une fois, ces remarques n'avaient pas de sens puisqu'il y avait également un noir dans son équipe, un dénommé John Craighead.

Dans la Ligue nationale, probablement en raison de ma réputation, ça ne m'est jamais arrivé. Je dois dire cependant que mon coéquipier Mike Grier de même que Peter Worrell ont quant à eux été victimes de remarques racistes dans la LNH.

Dernière question pour cette semaine: Qui sont les meilleurs bagarreurs que tu as affrontés dans la LNH et dans la LHJMQ?

Dans le junior, il y en a trois: Mathieu Raby, Joël Thériault et Patrick Côté. Les deux premiers jouent présentement dans la Ligue de hockey semi-professionnelle avec Laval et Verdun. Pour ce qui est de Côté, il a joué dans la LNH avec Dallas, Nashville et les Oilers.

Au fil des ans, Côté est devenu un de mes meilleurs amis.

Dans la Ligue américaine, Peter Worrell a été le plus redoutable.

Dans la Ligue nationale, il y a Sandy McCarthy (Rangers), Donald Brashear (maintenant avec les Flyers) et Scott Parker (Avalanche). Je ne peux pas parler de Peter Worrell dans la Ligue nationale, car nous n'affrontons pas souvent les Panthers puisqu'ils évoluent dans l'association Est. McCarthy aussi évolue dans l'Est, mais nous nous sommes affrontés à deux reprises.

Tous les bagarreurs que j'ai mentionnés ci-dessus sont coriaces, car ils sont forts, ils donnent des coups et ils n'ont pas peur d'en recevoir.

En passant, même si nous sommes tous les deux noirs, Donald Brashear n'est pas un de mes amis comme semblent le penser plusieurs personnes. Donald reste à Québec et moi à Montréal pendant l'été. Nous ne patinons pas ensemble et on ne se voit jamais. Je ne sais pas pourquoi certains pensent que nous sommes des amis.

Sur ce, je vous souhaite une bonne semaine.

Georges