MONTRÉAL – Le nom de deux gardiens québécois se trouvaient sur la liste préliminaire des nommés pour le trophée Hobey Baker, remis annuellement au joueur par excellence du réseau universitaire américain, lors de la parution de celle-ci la semaine dernière.

Le premier n’a plus besoin de présentation. Depuis qu’il est sorti de l’anonymat en menant le Canada au match de la médaille d’or au Mondial junior l’année dernière, Devon Levi est considéré comme l’un des jeunes cerbères les plus prometteurs en Amérique du Nord. Ses chiffres cette saison à l’Université Northeastern sont étincelants. Ses neuf jeux blancs contribuent à sa minuscule moyenne de buts alloués de 1,31. Son taux d’efficacité est à ,955.

L’autre ne profite pas de la même renommée. Son nom est Yaniv Perets, un jeune homme de Dollard-des-Ormeaux, dans l’ouest de Montréal, qui garde les buts pour le programme de l’Université Quinnipiac. À sa première année en NCAA, l’ancien des Lions du Lac St-Louis joue avec l’assurance d’un vétéran. Ses performances expliquent en partie la présence des Bobcats au sommet des classements nationaux compilés par USCHO et USA Today.

« Je l’ai appris en recevant un texto d’un ami, dit Perets au sujet de sa présence parmi les joueurs considérés pour l’ultime honneur individuel dans le hockey amateur américain. Je n’ai pas regardé la liste, je ne sais pas combien il y a de noms dessus, mais c’est quelque chose de vraiment spécial. Je me souviens qu’en grandissant, tout le monde parlait du Hobey Baker. C’est vraiment spécial, mais je ne veux pas y accorder trop d’importance. Je dois me concentrer chaque jour pour continuer comme ça et après, on va voir ce qui arrive. »

Humble à l’extrême, Perets avait auparavant démarré la conversation avec une demande spéciale : il ne veut pas parler de ses statistiques. Non seulement ça, il jure tout ignorer des détails de sa fiche personnelle et comme le fan fini qui a enregistré un match et qui ne veut rien entendre avant d’avoir fini son rattrapage, il ne veut rien entendre sur le sujet.

« Si on commence à s’attarder aux chiffres et aux histoires qui y sont rattachées, on peut se perdre et s’éloigner de ce sur quoi on veut vraiment se concentrer », justifie-t-il.

Épaté par tant de sagesse, on a acquiescé sans rechigner à sa requête. Mais le secret s’arrête ici. Le rendement de Perets est trop impressionnant pour qu’on ne le passe pas sous la loupe.

Au lendemain d’une victoire de 9-0 contre Princeton dans laquelle il a enregistré son huitième blanchissage de la saison (un record d’équipe), Perets montrait une fiche de 11-0-2. Sa moyenne de buts alloués est microscopique (0,74) et son taux d’efficacité (,952) presque surréaliste. Entre le 20 novembre et le 10 décembre, il a été de garde pendant 247 minutes et 57 secondes sans accorder de but. Il s’agissait de la plus longue séquence du genre dans les 46 ans d’histoire du programme de Quinnipiac et la onzième plus longue dans l’histoire de la première division de la NCAA.

Il importe de spécifier que Perets joue derrière une défensive qu’on n’hésiterait pas à qualifier d’hermétique. Quinnipiac a accordé seulement 21 buts en 21 matchs jusqu’ici cette saison. Devant son filet, le Montréalais n’a jamais reçu plus de 23 tirs dans une partie. Il est aussi vrai que la section ECAC dans laquelle évoluent les Bobcats n’est pas réputée pour héberger les puissances de la NCAA.

Mais le portier de 21 ans est loin de n’avoir affronté que des figurants à sa première saison sur le campus du Connecticut. En octobre, il a joué ses trois premiers matchs contre Boston College et Northeastern, deux gros noms de la très relevée section Hockey East, ainsi que contre les Fighting Hawks de North Dakota, point de référence dans la National Collegiate Hockey Conference (NCHC). Il en est ressorti avec deux victoires et un match nul.

« Chaque équipe peut jouer. On voit souvent des matchs où il y a des vraiment bonnes écoles qui perdent contre des équipes un peu moins bien classées. Je pense qu’à n’importe quel moment, une équipe moins bien classée peut gagner. Alors nous, on ne se prépare pas en fonction de l’équipe qu’on affronte. On veut toujours être à notre mieux parce qu’étant donné notre classement, on sait que chacun de nos adversaires va nous offrir la meilleure version de lui-même. »

« Mais ces victoires en début de saison, je pense que ça a donné confiance à notre club, finit par concéder le gardien recrue. On a vu à ce moment qu’on pouvait jouer avec les meilleures équipes au pays, ça c’est sûr. »

Rejoindre les anciens

Le duel contre Northeastern, dont il est ressorti avec une victoire de 3-0, a été l’occasion pour Perets d’affronter un ancien coéquipier et partenaire. Levi et lui ont partagé le filet des Lions du Lac St-Louis au niveau Bantam AAA lors de la saison 2014-2015. Perets avait alors maintenu une fiche de 13-6-2 et une moyenne de buts alloués de 1,90 en 20 départs. En 12 matchs, son cadet avait accordé 2,37 buts par match et signé sept victoires.

Les deux s’affrontaient pour la première fois depuis ce productif jumelage.

« On est de vraiment bons amis, on passe nos étés ensemble, on s’entraîne ensemble, on fait tout. Et c’est un gardien incroyable, je n’ai aucun doute qu’une grande carrière l’attend après l’université. C’était une belle expérience de jouer contre lui. On se suit depuis qu’on est jeune. C’était vraiment un moment cool! »

Levi n’est pas le seul ancien coéquipier de Perets qui se retrouve aujourd’hui au seuil de la célébrité. Dans ses dernières années dans la structure élite du West Island, le natif de DDO a notamment côtoyé Joe Veleno, Gabriel Fortier, Arnaud Durandeau et Mathias Laferrière, qui appartiennent tous présentement à une équipe de la Ligue nationale.

Perets, qui a excellé partout où il est passé dans son parcours plus sinueux, n’a pas perdu espoir de les rejoindre un jour dans le hockey professionnel.