MONTRÉAL - Paul Bissonnette n’a jamais eu peur de rien ni de personne.

 

Il l’a démontré en jouant du coude pour atteindre la Ligue nationale de hockey et en jetant les gants devant tous ceux, et ils étaient nombreux, qui voulaient l’empêcher de s’y installer et d’y rester trop longtemps.

 

Bissonnette le démontre encore aujourd’hui par le biais de ses gazouillis et autres commentaires souvent très tranchants qu’il distribue à tous ceux qui tentent de lui faire la vie dure trois ans après sa retraite. Des commentaires qui font la joie de plusieurs de ses anciens coéquipiers et adversaires de la LNH qui, comme des millions d’amateurs de hockey devenus des fidèles de ses sorties, le suivent religieusement sur twitter par le biais des comptes @BizNasty2point0 (1,16 million d’adeptes), @Barstoolsports (2,2 millions d’adeptes) et ses podcasts qui représentent très bien l’auteur et la nature crue et directe de ses propos avec le titre bien choisi : @spittinchiclets.

 

Paul Bissonnette reconnaît toutefois avoir été pris par surprise par la férocité de la COVID-19. Joint en Arizona d’où il combat la pandémie avec la complicité de sa conjointe, il admet candidement être inquiet. Très inquiet même.

 

« J’ai vécu bien des choses dans ma vie. J’ai traversé bien des situations pas évidentes, mais je n’ai jamais vécu quelque chose d’aussi inquiétant. Je vais même t’avouer que j’étais vraiment effrayé lorsque j’ai réalisé l’ampleur de ce qui était en train d’arriver.»

 

Impossible cette fois de rire d’un adversaire

 

Malgré les craintes, malgré les inquiétudes, il n’était pas question de reculer. Et il n’est toujours pas question de reculer même si la pandémie semble être au plus fort de sa progression aux États-Unis et qu’elle oblige les autorités à y aller de pronostics effroyables en matière de décès.

 

« J’ai toujours été le genre de gars à me rabattre sur les aspects positifs d’une situation. À me moquer des risques, à composer avec le danger. Avec tous les morts qui s’accumulent aux USA, avec les décès qui se se multiplient partout sur la planète, avec mes parents et amis qui sont menacés à la maison au Canada – l’ancien homme-fort qui vient d’avoir 35 ans est originaire de Welland, dans une région peuplée de francophones, juste au nord de Buffalo et de la frontière américaine – il est impossible de rire de la pandémie », me lance Paul Bissonnette que j’avais justement contacté dans le but de trouver une façon de se moquer de la pandémie.

 

« J’ai ri au visage de bien des adversaires au fil de ma carrière, mais c’est la première fois que je ne trouve pas le moyen de rire devant un adversaire bien qu’il soit le plus petit à s’être mis dans mon chemin...»

 

Utiliser la force de la pandémie à bon escient

 

Ce n’est pas parce qu’il refuse de se moquer de la pandémie, que Bissonnette va se laisser frapper sans riposter. Ce serait bien mal connaître le bonhomme.

 

Comment répliquer alors? En utilisant la puissance de la pandémie comme source de motivation pour y faire face.

 

« La pandémie nous oblige à cesser nos activités. Elle nous prive de ce qu’on aime le plus. De voir ceux qu’on aime le plus. Je me dis alors que c’est l’occasion parfaite pour utiliser ce temps à notre disposition pour s’occuper de nous. Pour travailler sur les moyens à prendre pour sortir plus grands, plus forts, meilleurs de cette expérience », lance Bissonnette qui se met à défiler des exemples.

 

« Trois ans après ma retraite, j’ai décidé de m’occuper de ma santé physique cette année. J’ai coupé toute consommation d’alcool le premier janvier pour une période d’un an. Le défi que représente la Covid-19 m’incite à être plus actif encore dans cette quête de sobriété. J’ai la chance de vivre en Arizona. Il fait beau. Il y a de l’espace à perte de vue. On en profite ma conjointe et moi pour faire beaucoup de marche en montagne. Pour se pousser physiquement.»

 

En plus de prendre les moyens pour s’assure d’avoir un corps sain, Bissonnette tient à s’assainir l’esprit aussi.

 

« Depuis la fin de ma carrière, je m’occupe beaucoup du volet " business " de ma retraite. Je suis très actif sur la scène médiatique avec les Coyotes et sur le plan personnel. Je me donne à cet après carrière de la même façon que je me consacrais à ma carrière : c’est à dire à 100 miles à l’heure. En me battant pour toujours avancer. Je réalise que ça m’a détaché des réalités du quotidien. Que la vie " normale " n’est pas aussi intense que celle que j’ai connue pour me rendre et rester dans la LNH. Mes parents ont dû rentrer à la maison à cause de la pandémie. Et maintenant qu’on ne peut plus se voir, je réalise à quel point tout mon monde est important pour moi. Je réalise que je dois profiter de l’occasion pour renouer avec eux. Ce serait bien aussi si j’arrivais à réaliser qu’il est impossible de plaire à tout le monde. Ça m’aiderait à composer avec les critiques que j’essuie dans le cadre de ma nouvelle vie. Peut-être que ça m’aiderait à être moins cinglant dans mes répliques », admet-il candidement.

 

Remarquez que cette dernière « amélioration » serait peut-être moins populaire auprès de ses adeptes qui adorent justement son côté un brin incisif, deux brins abrasif.

 

Qu’il réussisse ou non à sortir de la pandémie avec un esprit plus sain dans un corps plus sain encore, Paul Bissonnette assure toutefois que son appétit pour le sport sera plus grand qu’il ne l’a jamais été.

 

« Je sais que le sport est minuscule quand on le compare aux conséquences de la maladie. Autant les conséquences médicales que nous encaissons tous les jours que les conséquences économiques que nous encaisserons encore pendant longtemps. Mais quand on fait face à des épreuves, on a aussi besoin de se retrouver autour d’activités collectives. J’ai d’autres passions que le sport. Mais quand tu y penses, le sport permet à des millions de personnes de non seulement se divertir, mais de trouver du réconfort. De retrouver un peu de force pour faire face aux défis quotidiens de la vie. Ça nous aide à nous regrouper. J’ai hâte que le sport nous permette de nous unir à nouveau. »

 

D’ici là, Paul Bissonnette martèle l’objectif qu’il s’est fixé au début de cette aventure. L’objectif qu’il tient à partager avec le plus de gens possible.

 

« Je sais que ce n’est pas facile. Que c’est même difficile. Mais tentons de tirer le plus de positif dans tout ce qui nous arrive. Travaillons sur des aspects de notre vie et de nos personnalités que nous voulions améliorer depuis longtemps sans jamais avoir le temps de la faire. Sans jamais prendre le temps. Du temps, nous en avons tous maintenant. À nous de ne pas le gaspiller. »