Je croyais d’abord qu’il s’agissait d’un bazar, du genre que l’on voit souvent dans les parcs des grandes villes, que les citoyens organisent à des fins caritatives. Ou d’une exposition d’art moderne, qui attirait l’attention des passants et qui favorisait ce regroupement sur Copley Square. Deux policiers surveillaient la scène, ce qui me laissait croire encore plus au caractère formel de l’événement. Je me suis demandé que diable signifiaient toutes ces espadrilles nouées autour de clôtures amovibles et ces fleurs disposées au centre de l’endroit?

En une fraction de seconde, mon sang est devenu glacé et j’ai eu une chair de poule terrible. J’ai aussitôt réalisé que c’est à Copley Square qu’eurent lieu les actes terroristes qui ont marqué la fin du marathon de Boston et depuis cette tragédie, un « monument » commémoratif improvisé grandit sans cesse et continue à prendre de l’ampleur, au cœur des kiosques des maraîchers, des bancs publics et des enfants qui courent en riant. Bannières, fleurs, drapeaux américains et irlandais, photos des victimes et surtout, des centaines et des centaines de souliers de course noués sur des barrières de sécurité occupent un espace important à quelques mètres de la rue Boylston, là où les coureurs se sont affaissés au moment de la déflagration.

Près de deux mois après la tragédie, le mouvement de sympathie tient toujours le fort. Tous les jours, quelques pièces s’ajoutent, un bouquet, un message de paix et bien sûr, quelques espadrilles supplémentaires. Comme le disait à un quotidien une citoyenne de Boston, sympathique à l’idée de maintenir ce mouvement de commémoration, « c’est comme si les coureurs s’étaient donnés leur propre cathédrale extérieure et je ne peux m’empêcher de venir m’y recueillir, comme je le ferais au passage devant une grande église ». Aujourd’hui encore, en plein jour de semaine, des dizaines de personnes venaient prendre discrètement une photo, hochaient la tête en signe de dépit ou fermaient tout simplement les yeux en signe de respect.

L’idée ne fait pas l’unanimité, cependant. Une recherche rapide dans différents quotidiens de Boston nous permet de constater que, bien que ce mouvement de sympathie spontané ne fasse aucun doute, certains chroniqueurs préfèreraient que la ville de Boston érige rapidement et de façon permanente un « vrai » monument qui assurerait la conservation du caractère historique de l’événement et agirait surtout come pièce d’honneur à la mémoire des victimes.

Avant le match d’hier, les Bruins ont invité sur le tapis rouge trois membres de la famille d’un policier tué par l’explosion du 15 avril. Ils ont reçu une ovation monstre en agitant le drapeau de l’équipe.

Non, Boston n’oublie pas.

Difficile d'ébranler Boston
Difficile d'ébranler Boston

Les statues et le chandail des Bruins

Sur un note un peu plus légère, on peut aussi constater que les autorités de la ville de Boston n’ont surtout pas oublié leurs Bruins en cette finale 2013. Plusieurs statues officielles de la ville ont été recouvertes du fameux chandail noir et jaune de l’équipe locale. Ainsi, John Singleton Copley, le célèbre peintre portraitiste en l’honneur de qui fut dédié Copley Square, porte le chandail des Bruins. George Washington, sur son cheval dans le grand jardin public de la ville porte le chandail des Bruins. Même les canards en bronze, à l’effigie du conte pour enfant « Make Way for Ducklings »,  dans le même grand jardin public de Boston, portent le chandail des Bruins!

À n’en pas douter, les partisans des deux villes représentées en finale craquent pour leur équipe. Ce sont deux grandes villes de sport et les gens qui y vivent sont habitués de démontrer leur support et leur engagement. Mais il semble y avoir une petite ferveur additionnelle à Boston!