QUÉBEC – Pour un vétéran de 36 ans, les matchs préparatoires représentent plus souvent qu’autrement un mal nécessaire, un ennuyeux passage obligé avant le début de la vraie saison.

Pascal Dupuis connaît la chanson. Il en est à son quatorzième camp d’entraînement. Mais celui-là est le plus beau de tous.

Dupuis avait les yeux brillants dans un coin du vestiaire des visiteurs lundi soir, quelques minutes après une défaite de 4-1 de l’équipe B des Penguins de Pittsburgh aux mains du Canadien. Mais son émerveillement n’avait rien à voir avec le fait que ses coéquipiers et lui venaient de passer à l’histoire en disputant le premier match de la Ligue nationale sur la patinoire du nouveau Centre Vidéotron.

ContentId(3.1148312):Penguins 1 - Canadiens 4
bellmedia_rds.AxisVideo

Son regard était plutôt celui de la reconnaissance, du genre qui illumine le visage d’un homme pleinement conscient de sa chance.

« Celle-là était spéciale, la première était spéciale... Toutes les parties vont être spéciales. Je n’étais même pas sûr de jouer de nouveau, alors je vais les prendre une à une et elles seront toutes aussi spéciales les unes que les autres », répétait-il, sans souci pour le synonyme.

ContentId(3.1148314):En contrôle du début à la fin
bellmedia_rds.AxisVideo

Dupuis revient de loin. La saison dernière, la détection d’un caillot de sang dans l’un de ses poumons l’a forcé à mettre un terme prématurément à sa saison, mais surtout à réaliser que tout aurait pu subitement s’arrêter.

« Je ne sais pas si tu me regardes un peu quand je suis sur la patinoire, mais j’ai le sourire fendu jusqu’aux oreilles, tenait-il à faire remarquer après un match qui était autrement dénué de signification. J’adore pratiquer, j’adore m’entraîner, j’adore être sur la patinoire pour jouer des matchs. J’aime l’atmosphère d’être dans une gang, dans une chambre de hockey. J’aime jouer au hockey devant ma femme et mes enfants. Ça aussi, c’est spécial. »

Dupuis, qui a amassé onze points en 16 matchs avant de se résigner à prendre du repos la saison dernière, promet qu’il est de retour à 100%.

« Je suis capable de pousser, je suis capable de tout donner. J’ai commencé le camp d’entraînement en même temps que tout le monde. C’est sûr que si j’étais revenu, après une histoire comme ça, en plein milieu de saison, je n’aurais pas dit que mon synchronisme aurait été vraiment bon. Mais le fait que j’aie recommencé en même temps que les autres, après un été complet à m’entraîner, me fait dire que je commence au même niveau que tout le monde. Ça va revenir assez rapidement. »

Celui que ses coéquipiers surnomment « Duper » ne recherche donc pas la clémence de ses pairs et encore moins celle de ses entraîneurs.

« J’espère que non! Ça fait deux ans que je me repose! », répond-il en haussant gentiment le ton quand on lui demande s’il s’attend à être ménagé par l’entraîneur Mike Johnston en début de saison.

Reste à voir le rôle que le vétéran de 950 parties dans la LNH, séries éliminatoires incluses, occupera cette saison. Les Penguins ont ajouté quelques vétérans à l’attaque au cours de l’été. L’acquisition la plus médiatisée a été celle de Phil Kessel, qui vient complètement changer la dynamique des deux premiers trios à Pittsburgh. Dupuis, jadis le loyal et productif bras droit de Sidney Crosby, préfère aborder cette nouvelle compétition interne avec une perspective rafraîchie.

« On vient d’ajouter un marqueur de 40 ou 50 buts, dépendamment si Sid décide de lui mettre sur la palette à tous les jours! », rigole-t-il, ajoutant ensuite avec plus de sérieux que les plans du coach n’était pas relié à son niveau de bonheur.

« Moi je suis ici et je me présente à l’aréna. Mon nom est où? À gauche, à droite, au centre... pourvu que je joue au hockey. C’est tout ce qui compte pour moi en ce moment. »

Dupuis est sous contrat pour les deux prochaines saisons. Si tout va bien, il atteindra le plateau des 1000 matchs de saison régulière avant de devenir joueur autonome sans compensation à l’été 2017. Il aura alors 38 ans.

Mais cet éternel négligé ne voit pas encore la fin du chemin. Un jour, peut-être sera-t-il de retour à Québec pour un vrai match de la Ligue nationale. Celui-là serait encore plus spécial.

« Assez jeune? Je n’aurais peut-être pas dit ça il y a dix mois, mais là je pense que oui... »