LAVAL – Après 432 parties dans la LAH, la ECHL et la KHL, Jeff Glass pouvait bien croire que son premier match dans la Ligue nationale ne présenterait jamais. Ce rêve, il l’a finalement accompli à 32 ans, près de 13 après avoir été repêché.

 

Même si vous n’avez jamais joué au hockey ou que vous n’avez jamais eu le talent pour rêver à la LNH l’instant d’une seconde, cette histoire peut vous faire du bien.

 

En 2005, Glass était le gardien numéro un de l’édition d’Équipe Canada Junior qui a tout pulvérisé sur son passage. Il était le coéquipier des Sidney Crosby, Ryan Getzlaf, Patrice Bergeron, Shea Weber, Jeff Carter, Corey Perry, Brent Seabrook et compagnie. Jeff Carter, Jeff Glass et Corey Perry

 

À l’image de ces grandes vedettes, il pensait que les portes de la LNH allaient s’ouvrir pour lui et qu’il allait régner devant le filet des Sénateurs d’Ottawa qui l’ont repêché en troisième ronde en 2004.

 

Son destin l’a plutôt mené vers quatre saisons dans la LAH, sept saisons dans la KHL et deux saisons de nouveau dans la LAH pour son retour en Amérique du Nord. La plupart des athlètes auraient eu le temps d’effacer la LNH de leurs rêves depuis des lunes.

 

Mais une blessure à Corey Crawford a mené à son rappel par les Blackhawks de Chicago. Une fois que son vol a atterri à Edmonton à 2 heures du matin, l’Albertain a appris qu’il allait enfin vivre son baptême de la LNH contre les Oilers. Déjà, on aurait cru que c’était difficile d’élaborer un meilleur scénario.

 

On avait tout faux, Glass a brillé avec 42 arrêts pour hériter de sa première victoire en prolongation de surcroît devant ses parents, sa femme et sa petite fille de deux mois.

 

Ce magnifique conte de la période des Fêtes a voyagé jusqu’à Laval où deux joueurs du Rocket, Adam Cracknell et Kyle Baun, ont été ses coéquipiers.

 

« C’est vraiment merveilleux! J’ai suivi sa carrière quand il est allé en Russie. C’est super de voir qu’il y a toujours de l’espoir pour les gars qui décident de s’accrocher. Il le mérite vraiment », a confié Cracknell avec un visage illuminé.

 

Le choc a été encore plus spécial pour Baun.

 

« Je n’avais pas eu vent de la nouvelle donc je l’ai juste vu devant le filet à ma grande surprise. Que demander de mieux que d’affronter les Oilers pour un gars de l’Alberta! En plus, ça s’est rendu en prolongation et il a gagné », a réagi Baun qui l’a connu lors des deux saisons précédentes avec les IceHogs de Rockford.

 

Les deux hommes ne s’en cachent pas, ils sont épatés par la persévérance de Glass et particulièrement après son long détour dans la KHL.

 

« Ce fut définitivement une longue aventure pour lui. Ce n’est pas rien d’être resté pendant sept ans dans la KHL. Je suis extrêmement heureux pour lui », a insisté Baun.

 

« Quand un joueur part outre-mer, on croit la plupart du temps qu’il a fait un trait sur la LNH. C’est plus vu comme une chance de voir le monde et de voyager. Mais de revenir de cette manière, c’est une très belle histoire et peu de joueurs peuvent accomplir ça. Il a eu le courage de revenir pour viser son rêve », a exprimé Cracknell.

 

Baun se souvient d’ailleurs que Glass lui a raconté quelques péripéties de son périple en Europe comme les interminables voyages dans des avions parfois inquiétants.

 

« Mais il fait quand même partie des joueurs qui ont apprécié leur expérience dans la KHL. Bien sûr, il aurait aimé être ici, mais il s’est habitué à une vie différente et il s’est développé un réseau là-bas sans oublier son rêve ultime », a-t-il noté.

 

Peut-il s'établir dans la LNH ?

 

Baun a fait plus ample connaissance avec Glass lorsqu’ils ont été retranchés du camp d’entraînement des Blackhawks au même moment.  

 

« Il pensait encore à la LNH et il avait été déçu d’être retranché aussi rapidement. C’est génial de voir qu’il a continué de s’accrocher et qu’une ouverture a pu se présenter à lui.

 

« En plus, il est devenu papa récemment, ça lui fait toute une année pour lui ! », a cerné Baun qui s’est assuré de lui envoyer un message de félicitations.

 

Jeune papa également, Cracknell n’a pas oublié la confiance qui animait Glass lors de leurs trois saisons à titre de coéquipiers avec Kootenay, dans la WHL, de 2002 à 2005.

 

« Il a toujours cru qu’il pourrait se rendre. Je me souviens qu’il était l’un des plus grands travaillants. Il avait été le gardien avec ÉCJ et ça lui avait permis de constater qu’il pouvait être un gardien dominant à un haut niveau », a évoqué Cracknell sans avoir à chercher longtemps dans ses souvenirs.

 

Autant que son histoire est belle, autant qu’elle aurait été cruelle si cette expérience s’était arrêtée à une seule partie. Mais non, Glass a pu revenir devant le filet des Hawks dans sa ville natale, Calgary, dès le 31 décembre pour une défaite de 4-3 en prolongation. Les probabilités ne sont pas immenses, mais ce serait audacieux de parier contre lui quant à ses chances de s’incruster dans la LNH à long terme.

 

« Quand la confiance est au rendez-vous, ça peut se produire. Il a les outils pour y arriver, mais bien sûr, tout dépend de la relève qui se dessinera avec les Hawks », a évalué Baun.

 

« Oui, il peut y parvenir, il a la personnalité et l’éthique de travail pour le faire. Je lui souhaite vraiment que ça devienne un mandat régulier », a prononcé Cracknell qui a joué 208 matchs dans la LNH.

 

Sylvain Lefebvre, l’entraîneur du Rocket, n’a jamais dirigé Glass. Cependant, il reconnaît que ce type d’accomplissement constitue de l’excellent matériel pour ses enseignements quotidiens.

 

« C’est vraiment une belle histoire, ça peut devenir une motivation pour certains de nos joueurs que ce soit des gars qui n’ont jamais joué dans la LNH ou d’autres qui ont dû se contenter que de quelques matchs et qui sont rendus à cet âge. Peu importe l’âge, on aime dire aux gars qu’ils ont une chance de monter dans la LNH. Il ne faut pas que tu perdes le rêve, ton objectif. Sinon, tu finis par être satisfait de jouer dans la Ligue américaine », a témoigné Lefebvre.

 

« Ça peut aussi dire que certains jeunes sont impatients quand ils commencent leur carrière professionnelle. Parfois, c’est mieux de prendre un peu plus de temps, peut-être pas autant que lui, mais de se rendre de la bonne manière », a ajouté Lefebvre en souriant.

 

Quand on entend que tout part d’un rêve, Glass a fini par admettre l’inévitable au terme de ses débuts magiques contre les Oilers.

 

« C’est quelque chose dont j’ai toujours rêvé, mais je n’ai jamais pensé que ça se produirait un jour. »