QUÉBEC – Emprunter la voie du hockey universitaire canadien n’équivaut plus à la renonciation de ses espoirs d’une carrière professionnelle. Francis Beauvillier et Charles-David Beaudoin s’ajoutent à la liste des exemples de plus en plus fréquents.

Auparavant, les histoires à la Mathieu Darche se classaient parmi les exceptions. Lentement, mais sûrement, le calibre relevé du hockey universitaire canadien a convaincu les organisations de la LNH de piger parmi ses ressources.

Repêché en sixième ronde par les Panthers de la Floride en 2012, Beauvillier vient d’obtenir une nouvelle occasion de se rendre jusque dans la LNH, où son petit frère Anthony n’a pas tardé à se faufiler.

Âgé de 23 ans, Beauvillier a choisi de faire bifurquer son cheminement vers l’avenue universitaire au lieu de se démener à gravir les échelons professionnels en partant de la ECHL. Bientôt titulaire d’un baccalauréat en administration, Beauvillier vient de persuader l’organisation des Jets de Winnipeg de lui faire confiance.

Francis BeauvillierAprès avoir aidé l’Université du Nouveau-Brunswick à mériter le championnat canadien pour une deuxième année de suite, Beauvillier a été invité en mars dernier à rejoindre le club-école des Jets, le Moose du Manitoba de l’entraîneur Pascal Vincent.

« J’ai accepté sur le champ, des chances comme celles-ci ne se présentent pas tous les jours », a convenu Beauvillier, qui a pris le temps de compléter ses examens avant de filer.

Il s’est rapidement illustré avec quatre buts et une aide en neuf rencontres. Résultat, un contrat lui a été offert cet été et la balle est maintenant dans son camp. Le mérite lui revient puisqu’il a été capable de surmonter l’épreuve de s’éloigner du chemin conventionnel.                 

« À ma première année, c’est sûr que c’était un grand choc de retourner universitaire. Mais tu finis par te dire que d’autres y sont parvenus comme mon entraîneur adjoint (Rob Hennigar), qui avait signé un contrat à sa sortie universitaire. J’ai toujours cru que je serais capable de me dénicher quelque chose », a confié Beauvillier, qui a représenté les MAINEiacs, l’Océanic, les Cataractes et les Huskies dans la LHJMQ.

 « Au début, quand tu te diriges vers le niveau universitaire canadien, tu penses que c’est une ligue un peu plus pour s’amuser. Mais quand je suis arrivé là-bas, j’ai vu que les gars étaient bien sérieux, ils veulent continuer de jouer au hockey et monter professionnel », a-t-il ajouté.

L’encadrement des Varsity Reds lui a été salutaire tout comme le nombre limité de parties.

« Je suis tellement content pour lui, il le mérite. Il est allé chercher de la confiance et c’était bon pour lui d’avoir un cheminement un peu plus long. Il a joué un peu moins de hockey donc il pouvait penser un peu plus à chacune de ses parties », a expliqué Anthony, qui jouait dans la même équipe que son frère au Boot Camp de Québec en fin de semaine dernière.

Le passage universitaire a confirmé sa véritable identité sur la patinoire. Plus mature, il a mieux saisi le rôle qui lui sied bien – celui d’attaquant de puissance – et ses nuances.  

« Dans le junior, tu essaies plus de ramasser le maximum de points pour montrer aux gens que tu peux compter. Mais dans la LNH, ça ne prend pas juste des marqueurs, ça prend des joueurs pour les compléter. Que ce soit pour procurer de l’énergie, se placer autour du filet et jouer sur les unités spéciales. J’ai développé ça au niveau universitaire et ça m’a donné de la confiance », a exprimé l’attaquant de puissance de 6 pieds 2 pouces et 200 livres.

Beauvillier doit surtout une fière chandelle à ses entraîneurs desquels il a apprécié l’approche plus cordiale que dans le junior ou le professionnel.  

Quand le petit frère devient l’inspiration du grand frère

Tant qu’à ne pas faire comme les autres, pourquoi ne pas avoir son petit frère comme modèle?

« Ce que je dis à tout le monde, c’est que normalement le plus jeune regarde le plus vieux. C’est plus le contraire, c’est moi qui le regarde aller maintenant pour sa façon de se comporter sur la glace et dans le gymnase, son dévouement à l’entraînement et sa manière d’agir. C’est bizarre de dire que mon frère est rendu l’un de mes modèles, mais c’est le cas », a avoué Francis, qui campait avant l’autre rôle pour Anthony.

L’idée fait bien du sens, surtout que le « petit frère » vient de conclure une saison recrue concluante avec les Islanders de New York.

« J’ai vu l’amélioration dans son jeu, c’était frappant. Je lui ai dit ‘Hey simonac, t’as pris un step’. C’est génial de le voir aller », a conclu Beauvillier, qui discute surtout avec son frangin de ce qui se passe à l’extérieur de la patinoire.

Beaudoin a réussi le même tour de force avec l’UQTR

Tout comme Beauvillier, Charles-David Beaudoin a gagné son pari à la suite de deux campagnes universitaires avec les Patriotes de l’UQTR. L’ancien des Voltigeurs de Drummondville et de l’Océanic de Rimouski a d’abord hérité d’une chance dans la ECHL avec les Oilers de Tulsa, un club affilié aux Jets de Winnipeg, mais les Senators de Binghamton sont venus le ravir et il a pu disputer six parties dans la LAH.

L’excellent étudiant a réussi cet examen haut la main et il pourra essayer de gravir les échelons au sein de l’organisation des Sénateurs d’Ottawa.

Charles-David Beaudoin « Je suis choyé et je vais en profiter. Je sais exactement ce qu’ils aiment de moi. Je dois être physique, fiable défensivement et garder le jeu simple. Un défenseur sur un troisième duo ne peut rien coûter à son équipe, il doit être fiable. Ils ont apprécié ça et ma première passe », a maintenu le défenseur droitier qui retrouvera Martin Raymond, son entraîneur à Drummondville, qui a eu de bons mots pour lui dans ce vote de confiance.   

Honnête, il admet qu’il n’était pas vendu à l’idée de poursuivre son ascension en passant par le hockey universitaire canadien.

« J’étais le premier à me le faire vendre à 20 ans et je n’y croyais pas tant que je n’ai pas mis un pied dans ce circuit. Ça s’améliore année après année. C’est super et j’ai juste hâte de voir plus de joueurs sortir de là. On n’a rien à envier aux programmes américains outre leurs infrastructures », a relaté le patineur de 23 ans qui a raté le camp de développement des Sens en raison d’une blessure. ​

« Côté talent, on joue souvent pour ,500 dans les matchs préparatoires contre des universités américaines. C’est une ligue à découvrir avec un gros potentiel », a poursuivi Beaudoin avec pertinence.

Au final, sa décision qui s’est imposée à la suite d’une blessure a été la meilleure.

« Avec du recul, je ne pense pas que j’aurais été prêt à jouer professionnel à 20 ans. J’ai gagné en maturité et je suis beaucoup plus fiable et constant sur la patinoire. »

De manière quelque peu surprenante, Beaudoin a lancé le bouquet de fleurs à son partenaire à la ligne bleue, Martin Lefebvre, pour son évolution.  

« Il va avoir une très belle carrière en Europe, il vient de partir pour le Danemark. J’ai appris beaucoup sur la patinoire à ses côtés. Il m’a aidé sur beaucoup d’aspects dont pour devenir plus calme dans mes décisions », a vanté Beaudoin.

En dépit de son diplôme en finances, l’athlète originaire de Drummondville a continué d’investir sur sa carrière de hockeyeur.

« J’aurais pu choisir l’option d’aller sur le marché du travail, mais le rêve de jouer professionnel a toujours été là. C’était vraiment un pas de côté quand je suis allé universitaire. C’était clair et précis dans ma tête que je voulais jouer professionnel.

« Ce n’est pas facile de s’accrocher parce que les recruteurs se déplacement pratiquement seulement pour les Championnats canadiens. Tu n’as pas le choix d’être concentré sur ton objectif. J’ai été chanceux, je n’ai eu besoin que de deux ans, c’est très difficile de continuer d’y croire pour un joueur qui y demeure pendant trois, quatre ou cinq années », a détaillé Beaudoin, qui désire démarrer son entreprise après avoir vécu son rêve jusqu’au bout.