Rien ne mobilise les partisans de hockey au Québec à la fin février de chaque année comme l’arrivée prochaine de la date limite des échanges au hockey. Cette date critique en 2015 est le 2 mars prochain.

C’est à ce moment, à la veille des séries de fin de saison, que le paysage prend forme et que les attentes augmentent en intensité. La saison préférée des amateurs de hockey arrive, et les yeux sont rivés sur le classement chaque jour. Les nombreux partisans des équipes aspirantes spéculent sur les joueurs disponibles, épient les faits et gestes de leur DG, nourrissent les rumeurs et attendent impatiemment la conclusion de cette journée annuelle pour se prononcer sur les chances de leur équipe en vue de la prochaine coupe Stanley à être gagnée en juin prochain.

Trois options pour les équipes

Le 2 mars, les équipes de la NHL auront approximativement moins de 20 matchs à jouer d’ici la fin de la saison régulière. Lorsque les équipes discutent de leurs stratégies internes en vue de la date limite, ils y vont en fonction de trois options concrètes. D’abord, si une équipe est en position de force au classement, et que les dirigeants croient en leurs chances de gagner cette année, ils seront fort possiblement en discussion avec d’autres équipes dans le but de s‘améliorer. Comment acquérir le joueur qui peut combler un besoin, qui peut apporter le soutien offensif ou défensif, ou remplacer un joueur clé blessé? Il est plutôt rare d’être en position de force après 60 matchs et de penser pouvoir aspirer à la coupe Stanley, alors il faut réagir et foncer. Il ne faut pas manquer cette occasion comme les Canucks, les Sharks ou les Capitals qui ont vu leur fenêtre d'opportunité se fermer rapidement devant eux après avoir été des aspirants sérieux à une conquête de la coupe Stanley.

Une équipe qui est stable depuis octobre dernier et qui se sent compétitive après les trois-quarts de la saison peut très bien ne pas sentir l’obligation de transiger en vue des séries.  On peut affirmer dans ce cas que l'équipe de direction est confiante et a pris la décision d’aller de l’avant avec sa formation actuelle. Il faut le rappeler : en séries éliminatoires, il suffit souvent d’un gardien exceptionnel pour se faufiler jusqu’en finale et même gagner.  Dans certaines situations, il arrive aussi qu'une équipe soit stable mais sans pouvoir être une aspirante sérieuse aux grands honneurs. Les dirigeants prendront donc la décision de demeurer inactifs à la période des échanges. 

Devante Smith-Pelly et P.K. SubbanFinalement, il existe des équipes qui sont en phase de reconstruction, et qui ont pris la décision de tout simplement lancer la serviette et de rebâtir.  Cela se produit souvent avec une nouvelle administration, un nouveau propriétaire qui décide de recommencer.  C’est un processus pénible qui peut être long, mais c’est souvent nécessaire après plusieurs années difficiles. C'est la voie que semblent vouloir emprunter les Maple Leafs de Toronto cette année.

Évidemment, on comprend tous comment il est difficile de gagner un championnat sportif, peu importe le sport d’équipe. Il y a tellement de variables et de facteurs qui peuvent changer les circonstances telles une blessure à un joueur clé, une série de victoires au moment opportun, l’ascension d'un joueur qui devient soudainement très productif au moment crucial, etc. Chaque année, 29 équipes sont en quelque sorte « perdantes » puisqu’une seule remporte la coupe Stanley. Cependant, nous savons tous qu'en réalité les autres équipes n’ont tout simplement « pas gagné » plutôt que d’avoir perdu. Dans une ligue à 30 équipes, la compétition est telle que si chaque équipe gagnait à tour de rôle, elle gagnerait la coupe Stanley tous les 30 ans et donc trois fois en 100 ans! On constate alors que les 24 coupes Stanley en 106 ans du Canadien de Montréal, plusieurs à une autre époque doit-on rappeler, lui donnent une fiche exceptionnelle. 

Toutefois, nous sommes en 2015, et tout ce qui compte pour le consommateur ou le partisan est le moment actuel. Maintenant. Et dans ce cas-ci, on commence à s’impatienter, et ce, dans le Canada en entier, où aucune équipe canadienne n’a gagné la coupe Stanley depuis 1993, soit il y a 22 ans de ça déjà. La nouvelle génération de partisans âgés de moins de 30 ans n’a presque pas de souvenirs de cette dernière conquête. Imaginez à Toronto où le partisan de 48 ans n’a jamais vécu une coupe Stanley des Leafs!

Points à considérer sur le plan commercial

Au cours d’une saison de hockey, les rencontres des membres du conseil exécutif du club sont nombreuses. On y traite de sujets très variés allant de la préparation d'une conférence de presse, au lancement d'un produit, en passant par une nouvelle entente commerciale ou encore, des résultats de la vente des billets. Chaque département fait un court bilan des sujets d’actualités de la semaine. À cet égard, le rôle de la section affaires de l'équipe est de comprendre les décisions de la direction hockey et de les supporter. Pour sa part, le rôle de la section hockey est de présenter la composition de l’équipe, les performances de certains joueurs, leurs blessures, et évidemment des besoins sur la glace. Cependant, plus la date limite des échanges approche, plus les discussions des membres de l'exécutif se tournent vers la situation des autres clubs, des joueurs de la ligue susceptible de changer d’équipes et bien entendu, sur le statut et la stratégie de notre équipe. Selon la façon de travailler des directeurs généraux – certains sont plus discrets que d’autres quant aux joueurs convoités, nous aurons quelquefois une idée des changements envisagés.

D'un point de vue commercial, il y a plusieurs points  à considérer lorsqu’on parle d’échanges à cette période de la saison. En temps normal, l'emphase des activités du secteur marketing et opérations est mis sur les sujets qui touchent les revenus, les résultats commerciaux et les événements au calendrier. Cependant, en coulisse, beaucoup de temps est consacré à se préparer pour l’appel du directeur général avec les détails d’une transaction. Lorsque cette dernière est confirmée, l'équipe se regroupe et aborde un par un les différentes plateformes qui sont à modifier immédiatement : par exemple, des changements seront requis sur le tableau électronique où le nom d'un joueur échangé doit être remplacé par celui d'un joueur acquis. Aussi, la vidéo de l’avant-match devra être  modifiée, tout comme les autres images apparaissant sur le tableau ou encore la décoration des rues avec les oriflammes. Tout le matériel de communication marketing collatéral sera révisé pour éviter un oubli et pour intégrer rapidement la nouvelle acquisition dans l’effort marketing.

Plus en détails, tout ce qui touche le site web, soit les images numériques, les statistiques ou les vidéos, doit être revu et modifié. Il faut soustraire le joueur qui quitte et insérer rapidement le joueur nouvellement arrivé. Dans le magasin de produits dérivés, on enlève les chandails et produits du joueur ayant été transigé, et on offre tous ces produits en rabais. Au même moment, la production de chandails avec le numéro et le nom du nouveau joueur est lancée tout comme une panoplie de produits dérivés, casquettes, t-shirts et autres, à l’effigie du nouveau membre du club.

En conclusion, il y a certains facteurs financiers à considérer lors d'une transaction de joueurs. Par exemple, quel sera l’impact sur la vente de billets ou de loges d’ici la fin de saison. Malgré une grande quantité de billets de saison vendus et de loges louées pour la saison entière, la plupart des équipes ont des billets à vendre et des loges à louer pour chaque match. La décision d'une équipe de se départir de certains joueurs en vue de reconstruire risque d'aliéner plusieurs partisans qui achètent des billets occasionnellement et de réduire leur intérêt pour les billets des matchs restant au calendrier. De façon concrète, cela peut se traduire par plusieurs centaines de billets pour la vingtaine de matchs à jouer. Ce sont ainsi des centaines de milliers de dollars qui s’envolent. Parfois plus. 

Par contre, l'acquisition d'un joueur de qualité pour la course aux séries, à l’inverse,  peut générer un surplus financier et créer un sentiment de fébrilité chez les partisans de l'équipe si, bien entendu, l'équipe réussit à participer aux séries. 

Reste à voir si dans le cas des Canadiens, qui viennent d’acquérir Devante Smith-Pelly, les partisans réagiront de façon enthousiaste ou non. Ils ne le connaissent probablement pas beaucoup. Mais le personnel des Canadiens chargé de son accueil, son transport local, son hébergement temporaire et sa recherche d’une résidence, apprendra à le connaître rapidement. Dès le premier jour, ce sera son intégration au Centre Bell ainsi qu’au Complexe Sportif Bell et l’arrivée dans son nouveau vestiaire. Jusqu’au moment où il fera son entrée officielle sur la glace pour son premier match à domicile. Son équipement sera sur mesure aux couleurs du club. Le nouveau numéro 21 des Canadiens rencontrera le personnel médical, le personnel de soutien et tous les autres, comme le service de communications et marketing, et soudainement sa nouvelle vie débutera à Montréal.

Donc, l’approche de la date limite du 2 mars aura tout un effet sur plusieurs clubs, certains voulant devenir prétendants à la coupe Stanley, et d’autres qui lanceront officiellement la serviette. Reste à savoir si le Tricolore accueillera d’autres nouveaux venus ou dira simplement adieu à certains joueurs actuels d’ici lundi prochain à 15 h.