J’allais chercher mon café, comme d’habitude, au Starbuck de l’aéroport de Dorval, tout juste avant le vol vers Pittsburgh. Un membre du personnel de sécurité de l’aéroport qui marchait près de moi me salua et me posa rapidement la question que la plupart des gens me posent ces jours-ci : « le Canadien va-t-il participer aux séries ? »

J’aime bien, en général, retourner cette question à un interlocuteur par une autre question. « Et vous, qu’est-ce que vous en pensez ? » Ce n’est certainement pas par dérision ou par dépit que j’agis de la sorte, bien au contraire. J’adore tout simplement tâter le pouls des amateurs de hockey pour saisir où se situent leurs niveaux d’intérêt, de confiance, de passion. Mon intervenant d’hier ne m’a pas déçu quant à la clarté de sa position personnelle.

« Honnêtement, je crois qu’il est impossible d’espérer une participation aux séries. C’est mathématique, il y trop d’équipes devant nous et pas assez de matchs à jouer d’ici la fin de la saison. Il faut être réaliste et accepter la situation. »

Devant une telle objectivité, j’ai décidé de passer à l’autre étape de la discussion. « Et à compter de maintenant, que souhaitez-vous, en tant que fan du Canadien ? » Là aussi, la réponse fut aussi intéressante que claire et nette.

« Il faut cesser de vivre dans le passé », dit-il. « Il est impossible, de nos jours, de maintenir des équipes gagnantes à chaque saison. Il faut accepter d’aller vers le bas pour rebâtir plus solidement, comme l’ont fait plusieurs équipes qui ont du succès présentement et espérer, comme à Ottawa, que le processus se fasse plus rapidement que prévu. En tout cas, moi, je me range maintenant vers cette solution. Je suis prêt à cela dorénavant, en tant que partisan. »

Croyez-moi, mes amis, des commentaires du genre, on en entend de plus en plus présentement. Se pourrait-il que la vieille croyance qui veut « qu’on ne peut vraiment rebâtir le Canadien dans le contexte montréalais » commence à s’effriter ?

Vision et transparence

Il faut faire bien attention avant de sauter aux conclusions et je suis convaincu que la direction du Canadien a en mains plusieurs données provenant de sources fiables qui lui permettent de mesurer adéquatement l’humeur de ses partisans et de ses clients, ainsi que leurs attentes. Mais chose certaine, au fil de discussions impromptues, on ne peut nier un certain changement dans les mentalités par rapport à il y a 15, 20 ou 25 ans. L’époque où on entendait simplement des commentaires du genre « j’échangerais Untel contre Untel » quand les choses ne tournent pas rond semble maintenant bien lointaine.

Je crois plutôt déceler, dans les réactions des amateurs, un souhait très prononcé de voir leur équipe se remettre sur les rails de la bonne façon, en projetant une vision éclairée de l’avenir. Et dans ce contexte, je crois aussi saisir une volonté de « transparence » de la part de plusieurs partisans, qui ne demanderaient pas mieux que d’endosser un plan de relance clair et précis qui leur serait exposé et qui tiendrait compte de la réalité d’aujourd’hui.

Je sais que cette idée ne rallie pas tout le monde. L’impatience et l’intransigeance font encore partie des mœurs quand on parle du Tricolore. Certains rêvent encore d’une transaction spectaculaire qui pourrait corriger tous les bobos d’un seul coup. Mais est-ce bien réaliste ?

Au cœur de cette saison difficile, plusieurs d’entre vous ont exprimé leur déception autant (sinon plus) sur la forme que sur le fond de la situation. La position du Canadien au classement dérange et fait mal à ses fans, c’est sûr. Mais la volonté de voir une équipe sportive aussi prestigieuse se redresser avec sérieux, panache et dignité semble maintenant s’établir comme priorité absolue pour une grande majorité.