Le rendez-vous des recrues, un tournoi à prendre avec un grain de sel
LNH samedi, 7 sept. 2019. 09:00 jeudi, 12 déc. 2024. 10:49Ne ratez pas le match des recrues Canadien-Sénateurs en webdiffusion sur le RDS.ca, samedi à 19 h.
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BELLEVILLE – Un silence d’église drapait les gradins du CAA Arena de Belleville vendredi pour l’entraînement matinal des espoirs des Sénateurs d’Ottawa. Quand Troy Mann a pris un joueur en grippe parce qu’il avait mal compris les subtilités de l’exercice qu’on lui avait demandé d’exécuter, chaque syllabe de chaque juron qui est sorti de sa bouche a fait sursauter la poignée de spectateurs qui ont été réveillés par cet esclandre.
« Si tu crois que c’était intense ce matin, tu aurais dû voir hier, relativisait, sourire en coin, l’attaquant Logan Brown après la séance. Manner, c’est un coach intense. »
Comme l’entraîneur-chef du club-école des Sénateurs, peut-être abordez-vous le tournoi des recrues qui oppose en fin de semaine les espoirs des Sens, du Canadien et des Jets de Winnipeg avec un sérieux frôlant le zèle. Et pourquoi pas! Enfin, un peu de concret à se mettre sous la dent après avoir passé l’été à analyser le repêchage de votre équipe et à maudire la passivité de votre DG sur le marché des joueurs autonomes.
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Mais des bémols sont de mise. Les balbutiements d’un camp de recrues sont toujours approximatifs et les observations et résultats qui en découlent doivent être pris avec un grain de sel. Dans l’excitation comme dans la panique, rappelez-vous qu’il faut en prendre et en laisser.
D’abord, chaque équipe n’aborde pas l’exercice avec la même approche. Les Sénateurs, par exemple, ont convoqué à Belleville six joueurs qui possèdent une certaine dose d’expérience dans la Ligue nationale. Quatre d’entre eux peuvent entretenir l’espoir réaliste d’amorcer la saison avec le grand club à Ottawa.
À l’autre extrémité du spectre, le Canadien (Ryan Poehling) et les Jets (Kristian Vesalainen) comptent chacun sur un seul de ces « vétérans » en fin de semaine. Voilà un premier facteur qu’il faudra prendre en considération avant de grimper dans les rideaux à la lecture des sommaires.
« On y va toujours avec des équipes très jeunes, assumait Joël Bouchard lors de sa rencontre avec les médias montréalais jeudi. C’est la philosophie du Canadien et je la supporte. Il y a des équipes, comme Belleville et Toronto l’année passée, qui sont plus expérimentées, plus vieilles que nous. C’est un camp de recrues, c’est pour évaluer des jeunes espoirs du Canadien ou des jeunes espoirs que les dépisteurs ont sélectionné pour qu’on les voit. L’an passé, ça a permis de découvrir Joël Teasdale et de lui offrir un contrat. On va être encore très jeunes cette année évidemment. C’est une politique d’organisation et c’est correct aussi. »
« Pour moi, c’est le scénario idéal, renchérit Pascal Vincent, l’entraîneur-chef du club-école des Jets. J’aime mieux notre position dans ce tournoi-là que celle des Sénateurs parce que si tu as des joueurs de la Ligue nationale qui jouent contre des juniors, des gars de la USHL qui essaient de se faire une place dans une organisation – j’aime mieux l’évaluation du gars qui va être en compétition contre des gars de la LNH que l’inverse. »
La troupe de Vincent a payé le prix à son premier match du week-end, s’inclinant par un pointage prévisible de 8-1 contre les jeunes Sens. Mais les chiffres auxquels le coach accorde de l’attention ne sont pas au tableau indicateur dans ce genre d’événement.
« Peut-être que ça ne sera pas beau ce soir, le score final, avait prédit avec justesse Vincent. Mais ça va nous donner une belle évaluation d’où les individus qu’on a invités sont rendus dans leur développement. C’est un tournoi qui nous donne tellement d’informations et de données qu’on peut voir ce que chaque joueur doit travailler et prédire lequel a une chance – juste une chance – de jouer pour les Jets un jour. »
Des hommes, pas des machines
Il faut aussi se garder une petite gêne lorsque surgit la tentation de sceller le sort d’un joueur après un match ou deux au tournoi des recrues. Jesperi Kotkaniemi aurait passé la saison dernière en deuxième division finlandaise si l’évaluation des gérants d’estrade avait influencé celle de la direction du Canadien après ses premiers coups de patins à Laval l’automne dernier.
Pour diverses raisons, certains des joueurs les plus attendus ne joueront pas à la hauteur de leur potentiel ou de leur réputation en fin de semaine. Parfois, c’est un Européen sur le décalage horaire qui cherche encore ses repères sur une patinoire nord-américaine. Parfois, c’est un joueur fraîchement échangé qui s’adapte encore à la philosophie de sa nouvelle équipe.
Si Mann gueulait à ce point après ses ouailles vendredi matin, c’est justement parce qu’il souhaitait optimiser le peu de temps à sa disposition pour familiariser chaque membre de l’assemblage hétéroclite qu’il dirige à la structure de son programme.
« Ça prend du temps, insiste-t-il. Prenez par exemple Vitaly Abramov, qui est selon moi un joueur bien différent aujourd’hui de celui qu’il était quand il est arrivé de Columbus l’an dernier. J’ai d’ailleurs utilisé son cas pour faire comprendre un point lors d’une séance vidéo hier. Il jouait d’une certaine manière quand on a fait son acquisition. Ce n’était pas mal, mais ce n’était pas la façon dont on demandait à nos joueurs de jouer ici. Il s’est adapté et a connu une excellente fin de saison. »
C’est quelque chose qu’il faudra garder en tête au cours des prochains jours si les prometteurs Josh Norris et Jonathan Gruden, qui sortent directement des rangs universitaires, ou Erik Brannstrom, qui a été initié avec les méthodes des Golden Knights de Vegas, ont l’air un peu perdus.
Et puis parfois, on tombera sur un joueur qui n’en a rien à cirer, du camp des recrues. Aussi simple que ça.
« Je l’ai vu dans le passé, ne cache pas Vincent. Nikolaj Ehlers, à l’époque où notre camp commençait à Penticton, n’avait pas connu un bon tournoi parce que sa tête était déjà avec les Jets. Ça ne lui tentait pas pantoute parce que lui, dans sa tête, ce n’était pas là qu’il allait faire le grand club et il ne pouvait se permettre de se blesser avant le vrai camp. Ça peut jouer dans la tête des joueurs. Et tu sais quoi? Je les comprends. Ce n’est pas pour donner des excuses à nos joueurs, je ne dis pas que c’est la meilleure façon d’agir, mais c’est compréhensible. »
« Tout ça pour dire qu’il faut faire attention avec ces joueurs-là parce que ton évaluation peut être faussée », conclut-il avec sagesse.
Vous voilà donc avertis. Bon tournoi!
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