Je lance tout de suite une mise en garde à ceux de ma génération : prenez mon prochain commentaire avec discernement ! Mais je vous avoue que par moments, vendredi soir, les Penguins de Pittsburgh 2013 me faisaient parfois penser au Canadien des années 1970!

Avec deux trios capables de faire plier les genoux à n’importe quelle défense, avec des employés de soutien de très haute qualité, avec un défenseur au talent exceptionnel comme Kristopher Letang et même avec un gardien en apparence parfois douteux, mais qui s’avère très efficace, comme Ken Dryden pouvait l’être dans certaines facettes de son jeu à l’époque, il n’y a qu’un pas à franchir avant de faire cette comparaison.

Cette constatation est aussi valable sur le plan collectif. Lorsque les Penguins ont pris les devants mercredi dernier à Ottawa et aussi vendredi soir, lors du match final, ils ont donné à leurs adversaires une leçon de contrôle de rondelle tout simplement brillante. Vous vous souvenez de la façon avec laquelle le Tricolore de Scotty Bowman semblait s’amuser avec le disque, à la belle époque et comment l’adversaire pouvait mal paraître en pareille circonstance? Ce fut une situation tout simplement similaire lors des deux dernières rencontres de la série entre Ottawa et Pittsburgh.

Bien sûr, tout commence par Sidney Crosby. Après une première rencontre plutôt ordinaire à l’issue de laquelle il s’est lui-même mis en défaut devant les amateurs, Crosby a pris son équipe sur ses épaules. On retiendra, bien sûr, son tour du chapeau dès le match suivant, mais personnellement, je retiens tout autant ses efforts de replis défensifs ou d’échec-avant, même tard dans la rencontre de vendredi, alors que la cause était dans la poche pour son équipe. Autour de « Sid », chacun joue son rôle, en alternance, soir après soir. Imaginez si Evgeni Malkin parvient à jouer à la hauteur de son immense talent dès le début du tour suivant! Ce sera étourdissant pour l’adversaire, même s’il s’agit des Bruins, une équipe redoutable en séries.

Letang dans une classe à part

Il serait très important de ne pas oublier le nom de Kristopher Letang dans l’équation. Peu de défenseurs m’ont ébloui, comme lui le fait présentement, depuis mes débuts au hockey de la LNH il y a près de 25 ans. J’ai souvent dit à mes collègues que lorsque le nom d’un joueur de défense revient constamment dans mes descriptions, dans toutes les facettes du jeu et dans les trois zones de la patinoire, c’est qu’il possède tout simplement un don exceptionnel. Il y eut Paul Coffey, certes, puis Raymond Bourque, aussi. Scott Nierdermayer possédait aussi ce talent démesuré. Or, Letang en est pratiquement à ce point présentement.

Tout comme son capitaine, il a mis un certain temps à se mettre véritablement en marche dans la série contre Ottawa. Le grand déblocage s’est fait à compter de la deuxième période, lors du 4e match. Au premier vingt, on a vu un Letang frustré, même hors de lui après des erreurs d’exécution qui n’avaient aucune commune mesure avec son jeu habituel ou celui de son équipe. En véritable leader, il a remis son aplomb complet à l’avant-scène, dès le début de la période et a terminé sa soirée de travail avec quatre mentions d’assistance. Il en a fourni deux de plus, vendredi.

Je n’enlève rien à Erik Karlsson qui, visiblement, traînait encore des séquelles de sa blessure au tendon d’Achille au cours des présentes séries. Mais lors de cet affrontement entre les Sénateurs et les Penguins, Letang était tout simplement dans une classe à part.

Un pas de plus pour les Sénateurs

Le directeur général des Sénateurs d’Ottawa, Brian Murray, nous avait donné deux excellentes réponses aux questions que nous lui avions posées plus tôt cette saison. À savoir comment cette équipe parvenait à être dans le coup malgré les absences cruelles de ses meilleurs joueurs (Spezza, Karlsson et Anderson), il avait simplement répondu que son personnel de recrutement et de développement avaient fait tous les deux un travail impeccable au cours des dernières années. À la question à propos d’un échange éventuel de son capitaine Daniel Alfredsson, à un moment où les choses s’envenimaient un peu pour les Sénateurs, il avait simplement dit : « Si c’est lui qui me le demande, je vais lui accorder ce privilège. Sinon, il restera ici. Voilà le respect total que j’ai pour lui ».

On connaît la suite. Les jeunes Sénateurs ont encore étonné l’univers du hockey en déplaçant les montagnes. Et le vénérable Alfredsson s’est avéré une grande inspiration, autant en saison qu’en séries.

Au cours des deux ou trois prochaines années, cette équipe va poursuivre son évolution et elle pourra compter bientôt sur un gardien de très haute qualité en Robin Lehner. Elle a ajouté quelques perles cette saison comme Jean-Gabriel Pageau, Jakob Silfverberg et Mika Zibanejad. L’avenir à Ottawa est donc plein d’espoir.

Reste à savoir si celui qui fut l’âme et le cœur des Sénateurs dans l’histoire de la franchise sera au rendez-vous, cet automne. Il y a fort à parier que oui. Si ce n’est pas sur la patinoire, Daniel Alfredsson se verra certainement offrir d’y être… à d’autre titre.