KRASNAÏA POLIANA, Russie – Audrey Robichaud était prête à mettre une croix sur son rêve olympique. La bosseuse de Val-Bélair a plutôt atteint la finale des Jeux olympiques de Sotchi en obtenant la neuvième place de la première séance de qualification, jeudi.

Les 10 premières bosseuses sur 30 compétitrices ont obtenu ce privilège, dont les trois autres membres de l’équipe canadienne, les soeurs Justine, Chloé et Maxime Dufour-Lapointe, tout comme la grande favorite, l’Américaine Hannah Kearney, qui a dominé la séance.

Pourtant, il y a un mois environ, Robichaud n’aurait pas parié sur sa participation : son médecin venait de lui apprendre qu’une blessure au genou l’empêcherait possiblement de skier pour quelques semaines.

En larmes, elle croyait alors sa qualification impossible, jusqu’à ce que les dirigeants de l’équipe canadienne lui rappellent qu’une clause de blessure dans le processus de qualification lui permettait d’ajouter un troisième résultat de l’an dernier, lui garantissant ainsi son billet pour Sotchi.

Ayant dû déclarer forfait pour les compétitions de Lake Placid et de Val St-Côme, la skieuse de 25 ans a mis les bouchées doubles au cours des dernières semaines afin d’être prête pour les Jeux.

« Ça va vraiment bien présentement. Dans les deux dernières semaines, j’ai vraiment fait beaucoup de progrès, a indiqué celle qui avait pris part aux Jeux de Turin, en 2006, à 17 ans seulement. Seulement, le fait que je n’avais pas skié en compétition depuis un mois m’inquiétait un petit peu. Ça fait du bien d’être de retour. »

D’autant plus que ses descentes d’entraînement sur la piste du Parc extrême Rosa Khutor ne l’avaient pas particulièrement rassurée.

« J’avais du bon stock, mais il me restait à mettre toutes les pièces ensemble. Mais ça a bien été (jeudi) soir et je suis contente. Il aurait fallu que j’aille un peu plus vite, mais j’étais un petit peu nerveuse en haut, alors j’étais sur les freins. Mais je suis quand même satisfaite de ma descente.

« Je me sentais bien tout le long, mais je savais que je devais aller plus rapidement. Je voulais que tout soit parfait : mes sauts, mes virages. C’est certain que la vitesse manquait, mais je pense que samedi je vais pouvoir ajuster cela. »

« Une des premières choses qu’on lui a dite quand elle s’est blessée, c’est de rester positive, de vivre le moment présent et elle a fait une sacrée job avec ça, a indiqué Jean-Paul Richard, l’un des entraîneurs de l’équipe canadienne. Elle a fait attention à sa rééducation. À Tignes (où l’équipe a tenu son camp pré-olympique), elle a fait un très bon entraînement et ici, elle a fait exactement ce qu’elle avait à faire. Elle a travaillé extrêmement fort et (jeudi), on en voit le résultat. »

Après sa participation surprenante aux Jeux du Turin, Robichaud a frappé un mur en 2009-2010 et raté sa qualification pour Vancouver. Mais elle est revenue en force par la suite, signant notamment ses deux premières victoires en Coupe du monde (à Naeba au Japon, en duel, et à Inawashiro, en simple, le format utilisé aux JO), en plus de terminer troisième au classement général en 2011.

Cette année, elle est un peu « l’autre » membre de l’équipe canadienne, un peu dans l’ombre des soeurs Dufour-Lapointe. Elle en a d’ailleurs assez de devoir répondre aux questions les concernant.

« Je ne sais pas ce que ça pourrait changer pour moi. Moi, je suis ici pour faire mon ski. Elles, c’est certain qu’elles vivent un beau trip ensemble. Moi, je fais comme à toutes les autres courses. Elles sont trois et moi, c’est moi. »

Quand une journaliste française lui a demandé si elle trouvait énervant qu’on parle toujours des trois soeurs, elle ne s’est pas défilée.

« Pas que c’est énervant, mais revenez-en! Je ne veux pas dire que c’est achalant, mais quand c’est rendu que je suis plus interviewée à propos des soeurs que de moi, c’est un peu plate. L’autre jour, j’étais à une conférence de presse et c’était n’importe quoi. Les questions étaient niaiseuses.

« Demandez-moi comment ça a été. Demandez-moi comment va mon genou, comment j’ai fait pour me rendre ici à Sotchi. Mais non. C’est tellement gros leur histoire que tout le monde veut savoir comment ça se passe de l’intérieur. Mais il ne se passe rien de différent que toutes les autres courses. »

Ce qui s’est par contre passé différemment dans cette course, c’est que les trois soeurs, désirant « demeurer dans leur bulle » ne se sont pas adressé aux — cinq — médias canadiens sur place pour être témoin de leur performance.

« Le plan des Olympiques, c’est planifié depuis plusieurs années, mais c’est vraiment en place depuis le 6 juin dernier. On connaît nos filles. Certaines sont émotives et quand elles mettent en piste le bon degré de cette émotivité, on a les résultats qu’on a eus (jeudi) soir. Ça faisait partie du plan qu’il n’y ait pas beaucoup d’entrevues aux Jeux, a tenté d’expliquer Richard. Elles ont fait la conférence de presse à Montréal et celle au début des JO, mais là, on veut vraiment qu’elles se concentrent sur le travail en piste. »

« C’est juste pour s’assurer de mettre tout en place pour obtenir de bons résultats pour qu’il y ait de bonnes histoires après la finale, a ajouté l’entraîneur Marc-André Moreau, comme on le fait au niveau physique ou nutrition. »