La coupe d’ici cinq ans avec une équipe qui nous ressemble. Voici en résumé le souhait exprimé par le président de l’Impact de Montréal Joey Saputo lors de son bilan annuel. Un souhait qui constitue en réalité un objectif que le onze montréalais s’est fixé dans le cadre d’un plan de travail pour les cinq prochaines années. « C’est en masse de temps, » a laissé entendre Saputo au directeur technique, Adam Braz.

Vous conservez un « feeling » mitigé à propos des plans quinquennaux? Eh bien, on peut quand même s’avancer en disant que celui-ci paraît réaliste, étant donné le progrès réalisé par le Bleu-blanc-noir sur le terrain lors des dernières saisons. À court terme, voici ce qu’on vise en 2017 : une participation aux séries pour une troisième année consécutive, une place parmi les quatre premiers dans l’Association Est et enfin, la reconquête du championnat canadien.

Des dirigeants satisfaits de la saison

Évidemment, la fin de saison à saveur positive nous laisse sur une impression que les ingrédients sont là. En dépit de la parité qui règne en MLS (n’oublions pas que ni l’un ni l’autre des finalistes 2015 n’ont atteint les séries cette année), on ne pourra pas dire que l’Impact place la barre trop haut, ni trop bas. Le fait qu'on veuille accomplir tout ça avec « une équipe francophone, multi-culturelle et passionnée » est également à souligner même si l'on risque de se faire voler le slogan bien vite par un parti politique. Qu'à cela ne tienne, l'Impact ne se trompe pas avec cette plateforme-là.

Les ingrédients, donc : parlons-en. Car le bilan a servi de prétexte pour nous annoncer en bonne partie avec quels morceaux de casse-tête on considérait assembler le portrait la saison prochaine. Du coup, finie l’aventure montréalaise pour les Gagnon-Laparé, Ontivero et Bekker. Retour confirmé pour Harry Shipp et Johan Venegas. Comme quoi le sort d’un joueur peut changer rapidement au sein de l’effectif. Les dernières prestations plus encourageantes de Venegas (et son contrat valide pour une autre année) lui auront probablement permis de convaincre le club alors qu’on ne semblait plus vraiment compter sur lui à la fin de l’été. Reste donc les dossiers Bernier, Oduro et Lefèvre à régler, mais la direction laisse actuellement présager qu’on peut s’attendre à un dénouement positif dans chaque cas. Tout le monde se croise les doigts pour pour que la charrue ne se trouve pas tout à coup devant les boeufs.

En deuil du FC Montréal

Si on peut déplorer le manque d’opportunités offertes à certains des joueurs sacrifiés, il reste qu’on détecte une forme de cohérence dans les décisions prises par la direction de l’Impact. « L’identité et la direction de l’équipe n’ont jamais été aussi fortes », claironnait Joey Saputo tout en soulignant la contribution de Mauro Biello aux récents succès de l’équipe. Avec la dissolution du FC Montréal, on confirme du même coup la décision de réorienter les efforts de l’Académie vers les quelques éléments locaux les plus susceptibles d’atteindre le niveau professionnel.

« Une saison historique »

À cet effet, il est évident que la fin du FC Montréal est une mauvaise nouvelle en termes de débouchés potentiels pour les espoirs du soccer québécois. Les lois du marché et les résultats en-deçà des attentes pour la deuxième équipe du club n’auront certainement pas joué en faveur de sa survie. Les plus cyniques n’auraient pas tort d’affirmer que l’Impact s’est débarrassé de ce que l’on a fini par considérer comme un fardeau. Avec son partenariat avec le Fury d’Ottawa, le onze montréalais trouvera néanmoins un moyen d’offrir une sorte de post-formation à des espoirs âgés entre 18 et 23 ans.

La solution n’est pas idéale, certes, mais elle demeure praticable. En termes de répercussions, on peut craindre l’exode en dehors de nos frontières d'une bonne proportion des joueurs qui auront passé le cap des 18 ans sans décrocher de contrat - une situation semblable à celle qui régnait avant la mise en place d’une équipe réserve à l’Impact, ce qui remonte à la belle époque de l’Attak de Trois-Rivières. À moyen terme, c’est probablement le niveau du soccer senior québécois, davantage que l’Impact en soi, qui en sortira perdant. Or, on ne pourra toutefois pas reprocher à la direction montréalaise sa volonté de cibler de façon efficace l’élite au sein même de son centre de formation afin d'en tirer profit. Et dans l’immédiat, ce que ça nous dit, c’est que le chemin vers le Stade Saputo passera dorénavant par Ottawa pour un défenseur central comme Thomas Meilleur-Giguère.

Renfort confirmé

Le bilan aura aussi été l’occasion de confirmer l’arrivée prochaine de Blerim Dzemaili avec l’Impact lors de l’été 2017. Tel qu’anticipé, l’international suisse sera joueur désigné et on aura des attentes comparables à celles des autres éléments de premier plan de l’équipe (Ciman, Piatti) quant à son apport sur le terrain. Cette acquisition ne déclenchera certainement pas l’hystérie comme ce fut le cas pour Didier Drogba, mais on peut néanmoins parler d’un investissement raisonnable servant à combler un besoin.

Dépenser intelligemment, c’est aussi la mission que se donne l’Impact pour rivaliser avec des clubs aux bourses plus profondes comme le Toronto FC ou encore New York City, lesquels sont prêts à mettre le paquet pour attirer des joueurs désignés. « On a ni les moyens, ni le marché » pour adopter une telle stratégie, rappelle Saputo. La volonté de prolonger l’entente avec Matteo Mancosu témoigne de cette approche, vu sa bonne adaptation au circuit Garber et sa production offensive très satisfaisante.

Dans un entretien récent avec la presse, le commissaire Don Garber parlait d’ailleurs du début d’une nouvelle ère en MLS dans laquelle les franchises du circuit miseraient davantage sur de jeunes vedettes que sur les joueurs en pré-retraite. Pensez Lodeiro et Giovinco plutôt que Lampard et Gerrard: des joueurs auxquels on offre une « montre en or » pour les remercier de nous procurer une visibilité. Il n’y a rien de mal à agir ainsi, dit Garber, mais il est peut-être temps de chercher des joueurs moins âgés qui ne pensent pas juste à cette montre en or.

De sages paroles pour le dirigeant d'un circuit qui poursuit sa croissance, mais qui voit poindre à l'horizon une plus grande compétition avec l'Europe et d'ambitieux clubs chinois. Et pour ce qui est du Suisse Dzemaili, on présume que Joey Saputo a compris qu'il n’est pas du genre à constamment demander quelle heure il est…