C’est une période mouvementée à l’Impact de Montréal. Après une victoire sur le terrain contre le Crew de Columbus samedi dernier, c’est dans les médias que les choses se sont enflammées en début de semaine. Déjà aux prises avec le mécontentement de la famille Ciman, qui a affiché publiquement sa déception quant aux services reçus par leur fille atteinte d’autisme, le club a dû gérer la visite de Bakary Soumare dans les bureaux de la direction.

Insatisfait de son utilisation, le Malien a demandé un transfert lundi dernier. « Demande et tu recevras », me disait ma mère. Soumare a appris mercredi qu’il quittait Montréal pour Dallas. Un échange annoncé officiellement jeudi matin par le bleu-blanc-noir qui reçoit en retour le milieu de terrain canadien Kyle Bekker. Une transaction dont les causes sont aussi intéressantes à évaluer que les joueurs en questions.

L’échange

Le départ de Soumare soulage non seulement l’Impact d’un joueur mécontent, mais aussi d’un salaire trop important pour un défenseur qu’on laisse sur le banc, 225 000 $ pour être exact. Problème résolu? Pas tout à fait. Avec l’arrivée de Bekker, le club a possiblement multiplié son casse-tête plutôt que de l’éliminer. Le milieu de terrain a un profil intéressant, mais la congestion est totale à son poste. Qui écopera? Possiblement un autre milieu ou peut-être Bekker lui-même, comme ce fut le cas pour Issey dans un échange un peu forcé la saison dernière. Chose certaine, la réflexion doit être intense dans les chambres d’hôtel de Kansas City où l’équipe affrontera le Sporting samedi.

Reo-Coker, Alexander et Mallace sont-ils assurés de finir la saison à Montréal? Et Bernier? Pour garder tout le monde un tant soit peu heureux, rien n’est moins certain. Avec l’arrivée de tout nouvel individu, un effet domino s’opère au sein d’un groupe. Lorsque le joueur en question est de très grande qualité, ou a une longue feuille de route, il est plus facile de le faire jouer rapidement. Dans le cas de Bekker, la situation pourrait être plus compliquée. Si le milieu de 24 ans est inséré dans le XI de départ dès ses premières semaines à Montréal, la grogne pourrait se faire sentir à nouveau.

L’Impact de Montréal aurait-il pu céder Soumare sans soulager le FC Dallas de Kyle Bekker? Je ne possède pas tous les outils pour répondre à cette question (vous m’en pardonnerez), mais le joueur et le club y auraient peut-être gagné au change.

Communication

Les propos de Bakary Soumare ont été virulents avant son départ. Le club dans son ensemble et Adam Braz en particulier ont été la cible de déclarations-chocs. Chez les partisans et dans les médias, les opinions sont partagées sur ses commentaires. Certains y ont vu des paroles complètement déplacées venant d’un homme amer, alors que d’autres y voient plutôt un club dysfonctionnel mis au grand jour par un joueur qui n’a plus rien à perdre. De quel côté penchez-vous?

« Personne ne m'a jamais rien dit »

Dans ses commentaires chargés d’émotion et trop appuyés, je n’ai toutefois pu m’empêcher d’entendre Soumare faire écho à ce que certains joueurs qui l’ont précédé ont dit de façon moins tranchante. Troy Perkins, considéré comme un individu exceptionnel par tous ceux qui l’entourent, a lui aussi évoqué un manque de communication lors du bilan de fin de saison l’an dernier. Laissé de côté au profit d’Evan Bush depuis plusieurs mois déjà, le vétéran portier de neuf saisons ne savait pas ce qui l’attendait pour la suite.

Interrogés sur leurs situations respectives, Patrice Bernier et Jack McInerney n’avaient pas plus de réponses au début de la présente saison quant aux attentes du club et aux raisons de leur faible utilisation. Le personnel technique ne peut passer son temps à justifier et expliquer chaque décision, mais certaines situations méritent et doivent être adressées. Autrement, des événements comme ceux de cette semaine risquent de survenir.

Deux poids, deux mesures?

Comme le soulignait Soumare cette semaine, il y a le sport lui-même et la « business » du sport. Cette dernière peut être cruelle. Les joueurs finissent tout de même par la comprendre et faire avec. Ils arrivent cependant moins bien à gérer l’incohérence entre le discours et les gestes posés.

Voilà peut-être pourquoi le nouveau défenseur de Dallas a réagi si violemment quand Adam Braz a affirmé ne pas vouloir d’un joueur qui n’a pas envie d’être à Montréal. Soumare faisait-il allusion au cas d’Ambroise Oyongo en affirmant qu’il y a « des joueurs qui n’avaient pas envie d’être ici, mais on les a forcé »? Force est d’admettre que la position prise par le directeur technique détonne avec la patience démontrée par le club dans le dossier du Camerounais. Une situation qui rappelle le manque de forme physique évoqué par Klopas pour justifier la présence de Bernier sur le banc en 2014, alors que Marco Donadel a, pour sa part, admis ne pas avoir plus de 70-75 minutes dans les jambes plus de quatre mois après le début du camp d’entraînement cette saison.

Il est impératif que les décisions du personnel technique soient respectées par les joueurs et ne soient pas constamment remises en question. Il est tout aussi important pour les entraîneurs et la direction d’avoir un discours cohérent et applicable à tous, afin d’éviter qu’un sentiment d’injustice fasse surface.

Ambassadeurs

Le bleu-blanc-noir est difficile à cerner pour le reste de la MLS. Ce club du nord-est où on parle une langue étrangère. Deux atouts pour l’Impact si vous voulez mon avis, mais qui en font tout de même un marché particulier. Pour devenir une destination attrayante, l’Impact a besoin d’ambassadeurs à l’intérieur même de la ligue et non seulement à l’étranger. Les joueurs qui sont passés par Montréal vantent-ils maintenant les mérites de la ville et du club ailleurs sur le continent?

Tous les clubs vivent un certain roulement de personnel et voir des joueurs quitter l’équipe fait partie du métier. Lorsqu’il monte à bord de l’avion à l’aéroport Trudeau pour son départ, l’impression qu’un joueur a de son passage au club est toutefois d’une importance capitale. Bakary Soumare est-il l’exception ou la règle? A-t-il partagé aux médias un sentiment que les Arnaud, Perkins, Brovsky, Felipe et autres ont gardé pour eux en quittant la belle province ou l’Impact a-t-il plutôt de bons ambassadeurs à travers la MLS? Je souhaite évidemment que le second scénario reflète la réalité.