Vous savez, les choses ne se déroulent pas toujours comme on l’avait imaginé. Au début de l’année, ni le Crew de Columbus, ni les Timbers de Portland ne figuraient parmi les favoris au titre en MLS. Leur cote à l’époque? En février dernier, on donnait à Las Vegas 15 pour 1 au Crew et 25 pour 1 aux Timbers.

Question de vous donner une idée du spectre des projections qu’on faisait à ce moment-là, le LA Galaxy pointait en tête à 3 pour 1, tandis que l’Impact était en queue de peloton à 50 pour 1. Même à la fin du calendrier régulier, les deux finalistes de cette année n’étaient pas favoris pour aller jusqu’au bout en séries. Parité, quand tu nous tiens...

Il y a donc beaucoup de travail qui a mené Crew et Timbers au match ultime. Et les deux équipes partagent plusieurs ressemblances qui expliquent en bonne partie leurs succès en cette fin de saison. Mais vous savez quoi? C’est Columbus qui va gagner.

Pourquoi? C’est difficile à expliquer. Outre le fait que mes yeux ont cligné lorsque vous avez fait apparaître un carton noir et or avec le logo du Crew, disons que l’hémisphère droit de mon cerveau n’est pas du genre à justifier ses décisions. Mais pour les besoins de la cause, passons à l’examen des formations en face-à-face et compilons les raisons.

Des bûcherons costauds en arrière

Devant les buts, il faudra quand même reconnaître que les Timbers ont un avantage. Non seulement Adam Kwarasey a été excellent pendant les séries d’après-saison, particulièrement contre le Sporting KC lors d’une séance de pénaltys absolument mythique, il vient tout juste de remporter le titre d’arrêt de l’année en MLS. En deux mots: Kwarasey domine, comprenez-vous? N’enlevons toutefois rien à Steve Clark, le gardien du Crew. Mais disons que s’il lui arrive de soulever la foule du MAPFRE Stadium assez régulièrement, ce n’est pas toujours en raison d’arrêts spectaculaires. En somme, mettons un crochet du côté des Timbers. ✅

Parlons des lignes arrières et des poids lourds de chaque côté. Avec le recul, on s’aperçoit que l’acquisition de Nat Borchers à l’entre-saison par les Timbers fut la pierre fondatrice d’une défense plus étanche que par le passé, qu’il soit jumelé à Ridgewell ou même à Paparatto - finalement pas si mauvais que ça contre Dallas. Ce Borchers représente également une menace lorsqu’il avance sur coups de pied arrêtés. Est-ce que l’entraineur Caleb Porter a noté que Patrice Bernier a déjà marqué de la tête sur corner contre le Crew? Columbus a beau être commandité par Barbasol, il n’est pas dit que le club de l’Ohio pourra faire la barbe au plus grand des bûcherons.

Mais est-ce suffisant pour adjuger la victoire aux Timbers? Non, car le duo autrement plus sobre du Crew - voir moins de poil et de tatous - une paire formée par Michael Parkhurst et Gaston Sauro, fait tout aussi bien le travail que ses rivaux. Vous vous demandez encore pourquoi Drogba fut privé d’occasions contre Columbus? Dirigez vos soupçons vers le tandem Sauro-Parkhust. Les même suspects pourraient être mis en cause dans le cas de Bradley Wright-Phillips, porté disparu durant la finale de conférence contre les Red Bulls.

C’est donc sur les côtés que ça pourrait se décider. Portland compte sur des latéraux de bonne valeur en Jorge Villafaña et particulièrement Alvas Powell, un Jamaïcain de 21 ans que le site whoscored.com classe au 4e rang de toute la ligue pour les performances individuelles cette saison. Pourtant, Columbus jouant à la maison, ce sont des joueurs comme Waylon Francis et l’étonnant Harrison Afful qui pourraient le plus contribuer, que ce soit pour offrir des ballons dans la surface à Kei Kamara ou simplement pour appuyer les efforts des ailiers Meram et Finlay. Dans cette catégorie, avantage au Crew. ✔️

Milieu et attaque

À première vue, on n’est pas loin du match nul dans cette portion du terrain. Portland a un récupérateur hors norme en Diego Chara, un joueur capable de neutraliser les éléments les plus créatifs chez ses opposants - il est classé 4e de la ligue pour le nombre de tacles par match, juste derrière Alvas Powell. En contre-partie, Columbus mise sur un distributeur émérite en Wil Trapp, un joueur qui ramasse peut-être moins de ballons, mais qui n’est pas du genre à les égarer. Si la différence dans le taux d’efficacité n’est pas grande entre les deux (87,7 % à 86,7 % en faveur de Trapp), le joueur de Columbus décoche en moyenne 65 passes par matchs contre 50 pour Chara. Et c’est pour cette raison que Trapp peut être plus influent. Bref, si le ballon circule, Columbus aura l’avantage.

Une finale, ce n’est pas qu’une série de duels, mais on ne peut nier qu’on n’aura un oeil ouvert sur la bataille entre les Argentins Federico Higuain (Columbus) et Diego Valeri (Portland). Le premier est plus artiste, le second plus puissant. Pour marquer, Higuain aime le lobe, Valeri les frappes de loin. Et tous les deux aiment se mettre au service d’un attaquant fort physiquement. Prenez une pièce d’un peso et tirez à cara o cruz, vous aurez votre gagnant.

Pour le reste, Portland a Darlington Nagbe, un joueur capable de brio individuel mais auquel on peut encore reprocher un certain manque de productivité. Néanmoins, Nagbe fait maintenant partie du portrait de l’équipe nationale américaine. Dans un bon jour, il peut faire basculer le match à lui seul.

On l’a déjà dit, de son côté, Columbus compte sur les ailiers Ethan Finlay et Justin Meram, sans oublier le remplaçant de luxe Cédrick Mabwati. C’est peut-être du trois pour un, mais là encore, je place les deux clubs sur un pied d’égalité.

C’est donc en attaque que ça va se régler. Et là, entre Kei Kamara et Fanendo Adi, même si la taille et le style de jeu sont du même ordre, c’est Kamara qui fait la différence. Avec ses 22 buts cette année, sans oublier les trois qu’il a marqués en séries, le Sierra-Léonais s’impose contre les 16 réalisations d’Adi (et deux buts en séries). Si Sebastian Giovinco l’a coiffé pour les titres de soulier d’or et de joueur le plus utile de l’année, Kei Kamara s’imagine peut-être déjà qu’il couronnera sa saison de rêve avec le titre le plus convoité, celui de la MLS Cup. Mettez donc le dernier crochet dans la colonne du Crew. ✔️

Ça se passe dimanche 16 h. Mais parfois, la vie, vous savez...