Daniel Nestor vit une chose inhabituelle cette semaine.

 

Pour la première fois en 30 ans, il ne joue pas à la Coupe Rogers. À compter de sa première participation à l’âge de 16 ans, en 1989, le Torontois n’avait plus manqué une seule occasion d’évoluer devant les siens.

 

« Nous avions plusieurs bons joueurs canadiens à l’époque dans le top-100, dont Martin Laurendeau », se remémore l’ex-spécialiste du double qui s’est aussi adonné en simple jusqu’en 2006. « Quand j’avais 16 ans, j’avais reçu une invitation et je cherchais à obtenir des conseils pour mieux gérer la pression de jouer un gros tournoi comme ça. J’étais juste un ado à l’époque.

 

« Cette fois, c’est un sentiment très différent. C’est bien d’être de retour et de voir des visages familiers. J’aimerais bien jouer, mais je ne suis plus assez bon, je ne serais même pas capable de gagner un seul match », rigole l’homme de 46 ans. « J’ai tellement de bons souvenirs à Montréal, c’est un évènement incroyable. Je viens de Toronto et c’était évidemment spécial de jouer là-bas, mais tout le monde sait que le tournoi est mieux à Montréal. Je ne dis pas ça parce que je suis à Montréal, la majorité des joueurs diraient la même chose. »

 

Déjà membre du Temple de la renommée du tennis canadien, Nestor a connu ses meilleurs moments aux côtés de Mark Knowles, des Bahamas, puis de Nenad Zimonjic, de la Serbie, d’où il tire ses origines. Cette fois, Nestor est de retour en ville car il doit être intronisé au Panthéon de la Coupe Rogers jeudi soir. Un honneur bien mérité avec un palmarès comme le sien en double masculin : 91 titres sur le circuit de l’ATP dont 8 en Grand Chelem, no 1 pendant 108 semaines, champion olympique en 2000 à Sydney avec Sébastien Lareau… la liste est longue, et c’est sans oublier son succès en mixte.

 

« Je me sens très honoré. On a eu une petite célébration l’an passé à Toronto, mais c’est bien de venir à Montréal et d’être reconnu pour toutes les années que j’ai joué ici. C’est bon d’être de retour », indique celui qui avait fait l’objet d’un roast de la part de quelques joueurs l’an dernier dans la Ville Reine, dont Novak Djokovic, John Isner et ses compatriotes Vasek Pospisil et Milos Raonic.

 

Raonic a d’ailleurs rendu un petit hommage à Nestor cette semaine en vue de son intronisation.

 

« Je pense qu’il y eu une longue période durant laquelle Daniel Nestor a porté le poids des attentes du tennis canadien sur ses épaules. Il est l’un des plus grands joueurs de double, sinon le plus grand. Il a gagné avec plusieurs partenaires différents. On pourrait arguer que les frères Bob et Mike Bryan sont de meilleurs joueurs de double que lui, mais c’est tout. Il a gagné sur toutes les surfaces et a remporté une médaille d’or également. Je le connais très bien car nous venons tous les deux de Toronto. Je n’ai jamais eu à l’affronter en simple, donc notre relation a toujours été légère et positive. »

 

Malgré sa présence assidue au tournoi montréalais, Nestor n’y a étrangement jamais gagné.

 

« J’ai l’impression que j’ai toujours assez bien joué ici, mais je n’ai jamais remporté les grands honneurs. En 2015, j’ai fait la finale avec Édouard Roger-Vasselin mais on a perdu contre les frères Bryan, ça avait été très serré. C’était une journée très chaude, ce que j’ai trouvé difficile, mais on a vécu une belle semaine. »

 

Avant ce duel, Nestor avait déjà joué pas moins de 56 fois contre les jumeaux et la confrontation était égale à 28 victoires partout, mais en finale, ces derniers l’ont emporté 7-6 (5), 3-6, 10-6.

 

La vie après le tennis

 

L’après-carrière peut souvent être difficile à vivre pour un athlète. Dans le cas de Nestor, il profite aujourd’hui de la retraite avec davantage de sérénité qu’il l’anticipait au départ, surtout qu’il a encore plein de projets.

 

« J’apprécie beaucoup la vie après le tennis », dit le père de deux enfants. « Je n’étais pas sûr de la façon que ça allait se passer. Je n’ai jamais vraiment aimé voyager tant que ça même si je l’ai fait pendant tellement longtemps. Malgré cela, j’ai tout donné pour en tirer le maximum. Maintenant que je suis à la retraite, j’apprécie la stabilité que j’ai à Toronto et la vie de famille.

 

« Je passe encore beaucoup de temps sur les terrains. J’offre mon aide à des joueurs de tous les niveaux au Canada. Je trouve que le sport grandit vraiment et j’ai hâte de voir ce que l’avenir réserve. » 

 

À ce sujet, Nestor est un modèle parfait pour inculquer de bonnes valeurs à la relève, et surtout un modèle de longévité.

 

« Avoir du plaisir est la chose la plus importante quand on est aussi jeune. Vous n’allez pas progresser ou être à votre meilleur si vous n’avez pas de plaisir ou si on vous met de la pression. C’est important d’être dans un bon environnement et d’être bien entouré, c’est plus sain. Plusieurs des meilleurs joueurs junior vont chercher un entraîneur personnel et se concentrent sur eux-mêmes, mais je pense qu’on peut vraiment apprendre et forger son caractère quand on joue au sein d’un groupe dans un environnement compétitif où le respect est de mise. Ce que j’aurais aimé apprendre plus jeune, mais que j’ai appris en cours de carrière, c’est qu’il est important d’essayer de s’améliorer chaque jour, que ce soit dans une séance de 45 minutes ou de 3 heures, il faut maximiser son temps chaque fois. Il faut toujours essayer d’être meilleur que le jour précédent. »