Linda Marquis : Rouge et Or un jour, Rouge et Or toujours
Universitaires vendredi, 6 mars 2015. 02:10 jeudi, 12 déc. 2024. 09:05QUÉBEC - Pendant 30 ans, Linda Marquis a pensé bien plus à l’avenir de ses joueuses plutôt qu’au sien.
En octobre dernier, l’entraîneure-chef de l’équipe de basketball féminin du Rouge et Or a fait un choix déchirant : celui d’abandonner son poste, qu’elle occupait depuis 1985, à la fin de la saison.
Si elle a pris cette décision, ce n’était pas pour prendre sa retraite ou quitter l’université où elle a obtenu son baccalauréat. Loin de là. C’était pour accepter le poste de coordonnatrice aux opérations des activités d'excellence au sein du Service des activités sportives (SAS) de l'Université Laval, un emploi qui la gardera près des étudiants-athlètes.
« Quand j’ai commencé l’année, je me voyais encore coacher pendant au moins cinq autres années. Et là, l’opportunité s’est présentée avec cet emploi. J’ai dû changer d’idée 30 fois. Surtout qu’on avait une super belle année de recrutement. Le temps d’appliquer est venu et je me suis dit "ils décideront pour moi" », a expliqué madame Marquis dans un entretien au PEPS avec le RDS.ca en début de semaine.
Les dirigeants du SAS ont finalement retenu la candidature de l’entraîneuse de longue date et elle occupe les deux postes jusqu’à la conclusion de la présente saison.
« Je leur ai demandé quelques jours de réflexion. Pas que je me sentais plus fatiguée, mais en faisant la réflexion, c’est là que j’ai réalisé tout le temps que j’ai mis en 30 ans. J’avais l’opportunité, je ne dirais pas d’avoir une "une vie normale", mais presque. C’est aussi le genre d’emploi qui allait bien avec ma philosophie », a ajouté celle qui prône l’éducation avant le sport.
Linda Marquis aura toutefois la chance de faire ses adieux dans son patelin. L’Université Laval accueillera le Championnat canadien du 12 au 15 mars dans le nouvel amphithéâtre sportif du PEPS et le Rouge et Or y participera en tant qu’équipe hôte.
Si elle a eu du temps pour réfléchir avant d’accepter son nouvel emploi, la situation fut un peu différente lorsqu’elle a pris les rênes du Rouge et Or à l’âge de 25 ans en 1985.
Après avoir été adjointe avec les Martlets de McGill, Linda Marquis était de retour à Québec pour un match avec des anciennes de Laval. Tout bonnement, elle a approché l’entraîneur de l’époque qui était aussi le directeur des sports. Le lendemain, elle mangeait au restaurant avec ce dernier et elle était la nouvelle pilote du Rouge et Or.
« Ç’a quand même été spécial de devenir entraîneuse-chef alors que je ne l’avais jamais été. [...] Je n’ai aucune idée de ce qui m’a passé par la tête. C’est sûr que j’étais passionné par ce sport. Trente ans plus tard, j’ai encore la passion. C’est assez étonnant d’un côté, et non de l’autre, parce que j’ai toujours travaillé avec des personnes et non des numéros. Travailler avec des personnes, ce n’est jamais routinier ou banal », a estimé celle qui a vu son équipe être éliminée des séries du RSEQ jeudi soir lors d’une défaite de 70-57 face à McGill.
À travers les années, Linda Marquis a pu transmettre sa philosophie à ses joueuses. Si la passion du basketball l’habite depuis qu’elle a commencé à pratiquer ce sport, elle voulait surtout préparer ses joueuses à la « vraie vie ».
« Je crois qu’à travers le sport, on peut développer des valeurs et des habitudes. Le sport collectif, pour moi, c’est une école de vie. [...] Il y a un parallèle qui peut se faire dans différentes situations. Et la beauté du sport universitaire, et il faut le vivre pour réaliser c’est quoi, c’est qu’on vit des émotions. Des bonnes et des moins bonnes, mais on vit des émotions », a-t-elle relaté avec les yeux qui montrent qu’il y en a eu plus de bonnes que de moins bonnes.
Celle qui a porté l’uniforme du Rouge et Or de 1977 à 1980 pourra continuer d’étendre sa mentalité à tous les étudiants-athlètes de l'Université Laval dans ses nouvelles fonctions.
Son poste au sein des activités d’excellence du SAS consiste à notamment s’assurer de la conformité des étudiants-athlètes du Rouge et Or aux règles d’admissibilité de l’université et du sport universitaire canadien et québécois.
Elle gardera également un contact de proximité avec les étudiants-athlètes en s’occupant du suivi pédagogique.
« Je trouvais ça gagnant-gagnant de rester au PEPS et d’avoir le contact avec les étudiants-athlètes. Mais c’est sûr que je vais perdre beaucoup du coaching, mais je vais gagner d’autres choses et du temps pour moi que je n’avais pas beaucoup en coachant », a admis la récipiendaire de la médaille du Jubilé de la Reine en 2002.
La famille Rouge et Or
Linda Marquis a dirigé des centaines de joueuses durant sa carrière de 30 ans. Plusieurs d’entre elles ont été marquées par leur entraîneuse comme elles l’ont témoigné lors de la soirée hommage qui a eu lieu avant le dernier match de saison régulière au PEPS.
Néanmoins, les circonstances ont fait que Linda Marquis n’a pas eu d’enfant. Avec le recul, elle ne regrette aucunement cette situation.
« Ma famille, c’est tous les étudiants-athlètes que j’ai entraînés. Sur le plan émotif, j’ai vécu tellement d’émotions. Elles sont différentes, oui. Mais je ne me sens pas vide d’émotions. Au contraire, j’ai été choyée de ce côté », a-t-elle exprimé.
Malheureusement, Linda Marquis n’a jamais mené l’Université Laval aux grands honneurs canadiens. Ses 531 victoires en carrière, ses sept titres d’entraîneuse de l’année au Québec et le fait que le Rouge et Or n’ait raté les séries éliminatoires qu’à une seule reprise sous sa gouverne viennent compenser ce manque.
Le Rouge et Or sera parmi les négligés lorsqu’il recevra la crème de la crème au PEPS la semaine prochaine. Mais les joueuses de Linda Marquis auront une dernière chance de lui décrocher un titre canadien.
« Je leur ai dit après la dernière défaite de saison régulière que j’espère qu’elles embarquaient avec moi pour vivre les deux prochaines semaines à plein régime et qu’on allait avoir du fun. C’est comme ça que je le voyais, de terminer sur une note positive. Et la note positive ne veut pas nécessairement dire une victoire, mais de tout donner, de faire du mieux qu’on peut et de ne pas avoir de regret », a indiqué celle qui se souvient d’une année où ses ouailles étaient classées huitièmes et qu’elles avaient vaincu les favorites.
Étant donné que Linda Marquis a encore le feu sacré pour le basketball, la question méritait d’être posée. La reverra-t-on derrière un banc un jour?
« C’est drôle parce que des amis m’ont demandé si j’allais faire une Dominique Michel de moi-même. Je n’ai pas pensé au niveau universitaire parce que je ne pense pas que ça arrivera, mais je veux au moins prendre une année de transition. Par la suite, j’aimerais ça faire un peu de mentorat auprès des jeunes entraîneurs », a répondu celle qui aura beaucoup plus de temps pour elle-même dans deux semaines.
Linda Marquis profitera de ses moments libres pour faire plus de sport. Elle dit aussi adorer le cinéma, la lecture et la musique.
« J’imagine que je vais pouvoir enfin me gâter comme je le veux. »
Et après 30 ans à la barre du Rouge et Or, elle mérite enfin d’être sa priorité!