Vivre la frénésie des playoffs à plus de 6000km de Toronto

 Le mural de Kawhi dans les rues de Toronto, à l'approche de la finale NBA.Source: Javid Jah LuvSumone, Instagram: @streetsoftoronto
Légende: Le mural de Kawhi dans les rues de Toronto, à l'approche de la finale NBA.

 J’écris ce billet pour partager mon excitation à l’orée de la finale des playoffs de NBA qui opposera (naturellement) les Warriors de Golden State aux Raptors de Toronto (je dois presque me pincer pour y croire, surtout après le trade envoyant le pilier de la franchise, DeRozan au Texas l’été dernier).

 La ville de Toronto et le basket canadien ont de quoi être fiers. C’est la première participation des Raps en finale depuis leur entrée dans la ligue en 1995. Je suis moi-même fier de supporter cette équipe en NBA. Mais, vous allez me dire, qu’est-ce que ce mordu de hockey sur glace, qui plus est originaire de la campagne suisse, vient faire dans les débats concernant le basket nord-américain ?

 Et ben, je vais vous répondre que c’est surtout après un séjour de trois mois à Toronto, lors de la fin d’année 2015, qui m’a fait crocher pour les Raptors. Je n’ai jamais pu apprécier les Leafs, étant un fan (ou partisan comme on dit chez vous ; ce que je trouve bien plus plaisant à l’oreille en passant) des Canadiens de Montréal depuis mon plus jeune âge. Ironie du sort, j’ai deux maillots de LNH dans ma garde-robe : un chandail blanc ... des Leafs ! (oh, sacrilège !), que j’ai reçu pour mon anniversaire et que j’arborais fièrement lors de parties de hockey avec les voisins dans ma rue, en Suisse romande, et un maillot des Canadiens de Montréal, floqué du n°30 de David Aebischer, ancien portier fribourgeois (mon coin d’origine) du CH, qu’un ami m’a cédé un peu plus tard. Je suis avant tout un inconditionnel de mon équipe locale, le HC Fribourg-Gottéron (club que rejoindra d’ailleurs un certain David Desharnais à compter de la saison 2019-2020, lui qui était déjà passé par Fribourg lors du lockout de 2012-2013). En LNH, Montréal passe avant les autres équipes, mais je dois dire que je suis avant tout un amateur du beau jeu et des belles histoires (comme la remontée historique des Blues conclue de leur premier titre ? l’avenir nous le dira).

 

Bref, la parenthèse sur le hockey est fermée. J’ai passé trois mois à T.O. pour parfaire mon anglais et j’ai adoré l’expérience. En plus d’enrichir mes connaissances dans la langue de Shakespeare, j’ai aussi pleinement embrassé l’expérience du sport nord-américain. Vous vous en souvenez certainement, octobre 2015 rimait avec le parcours incroyable des Blue Jays en baseball. J’ai vécu le fameux lancer de batte de Bautista devant mon écran de télévision, dans mon quartier périphérique de Thornhill. Je me rappelle encore d’un épisode qui serait tout simplement impensable dans mon pays d’origine, où nous sommes de coutume plutôt réservés. Le chauffeur de tram (« streetcar » pour utiliser le jargon local) lançait un « Let’s go Blue Jays » à chaque fois que nous passions à côté du Rogers Centre. L’ensemble des passagers, moi y compris, se mettait alors à pousser ce cri de ralliement des partisans des Jays. Quels beaux souvenirs !

 

Bon, baseball, hockey (j’avais d’ailleurs assisté au coup d’envoi de la saison entre les Leafs et les Habs, victoire de ces derniers 3-1 au mois d’octobre), quand vais-je en venir au basket ? Et bien maintenant, et merci lecteur/lectrice de m’avoir lu jusque là ! Fin 2015, j’ai pu profité de l’expérience torontoise pour vivre mon premier match de NBA. L’affiche était alléchante : les Cavaliers et LeBron (futurs champions) rendaient visite à Toronto ce soir-là. J’ai même pu vivre une victoire des Raptors alors que l’Argentin Luis Scola avait lancé son équipe dans le match de fort belle manière. Les Raptors sont donc restés dans mon viseur depuis lors, mais je pense que j’avais déjà mon lot de sympathie pour l’unique franchise canadienne de basket depuis un certain temps.

 

Bref, en cette année 2019, les Raptors sont déjà champions pour moi ! Kawhi Leonard, Pascal Siakam, Kyle Lowry, Fred VanVleet, Serge Ibaka et leurs coéquipiers ont le mérite d’avoir déjoué tous les pronostics. J’ai longtemps pensé que les Raptors n’étaient pas une équipe de séries, un peu comme les Sharks en hockey. Et ben, c’était sans compter le génie de Leonard qui nous en met plein la vue ces derniers temps. J’aimais beaucoup DeMar DeRozan, mais je dois dire que le pari audacieux d’engager Leonard s’est finalement révélé payant, du moins pour cette saison 2018-2019.

 

Je peux vous dire que j’ai vibré comme un gamin devant mon ordinateur le lendemain du match 7 contre les Sixers, en regardant les highlights et le déjà historique « Shot » au buzzer de Kawhi. Je me suis imaginé à Toronto et en voyant les images de la foule rassemblée derrière son équipe dans les rues de la ville, cela m’a donné les frissons. Vraiment, il n’y a que le sport pour nous faire vivre de tels bonds intenses d’émotion. Oui, les concerts et la musique nous rassemblent et on vit des moments incroyables aussi, c’est sûr. Mais là, lorsque tout un stade retient son souffle et quatre rebonds sur le cercle plus tard, ton équipe se qualifie pour le tour suivant, c’est juste magique ! Regardez le sourire « jaune » d’Embiid qui voit le ballon envoyé par Leonard, lui-même assis et contemplant la balle rentrer, sur les photos. C’est incroyable de vivre ça ! Bien sûr, c’est très dur pour les perdants, mais c’est aussi grâce à eux que l’on a pu vivre une telle série. C’est aussi grâce aux Bucks et Giannis que Toronto est là où il est. Ce formidable esprit d’équipe et cette rage de vaincre de l’outsider me font penser au FC Liverpool de Jürgen Klopp qui nous a livré un comeback sensationnel contre Barcelone en football (et oui c’est comme ça qu’on dit en Europe). Le sport nous gâte vraiment en ce début d’année 2019.

 

Vous l’aurez compris, la fièvre des séries est de mise, à Fribourg, en Suisse, à plus de 6000km de Toronto.  Ainsi, j’envoie un gros « Let’s go Raptors », en espérant que celui-ci traverse l’Atlantique sans encombres. Peu importe le résultat de la finale contre Golden State, l’équipe en or restera celle des Raptors pour moi.