23 juin 2022. Brooklyn. Premier tour du repêchage annuel de la NBA. Tout sera en place pour rédiger un nouveau chapitre de l’histoire du basketball québécois. RDS-Info y sera dès 20h et RDS2 se joindra peu de temps après. On vous parle depuis maintenant plus de deux ans de ce jeune prodige. En fait, il était même venu nous annoncer en primeur son choix universitaire dans nos studios en janvier 2020. Et bien l’heure de sa consécration est enfin/déjà venue.

Non seulement Bennedict Mathurin deviendra un lottery pick, choisi dans le top 14, mais il sera assurément le joueur né au Québec sélectionné le plus tôt dans l’histoire de la NBA. Toutes les prévisions indiquent qu’il ne sortira pas plus tard que le 8e rang. Il pourrait même être appelé aussi tôt que la 5e sélection. 

Pour tout jeune espoir du ballon rond, il s’agirait d’un exploit prodigieux en soi. Mais pour un jeune homme issu de Montréal-Nord, ayant surmonté des épreuves personnelles hors du commun, cet accomplissement relève presque du miracle. 

On me pose souvent la question : pourquoi n’y a-t-il pas plus de québécois que ça dans la NBA ? J’essaie souvent de résumer mon explication avec le plus de simplicité possible (et un brin de mathématiques à l’appui). Lors d’une saison typique, combien d’athlètes font partie active d’une équipe de la NFL ? Environ 1700. Du côté du baseball majeur? Environ 830. La LNH ? Autour de 660. Et finalement la NBA ? 450. Un maigre 450 joueurs sur la planète entière trouvent leur place dans la ligue d’envergure mondiale par excellence. Quand on constate qu’il s’agit d’un sport pratiqué et préconisé sur tous les continents, le pourcentage d’élus par rapport aux aspirants est improbable et quasi impossible à calculer. 

Se tailler une place dans la NBA constitue un réel privilège. 

Les Québécois Chris Boucher, Khem Birch et Luguentz Dort ont réussi à paver la voie du Québec vers le circuit Silver lors des cinq dernières saisons. Ils auront tous emprunté un chemin sinueux pour y arriver, car aucun d’eux n’a été sélectionné lors de son repêchage respectif. Birch aura eu à s’exiler vers l’Europe pour mieux revenir. Quant à Boucher et Dort, ils auront eu recours à la G-League pour bâtir leur portfolio pour mériter le grand rappel. 

Jeudi soir, Bennedict Mathurin entrera par la grande porte. Selon notre équipe de recherche, seuls Stewart Granger (né à Montréal, 24e choix en 1983) et Bill Wennington (né à Montréal, 16e choix en 1985) sont nés dans la Belle Province avant d’entendre leur nom être appelé en première ronde. Granger aura joué 80 matchs en trois saisons. Wennington, quant à lui, en aura accumulé 720 répandus sur 13 illustres saisons. Et bien qu’il ait pu profiter du brio de Michael Jordan pour obtenir des bagues de champion en 1996-97-98, on parle surtout d’un bon joueur de soutien avec une moyenne de moins de 5 points par match en carrière. 

Trente-sept ans plus tard, le contexte est tout autre pour Bennedict. L’équipe qui le sélectionnera jeudi voudra le transformer en joueur d’impact rapidement. Peut-être même en joueur de concession. La pression sera forte et c’est très normal. On parle ici d’un surdoué capable de tout faire sur un terrain de basket. Ses capacités athlétiques ne sont plus à prouver, surtout depuis cette séquence devenue virale lors du dernier tournoi March Madness :

Au premier regard, ce moment magique au 2e tour face à TCU nous procure des frissons de par sa puissance et son explosion. Mais en s’y penchant davantage, je dénote surtout un jeune homme ultra-compétitif qui n’a peur de rien et ne ralentira devant personne. Il avait marqué 30 points, dont quelques paniers cruciaux en fin de rencontre, lors de ce duel serré qui s’était soldé en prolongation en faveur d’Arizona.

Son désir de vaincre saute aux yeux et c’est un des éléments qui est également ressorti du processus d’entrevues avec tous les clubs qui choisiront tôt jeudi soir. Plusieurs disent avoir été très impressionnés par le jeune homme d’à peine 20 ans. Présenter les attributs physiques requis, c’est essentiel pour se faire remarquer initialement. Ce n’est toutefois pas suffisant pour se tailler une place à long terme dans la NBA. Il faut savoir travailler plus fort que son adversaire tout en s’imposant dans les moments corsés ou difficiles. Tout indique que le jeune Québécois regroupe tous les ingrédients recherchés. 

N’oublions pas qu’il est doté d’une étonnante confiance en lui-même. À l’âge de 15 ans, il quittait le Québec vers le Mexique pour devenir le premier québécois à rejoindre les rangs de l’Académie officielle de la NBA (la branche de l’Amérique Latine). Audacieux, mais ultimement payant.

Puis en avril 2021, suivant sa première saison en Arizona, l’attrait de la NBA était déjà fort. Mais les experts ne s’entendaient pas sur son rang de sélection potentiel. On le voyait quelque part entre le 20e et le 40e rang. On voyait le voir polir davantage son jeu avant d’investir en lui. Son clan en a longuement discuté avant de décider sur son retour à l’école pour une deuxième saison. 

Bennedict Mathurin a essentiellement parié sur lui-même. Un an plus tard, sans équivoque, on peut affirmer qu’il aura remporté ce pari. Avec brio et panache. 
Il voit grand pour sa carrière et semble avoir très hâte de représenter le Québec sur la scène la plus lumineuse qui soit.

Bennedict Mathurin excité à l'idée d'être repêché

Sur le plan visibilité, le voir aboutir avec les Knicks de New York serait le nirvana. Sur le plan pur basket, la Nouvelle-Orléans serait très alléchante avec son noyau émergent dans un environnement où on pourrait lui donner le temps de se développer. Le scénario catastrophe? Sacramento. Là où le talent se rend pour y mourir à petits feux.

Si vous me demandez de mettre un petit 2 $, je prédis qu’il atterrira à Detroit au cinquième rang ou bien en Indiana au sixième échelon. Chez les Pistons, une association avec l’émergent Cade Cunningham aurait un fort potentiel. Tout comme un duo avec Tyrese Haliburton chez les Pacers. La pression serait considérable, mais il aurait un acolyte de premier plan avec qui la partager dans les deux cas. 

Peu importe le point de départ de son prochain chapitre, il s’agira d’un privilège de se trouver aux premières loges pour le début d’une grande aventure comme le Québec en n'a jamais vu auparavant.