Ça sent la rentrée d’automne pour les organisations de boxe du Québec, au même moment où s’effectue la rentrée scolaire. Pour rafraîchir nos notions de français et de boxe après les vacances d’été, il est justement bon de constater que la boxe québécoise s’accorde parfaitement avec différents temps de verbe :

Le « passé » correspond aux Jack Delaney, Arturo Gatti, Eric Lucas et autres boxeurs qui ont permis à la boxe québécoise de briller.

Le « présent » correspond aux Adonis Stevenson, David Lemieux, Artur Beterbiev, Eleider Alvarez et ces boxeurs établis aux sommets.

Le « conditionnel » est représenté par les Ghislain Maduma, Custio Clayton, Mikael Zewski et plusieurs boxeurs dont la carrière est bien lancée et qui ont bon espoir d’atteindre un jour, un combat de championnat.

Il y a « l’imparfait » : Lucian Bute (s’cusez là)!

Et il y a le « futur », composé de ces jeunes qui n’ont pas encore 25 ans et qui déjà se promènent avec une ceinture à la taille.

Les B.B. champions

Steven Butler et Eric Bazinyan ont tous deux 21 ans. Les deux sont champions du monde… junior! On peut tourner en dérision le nombre de « titres mondiaux » que les différentes associations distribuent, en retour de frais de sanctions importants, n’empêche que les B.B. (Butler et Bazinyan) présentent des fiches exceptionnelles, et surtout des aptitudes remarquables.

Des deux boxeurs, Butler (17-0-1) est sans doute le plus connu. Vendu par son gérant Camille Estephan comme « le Sidney Crosby de la boxe », Butler est déjà classé 10e par l’IBF dans la catégorie des super-mi-moyens en vertu de son titre de champion mondial junior de l’IBF. Le 22 octobre, il affrontera Janks Trotter, cette fois pour le titre nord-américain de l’IBF.

L’attitude du protégé de Raynald Boivert est impressionnante. On le sent très mature pour son jeune âge, lui qui deviendra père quelques jours avant son prochain combat. « Je pense qu’il a tous les atouts et le talent pour devenir l’une des plus grandes vedettes à jamais, mais il a seulement 21 ans et il faut qu’il prenne le temps. Mais je pense que le potentiel, pour lui, est vraiment élevé », réitérait Camille Estephan mardi.

Quant à Erik Bazinyan, il a livré samedi dernier une prestation qualifiée de « l’une des plus extraordinaires que j’ai vues de ma vie en personne » par l’analyste de boxe Sébastien Gauthier. Dans un combat qui vous sera présenté en octobre sur les ondes de RDS2, Bazinyan a dominé le jeune guerrier allemand Aro Swartz pendant 10 rounds, à l’aide d’un puissant jab utilisé à répétition, d’une variété importante et impressionnante de crochets décochés en alternance en position droitière et en position gauchère. Il s’agissait pour Bazinyan de sa 14e victoire en boxe professionnelle,  lui qui a livré une centaine de combats amateurs. Cette victoire lui a donné le titre mondial jeunesse WBO des super-moyens.

Bazinyan est un beau jeune homme plein de confiance, un protégé de Howard Grant, qui boxe sous l’égide des Promotions Rixa. Son équipe tient à le garder « terre-à-terre ». C’est pourquoi au cours des dernières semaines, le boxeur des super-moyens a été livré en pâture à Artur Beterbiev pour un combat d’entraînement.

Il est raisonnable de penser qu’un jour, tant Butler que Bazinyan seront les têtes d’affiche de la boxe au Québec. Les deux jeunes sont électrisants et s’expriment bien tant en français qu’en anglais. De quoi faire mentir les pessimistes qui croient que les beaux jours de la boxe au Québec appartiennent au passé.

Retour en Arménie

Bazinyan est né en Arménie. Samedi dernier à la Tohu, l’endroit était bondé de compatriotes, et de nombreux drapeaux arméniens flottaient dans la salle circulaire. À l’issue de sa victoire, le jeune boxeur était plutôt émotif. En obtenant le titre mondial junior WBO, un bel accomplissement en soi, il obtenait du même coup la permission de retourner dans son pays.

C’est qu’en quittant son pays natal à l’âge de 16 ans, Bazinyan n’a pas respecté son obligation de service militaire en Arménie. La volonté de retourner visiter son pays natal est toutefois demeurée présente. La veille du combat, il m’a expliqué qu’il avait pu trouver un terrain d’entente avec les autorités arméniennes pour une permission de visite. Erik Bazinyan pourrait donc revenir chez lui à condition qu’il obtienne le titre mondial! Rencontré mardi, au lancement de la saison du Groupe Yvon Michel, il attendait impatiemment la confirmation de son droit de séjour en Arménie.

Protéger le futur

Il est beau d’avoir du talent, et de le développer, mais il faut que le tout soit bien fait.

« Le plus important pour amener un jeune boxeur vers les plus hauts sommets, c’est l’encadrement », explique Yvon Michel. « Butler et Bazinyan sont très bons. Ils ont le talent et la détermination. Mais l’encadrement et les contacts requis vont leur permettre de se développer jusqu’au niveau maximal. »

Il faut aussi protéger les boxeurs contre eux-mêmes et c’est la mission que s’est donnée Alexandre Choko.

« En réalisant mes entrevues avec les grands champions pour le livre The Future of Boxing, je me suis rendu compte que le plus grand fléau de la boxe, c’est le dopage. Il faut aborder le problème directement avec les jeunes et les sensibiliser, ce que je compte faire en allant livrer mon message dans les écoles. »

« Le pire, c’est que le dopage dans les sports de combat, c’est criminel », ajoute M. Choko. « Quand Lance Armstrong se dope, c’est de la triche, ça le regarde. Mais quand quelqu’un se dope en connaissance de cause, pour avoir plus d’endurance pour taper un adversaire sur la tête et éventuellement l’envoyer à la morgue, c’est criminel. »

C’est pour pouvoir passer son message qu’Alexandre Choko a franchi les étapes, sans se doper, pour pouvoir grimper dans le ring et livrer un premier combat professionnel à l’âge de 42 ans! Ce combat aura lieu contre un adversaire à déterminer le 22 octobre au Casino de Montréal. Custio Clayton, Marie-Ève Dicaire, Dario Bredicean, Vislan Dalkhaev et Patrice Volny seront en action pour ce gala du Groupe Yvon Michel.

Deux jours plus tard, les jeunes David Lemieux, Steven Butler, Simon Kean, Yves Ulysse, Mian Hussain, Ghislain Maduma, Batyr Jukembayev, David Théroux et Mathieu Germain seront en action au Centre Bell pour le gala de Eye Of The Tiger.