Vous ne voudrez certainement pas rater l’occasion de voir le Picasso de la boxe à l’œuvre samedi soir, à compter de 22 h sur les ondes de RDS, en direct du théâtre du Madison Square Garden, à New York.

J’ai bien dit le Picasso de la boxe. C’est ainsi qu’a titré l’influent journal Los Angeles Times en parlant de Vasyl Lomachenko.

Si vous ne connaissez pas Lomachenko, laissez-moi vous dire que c’est un Ukrainien de naissance, qui vit maintenant à Oxnard, en Californie. Samedi soir, il s’attaquera à Roman Martinez et tentera de lui ravir sa couronne WBO des super-plumes.

Jusque-là, il n’y a rien d’incroyable, sauf que Lomachenko est déjà champion WBO des poids plumes, même s’il n’a livré que six combats au cours de sa carrière professionnelle.

Lomachenko a épaté le monde entier par sa carrière amateur. Il y a été dominant, se payant le luxe de remporter deux médailles d’or lors des Jeux olympiques de 2008 et 2012. À son palmarès, on retrouve aussi des championnats amateurs et le trophée Val-Barker, remis au meilleur boxeur de la compétition qui lui a été décerné à l’issue des Jeux olympiques de 2008.

Sa graduation

Il a gradué chez les professionnels le 12 octobre 2013, et dès sa première sortie, il s’est adjugé le titre WBO international des plumes.

Le combat suivant, son deuxième en carrière, il affrontait Orlando Salido dans un match pour le titre mondial. Malheureusement, il a dû encaisser la défaite par décision partagée contre un vétéran pugiliste de 55 combats en carrière.

S’il avait gagné, il établissait une nouvelle marque dans le monde de la boxe. Jamais auparavant un boxeur amateur était parvenu à gagner un championnat mondial à son deuxième match payant.

Lors de son troisième combat chez les pros, Lomachenko a réalisé le rêve de sa vie en se voyant couronné monarque mondial en battant Gary Russell pour le titre WBO des poids plumes.

Lomachenko établissait ainsi une marque mondiale en se voyant couronné champion du monde, mais il devait partager cet honneur avec un certain Thaïlandais du nom de Saensak Muangsurin, lui aussi titulaire mondial chez les super-légers après seulement trois rencontres.

C’est dire qu’à sa sixième sortie, « Hi-Tech » Lomachenko, comme on le surnomme, en sera à sa deuxième tentative de coiffer une couronne mondiale. Si jamais il réussit, et c’est très possible, il deviendra donc une icône de la boxe professionnelle, tout comme ce fut le cas chez les amateurs.

Pour vous donner une idée de son talent, j’ai comparé sa fiche à d’autres pugilistes, la plupart des champions, mondiaux, pour prouver hors de tout doute qu’il est vraiment le Picasso de la boxe.

Pas de « tataouinage »

Le premier nom qui me vient en tête est celui de Pete Rademacher, le médaillé d’or des Jeux olympiques de 1956 de Melbourne en Australie. En deux temps trois mouvements, dès son entrée dans le monde des pros, Rademacher s’est attaqué à Floyd Patterson, dans un match de championnat des lourds, en août 1957. Résultat : il a perdu par K.-O. au 6e engagement.

Guillermo Rigondeaux a gagné son championnat WBA des super-coqs à sa 9e rencontre.

Sugar Ray Leonard, le darling de Montréal aux Jeux olympiques de 1976, a eu raison de Wilfredo Benitez à son 26e combat  dans le monde des pros. Il s’adjugeait ainsi le titre mondial WBC des mi-moyens.

Wladimir Klitschko, le brillant super-lourd, a remporté la médaille d’or aux Jeux d’Atlanta en 1996. En dépit de son brio, il lui a fallu attendre jusqu’à sa 36e rencontre avant d’être couronné monarque mondial.

George Foreman, le grand gagnant de Mexico en 1968, s’est enfin emparé de la ceinture des lourds à son 38e combat.

Joe Frazier, le monarque de Tokyo en 1964, n’a pu monnayer sa médaille d’or avant son 25e  combat.

Dans son cas, il faut faire une parenthèse. À sa 20e rencontre, il avait été couronné champion de la Commission athlétique de l'État de New York, qui était alors reconnue comme une association mondiale.

Les frères Spinks

Leon Spinks, un autre Américain qui s’est couvert d’or à Montréal aux Jeux de 1976, a gagné son titre mondial à son 8e combat. Sa victime, nul autre que Muhammad Ali.

Son frère, Michael Spinks, lui aussi médaillé d’or à Montréal chez les poids moyens, a été couronné le roi des lourds à sa 17e rencontre.

Même le grand Muhammad Ali, le champion de Rome en 1960, a dû attendre jusqu’à son 20e duel avant de finalement prendre la mesure de Sonny Liston et se couvrir la tête de la couronne mondiale.

J’ai fouillé dans les records de quinze des meilleurs boxeurs au monde pour savoir ce qu’ils avaient réussi dès leur entrée dans le monde professionnel.  Résultat : 15 victoires, aucune défaite.

J’ai scruté les fiches de Roy Jones, Oscar De La Hoya,  Muhammad Ali, Joe Frazier, Evander Holyfield, Sugar Ray Leonard, Wladimir Klitschko, Deontay Wilder, Alexander Povetkin, Leon Spinks, Michael Spinks, Lennox Lewis, George Foreman, Mark Breland et Floyd Peterson.

Ils ont tous été victorieux à leur première sortie chez les pros. Onze d’entre eux ont gagné par K.-O. tandis que les quatre autres devaient se contenter de décisions. Parmi eux on retrouve Ali fort d’une décision en six rounds à sa première sortie payante. Les autres sont Evander Holyfield, Sugar Ray Leonard et Mark Breland.

Selon The Guardian

Selon une compilation effectuée par le journal britannique The Guardian, il s’est décerné pas moins de 893 médailles à différents champions boxeurs au cours des 23 derniers Jeux olympiques, exception faite de 2012, trop tôt pour compiler (223 pugilistes se sont partagé 229 médailles d’or, et 38 de ces amateurs sont devenus des monarques mondiaux chez les pros).

Fait à souligner, seulement cinq médaillés d’or des Jeux entre 1904 à 1952 sont parvenus à se voir couronnés champions du monde chez les pros. Les récipiendaires ont été Frankie Genaro, Fidel LaBarba, Jackie Fields, Pascual  Perez et Floyd Patterson.

C’est en regardant et en évaluant cette liste de grands champions qu’on constate que Lomachenko est pratiquement  surhumain. Ceci ne veut pas dire qu’il va s’assurer les honneurs d’un deuxième titre mondial contre Roman Martinez. Ce dernier n’a perdu que trois combats en carrière et seul Mikey Garcia a été en mesure de lui passer le K.-O. en 2013.

Au tableau d’honneur de Martinez figure le nom d’Orlando Salido qu’il a battu pour lui arracher le titre mondial WBO des super plumes et avec qui il a fait match nul dans le combat suivant.

Lomachenko est loin d’être un Gennady Golovkin ou bien encore un Sergey Kovalev quand vient le temps d’assommer ses rivaux. Son style est très scientifique et reflète exactement l’expérience qu’il a acquise chez les amateurs où il a compilé l’impressionnante fiche de 396 victoires contre un seul revers.

Martinez n’a pas l’intention de laisser son rival se sauver avec la victoire, qui lui permettrait de coller un deuxième titre à son palmarès déjà impressionnant.

La tactique de Martinez

« Il faut continuellement mettre de la pression sur Lomachenko, se plait à raconter Martinez. Et c’est exactement ce que j’ai l’intention de faire. J’ai étudié tous ses gestes en visionnant ses prouesses contre Salido. »

Martinez est lui aussi un boxeur talentueux, et sa fiche est tout de même impressionnante.

« Je sais qu’il me faut l’attaquer, a-t-il poursuivi.  Mais de façon intelligente, car c’est un fin technicien. Ce qu’il faut avant tout, c’est de ne pas lui laisser le temps de penser  à ce qu’il doit faire. »

Imaginez un instant... Lomachenko en est à son septième combat chez les professionnels. Ce serait un  nouveau record si jamais il parvenait à arracher le titre des super-plumes à Martinez, puisqu’il coifferait alors deux couronnes. Tout cela à sa septième sortie chez les pros. Wow!

Vous savez quoi? Je crois sincèrement que Lomachenko va établir cette nouvelle marque samedi soir au Madison Square Garden en remportant les honneurs de la décision sur Roman Gonzalez.

Nous vous attendons samedi soir sur RDS à compter de 22 h. L’action ne devrait pas manquer.

Bonne boxe!