En pleine confiance, tenant la barre au-dessus de sa tête, l’haltérophile Kristel Ngarlem a obtenu la confirmation en juin dernier, qu'elle faisait partie des cinq membres de l'équipe olympique canadienne d'haltérophilie pour les Jeux de Tokyo. L'athlète montréalaise qui aura bientôt l'occasion de réaliser son plus grand rêve a fait face à un défi additionnel au cours de la dernière année, alors qu'elle a reçu un diagnostic de colite-ulcéreuse, une inflammation qui touche surtout l’intestin. Dans son documentaire, Ngarlem explique les ajustements qu'elle a apportés pour composer avec la maladie. Aujourd'hui, Ngarlem nous confirme qu'elle a surmonté ce défi.

 

Enfant unique et élevée par une mère monoparentale, Ngarlem a appris à surmonter des difficultés dès son jeune âge. Lorsque Kristel est âgée de seulement cinq ans, sa mère reçoit un diagnostic de sclérose en plaques. La jeune Kristel apprend à déplacer sa mère en chaise roulante. Il y a des défis à la maison mais également dans son parcours scolaire où Kristel doit composer avec la dyslexie ainsi qu’un TDA (trouble déficitaire de l’attention).

 

Inspirée en voyant une jeune fille de son âge pratiquant l’haltérophilie dans le film « La mystérieuse mademoiselle C », elle attrape la piqûre pour son sport. Même si elle n’est âgée que de dix ans, le Complexe sportif Claude-Robillard à Montréal lui ouvre ses portes afin qu’elle apprenne les rudiments de l’haltérophilie. Élève attentive lors des entraînements, sa mère prend des notes sur chaque exercice et ne rate aucun entraînement de sa fille avec qui elle a développé une relation unique.

 

Un tournoi qui lui permet de réaliser son potentiel

 

Afin de se mesurer à d’autres jeunes haltérophiles, Ngarlem participe au Tournoi provincial des jeunes Louis-Cyr. La néophyte termine toutefois dernière, toute catégorie confondue mais elle se reprendra de belle façon quelques années plus tard en gagnant la compétition. Cette dernière performance lui fait réaliser son potentiel en tant que jeune athlète. Puis à l’âge de seulement 14 ans, elle prend part à ses premiers Championnats du monde junior.

 

Son entraîneur actuel Jean-Patrick Millette résume bien son parcours.

 

« Il y a eu une séquence d’événements auxquels elle a résisté afin d’arriver où elle est aujourd’hui. Que ce soit à l’école, des changements d’entraîneurs ou de qualifications... Kristel est capable de se relever vite quand il arrive quelque chose... »

 

Les entraîneurs jouent un rôle crucial dans le développement des athlètes et Ngarlem montre toute l’appréciation envers Millette qui travaille avec elle depuis février 2019.

 

« C’est quelqu’un qui est attentionné et dévoué. C’est un entraîneur perfectionniste. Il sait où il s’en va et il connaît très bien ses athlètes. J’ai eu plusieurs entraîneurs mais il a une place spéciale parce qu’il m’a pris à un moment qui était plus difficile. »
 

Ces moments difficiles, elle les a vécus en France en 2019 à la suite d’une contre-performance. Le moral et la motivation à plat, Ngarlem a besoin de changement et elle fait alors appel à Millette afin de brasser la soupe. L’impact positif de cette nouvelle recette se fait sentir rapidement à l’été 2019, lors des Championnats du monde en Thaïlande. Ngarlem se présente en pleine confiance, avec l’objectif de soulever les 100 kilos. Malgré certains doutes à son sujet, celle qui est plus à l’aise à l’épaulé-jeté selon les dires de son entraîneur, relève le défi et se classe au neuvième rang dans son groupe avec 100 kg à l’arraché et 130 kg à l’épaulé-jeté.

 

Après la pluie, le beau temps… et la pandémie.

 

Gonflée à bloc à la suite de ses performances, Ngarlem se présente ensuite à la Coupe du monde en janvier 2020 à Rome, en Italie. Elle obtient les meilleurs résultats de sa carrière et monte sur la première marche du podium en plus de récolter deux médailles de bronze. Le vent dans les voiles, elle se sent d’attaque en prévision des prochains Jeux olympiques mais la pandémie de COVID-19 qui frappe le monde entier et qui force le report des Jeux, vient freiner ses élans. Sentant son rêve olympique s’envoler en fumée, Ngarlem est atterrée et se pose des questions au sujet de son avenir.

 

Pour plusieurs athlètes, l’entraînement peut se poursuivre normalement malgré la fermeture des gymnases pendant la pandémie mais pour une athlète en haltérophilie comme Ngarlem qui de surcroit, vit en appartement, rien n’est simple! Bien malgré elle, il est impossible de poursuivre l’entraînement.

 

Après une attente interminable de plusieurs mois, l’institut national du sport situé au Stade Olympique ouvre ses portes aux athlètes qui s’entraînent en vue des JO. Cette aide est précieuse et permet à Ngarlem de rattraper un retard accumulé en raison son inactivité forcée.

 

Quand la maladie frappe

 

La jeune montréalaise réussit à se relever malgré la pandémie, mais un nouveau défi l’attend alors qu’elle commence à ressentir des maux de ventre à l’été 2020. Quelques mois plus tard le diagnostic tombe et les médecins lui annoncent qu’elle souffre d’une colite ulcéreuse. Ngarlem ressent plusieurs symptômes et reste parfois alitée en plus de subir une perte de poids. Dans un sport où le poids doit être surveillé et maintenu en raison de son influence possible sur les résultats lors de compétitions, il n’est pas facile de s’adapter à cette maladie auto-immune et incurable ainsi qu’à sa médication. Malgré la gravité de cette maladie, Ngarlem parvient à reprendre son poids normal et son entraînement.

 

À l’écart de la compétition depuis janvier 2020, la résiliente athlète de 25 ans prend part aux Championnats panaméricains de Saint-Domingue, en République dominicaine, au mois d’avril 2021. Même si elle ne se sent pas encore au sommet de sa forme, elle conclut la compétition avec un total de 212 kg, prenant le huitième rang dans la catégorie des 76 kg.

 

Finalement, la sueur, les nombreuses répétitions et les entraînements ont porté leurs fruits! En juin dernier, Ngarlem a appris qu’elle avait officiellement obtenu son billet pour les Jeux de Tokyo. La route menant à Tokyo a été parsemée d’embuches et Ngarlem très émotive, ne peut retenir ses larmes lorsqu’elle annonce la bonne nouvelle à ses proches en prenant le temps de les remercier.
 

La route a été longue pour Ngarlem qui a montré un exemple parfait de résilience mais celle qui dessine les cinq anneaux olympiques et qui rêve de participer aux Jeux depuis sa tendre enfance, aura enfin l’occasion de réaliser son rêve. On pourra surveiller ses performances prochainement puisque les JO de Tokyo auront lieu du 23 juillet au 8 août.  

 

« L’haltérophilie, ça m’a permis d’être la meilleure version de moi-même.  [...]  Ça m’a permis de développer mon plein potentiel dans une discipline incroyable. Je vais être vraiment contente lorsque je lèverai les barres à Tokyo. »