Par Mario J. Ramos - Il y a quelques années, j’ai assisté à une conférence d’ouverture du MIGS (Montréal International Game Summit) qui était donnée par Brandon Beck, cofondateur de Riot Games, le développeur du très populaire jeu de la scène esports: League of Legends. Le sujet de la conférence? La merveilleuse culture de compagnie chez Riot Games qui met de l’avant la créativité et les personnalités uniques de chaque employé et où l’avancement est vraiment basé sur le mérite.

Il semblerait que parallèlement à cette mission de la compagnie, il s’est développé une “bro culture” chez Riot, où les employées femmes sont victimes de sexisme en se voyant constamment refuser des postes importants pour des raisons triviales: “Trop d’égo.” “Pas assez gamer.” Aussi, plusieurs allégations de harcèlement sexuel ont fait surface. Des incidents précis tels que des envois de photos d’organes génitaux, mais aussi une dénonciation d’une culture où les femmes sont évaluées sexuellement par leurs collègues.

 

Certaines de ces allégations font suite à l’investigation d’une reporter de Kotaku, Cecilia D’Anastasio, qui publie le 8 juillet dernier “Inside the Culture of Sexism at Riot Games”. Un reportage accablant monté sur plusieurs mois et basé sur le témoignage de 28 ex-employés et employés actuels, la plupart anonymes.

 

 

Un des exemples frappants de ce reportage est le cas de Lacy (nom fictif) qui, lors d’une réunion, se voit balayer du revers de la main une idée qu’elle propose. Quelques jours après, elle propose à un de ses collègues de proposer exactement la même idée, aux mêmes personnes, de la même façon. Cette fois-ci, l’idée est accueillie positivement avec des compliments.

 

Un autre exemple est celui d’une employée qui tombe sur une chaîne de courriels interne où des collègues décrivent comment ils aimeraient la “pénétrer.”

 

Ça ne semble être que le bout de l’iceberg.

 

Après des semaines de quasi-silence, Riot Games répond en mode “mea culpa” avec un communiqué intitulé “Our first steps forward”.

 

Voici un extrait librement traduit:

 

“Dans les trois dernières semaines, on s’est concentré à écouter et à apprendre. En tant que compagnie, on est habitué à régler des problèmes ASAP, mais ce problème-ci ne se règlera pas d’un jour à l’autre. On va intégrer ce changement dans l’ADN de notre culture et ne laisser aucune place au sexisme et à la misogynie. L’inclusivité, la diversité, le respect et l’égalité sont non-négociables. (...)”

 

“À tous les Rioters, contracteurs, anciens Rioters et anciens contracteurs: On s’excuse. On s’excuse que Riot n’a pas toujours été ou n’a pas été l’endroit qu’on vous a promis. Et on s’excuse que ça l’a pris autant de temps avant qu’on vous entende. Dans les jours, semaines, mois, années à venir, nous allons faire de Riot un endroit dont nous pouvons tous être fiers.”

 

“Aux joueurs et aux fans, passés et présents: nous vous remercions pour le temps que vous avez passé avec nous. Nous savons que le studio derrière un jeu peut être une part importante de comment vous vous sentez à propos d’un jeu. Nous savons que nous vous avons déçus et nous sommes engagés à réparer cela.”

 

 

Ce dernier point est intéressant et ironique: la communauté de joueurs League of Legends a la réputation d’être extrêmement toxique, surtout envers les joueurs femmes. L’industrie du jeu a fait du chemin, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire et il faudrait que les développeurs prêchent d’abord par l’exemple et avec des actions: dans leur culture, dans leurs jeux (et l’image sexualisée des femmes qu’ils véhiculent) et dans des moyens pour réduire le comportement toxique des joueurs en ligne. Mais surtout être à l’écoute et ne pas, par la suite, remettre la responsabilité sur les victimes de ne pas s’être exprimées plus tôt.

 

Espérons que ce communiqué de Riot Games soit réellement des “premiers pas vers l’avant” et non seulement une simple campagne de relation publique.