MONTRÉAL – Le sport a parfois le don de bien faire les choses. Non seulement le retour de Marc Trestman à Montréal en tant qu’entraîneur-chef dans la LCF était déjà très attendu, mais il s’agira aussi d’un match crucial pour les deux formations.

Certes, Trestman n’en sera pas à son premier passage dans la métropole québécoise depuis qu’il a cédé les commandes des Alouettes pour diriger les Bears de Chicago. Il était revenu dans la peau d’un partisan, mais cette fois, il se présentera au stade Percival-Molson avec la ferme intention de vaincre son ancien club.

Une rude bataille se dessine dans la section Est puisqu’il apparaît fort probable que seulement deux représentants de ce groupe accéderont aux éliminatoires. Les Alouettes et les Argonauts ne peuvent donc pas se faire de quartier dans leurs trois confrontations. Cette série se mettra en branle, vendredi, dès 19h à RDS.

En additionnant ces deux facteurs - le lien de Trestman avec les Alouettes et l’enjeu des affrontements - le rendez-vous à Montréal s’annonce spécial.

À titre d’unique partant en attaque de l’ère Trestman à être toujours en poste, le centre Luc Brodeur-Jourdain constitue un intervenant de choix et il ne cache pas ses émotions.

« Ce ne sont sûrement pas tous les joueurs du club qui voient une valeur ajoutée, mais je ne suis pas indifférent au fait de jouer contre Marc Trestman et de voir autant de nos anciens joueurs de l’autre côté du ballon. Ça donne l’impression qu’on joue contre le club des anciens Alouettes. Il y a une grosse portion émotive là-dedans », a témoigné le vétéran de 34 ans en faisant surtout allusion à S.J. Green, Brandon Whitaker et Bear Woods.

L’impact de Trestman ne s’est pas limité aux dimensions offensives de l’équipe durant son règne de 2008 à 2012. Il a également modifié la culture de l’organisation influençant positivement tous – ou presque tous – les joueurs lors de son passage.

Ce constat se confirme notamment auprès du secondeur Kyries Hebert qui a disputé la saison 2012 sous ses ordres. Le prochain duel revêt un cachet particulier pour lui, sauf qu’il y a un mais.

« J’ai beaucoup d’amour, de respect et d’admiration pour lui. C’est l’un des meilleurs entraîneurs de ma carrière, mais l’entraîneur pour lequel je me défonce, c’est celui qui me dirige présentement, Coach Jacques. Je veux représenter Montréal de la meilleure manière », a statué Hebert qui occupe le quatrième rang de la LCF pour les plaqués avec 40.

Le moment s’avère opportun pour Brodeur-Jourdain, Hebert et tous leurs coéquipiers de montrer à Trestman de quel bois ils se chauffent. 

« Évidemment, ce sont des matchs dans lesquels on devra faire un statement en tant qu’équipe. On a démontré une bonne progression depuis le début de la saison, mais on parle de deux matchs de suite contre un rival de division. Au plan émotif, ce sont deux matchs qui peuvent faire énormément de bien à notre équipe ou qui pourraient faire très mal », a reconnu, sans détour, Brodeur-Jourdain.

Cependant, un bémol – qui pourrait changer la note et l’excitation - flotte dans l’air puisque le quart-arrière Ricky Ray s’est blessé à l’épaule droite dans sa dernière prestation contre les Stampeders de Calgary. Le piquant ne serait pas comparable avec la présence du très connu Cody Fajardo aux commandes de l’équipe torontoise.

« On prépare notre défense pour l’attaque de Toronto, tout simplement. On ne peut pas contrôler qui sera leur quart-arrière. On sait bien que ces quarts sont bien dirigés. Au moins, on a déjà affronté Fajardo donc on connaît les deux », a spécifié le coordonnateur défensif Noel Thorpe qui ne serait sûrement pas déçu que Ray doive manquer ce premier round.

Trestman dans une position avantageuse ?

Par sa spécialisation offensive et ses connaissances poussées du club montréalais, certains sont prêts à attribuer un avantage à l’entraîneur des Argonauts en vue de cette confrontation. Trestman pourra également se fier sur les indications de son directeur général Jim Popp qui a dirigé la formation alors que Thorpe chapeautait la défense des Oiseaux.

Thorpe est resté de glace quand ce scénario a été évoqué.

« Tout le monde connaît notre défense dans la LCF. Tout ce qu’on fait peut être analysé sur vidéo », a réagi Thorpe sans se montrer inquiet.

Cérébral d’abord, Jacques Chapdelaine a abondé dans le même sens que Thorpe.

« Au final, ce sera l’équipe qui va bien exécuter et qui jouera avec confiance en minimisant les erreurs qui aura le dessus. Ça sonne cliché, mais c’est ainsi. Dans la LCF, tout le monde a accès aux vidéos des matchs précédents à ce point de la saison. À quelques nuances près, on sait majoritairement ce que les adversaires peuvent essayer de faire », a jugé l’entraîneur des Alouettes.

Bien au courant de la philosophie de Trestman, Brodeur-Jourdain est venu ajouter sa vision des choses.

« La réalité, c’est qu’avec sa mentalité de coordonnateur offensif, Marc veut commencer le match de manière agressive pour s’emparer de l’avance rapidement. Quand il y parvient, ce n’est pas de bon augure pour ton équipe habituellement », a noté Brodeur-Jourdain qui s’attend à plusieurs courtes passes en début de rencontre jumelées à quelques offrandes plus risquées vers les zones profondes.

Contre un tel adversaire, l’attaque des Alouettes devra se démarquer.

« Notre but sera de contrôler le match avec notre unité offensive. Tant et aussi longtemps qu’il n’a pas le loisir de sélectionner des jeux, ça veut dire qu’on effectue bien notre travail et qu’on contribue même défensivement si on peut dire », a relevé LBJ. 

Un premier trimestre insatisfaisant

C’est bien qu’il en soit ainsi pour le spectacle, mais les Alouettes auraient pu s’éviter une tonne de pression pour les rencontres face aux Argonauts. Le clan montréalais n’avait qu’à ne pas bousiller des occasions en or face aux Eskimos, au Rouge et Noir et aux Blue Bombers.

Le bilan du premier tiers de la saison serait donc plus reluisant que le dossier de 2-4. Puisqu'il est trop tard, il faut maintenant tenter de trouver ce qui a fait défaut dans cette première portion du calendrier.

Du côté défensif, Thorpe insiste sur deux aspects.

« On a réussi à forcer les quarts adverses à décocher leurs passes rapidement, mais je voudrais qu’on puisse les envoyer au sol plus souvent et qu’on augmente nos revirements. On doit trouver une manière d’en provoquer plus », a confié le coordonnateur de la défense qui n'affiche qu'une seule interception.

Si la défense n’a pas été aussi dominante que durant les dernières années avec les changements implantés pour revigorer l’attaque, celle-ci n’a pas démontré l’instinct du tueur nécessaire.

« On a assurément manqué de focus offensif. Dans nos insuccès, je considère qu’il y a beaucoup torts qui reviennent à notre attaque. Que ce soit les revirements, les punitions coûteuses, le troisième essai et une verge raté à Ottawa ou les gaffes à la porte des buts à Edmonton, on a laissé trop de victoires glisser offensivement », a ciblé Brodeur-Jourdain.

« On aurait pu facilement sortir avec trois victoires de plus, mais c’est parfois au-delà de notre contrôle. On a tout de même la responsabilité de notre exécution et c’est là-dessus qu’on va se concentrer. On doit apprendre du passé et foncer vers l’avant », a évoqué Chapdelaine en souhaitant que ses hommes le suivent dans cette voie.