À votre avis, qu’y a-t-il de plus dangereux pour les différentes unités défensives de la NFL, le bras ou les jambes d’Aaron Rodgers?

Ma réponse : les deux.

De par sa capacité à improviser un jeu sous pression, le quart-arrière des Packers de Green Bay a habituellement le don de frustrer et de démoraliser les défenses auxquelles il est confronté. Il l’a fait tout au long de sa carrière et sa dernière prestation contre les Lions de Detroit dimanche n’en est que la dernière preuve en liste.

C’est pourquoi j’aime toujours le voir à l’œuvre. Techniquement, je n’ai pas de parti pris, et lorsque nous présentons un match de la NFL sur les ondes de RDS, tout ce que j’espère c’est que le spectacle sera au rendez-vous. Or, quand les Packers sont en vedette sur l’une de nos antennes, l’amateur de football en moi ne peut que se réjouir à l’idée d’observer Rodgers au travail.

Et une fois de plus, je n’ai pas été déçu.

Les unités défensives ont beau se préparer à faire face à tous les schémas offensifs des Packers, il demeure très difficile d’élaborer une stratégie efficace pour contrer un jeu improvisé (scrambling).

Quand un quart-arrière est forcé de sortir de sa pochette protectrice, c’est que le front défensif applique une bonne pression ou que la couverture des demis défensifs est au rendez-vous. Malgré cet excellent travail, Rodgers parvient plus souvent qu’autrement à sortir un lapin de son chapeau.

On n’a qu’à penser à la passe de touché qu’il a lancé à son receveur Geronimo Allison face aux Lions en situation de troisième essai et neuf verges à franchir. Au moment de décocher sa passe, la remise du ballon avait été faite depuis déjà neuf secondes! Imaginez le stress que cela applique sur les demis défensifs adverses. Suivre un receveur pendant neuf secondes, c’est une méchante commande.

Autre exemple, sur la séquence offensive qui a mené au premier touché des Packers dans cette victoire de 31-24, Rodgers est sorti de sa pochette protectrice en situation de troisième essai et sept verges à parcourir, et comme Houdini, il a d’abord évité un sac du quart. Alors que plusieurs se demandaient sans doute encore comment il avait pu y échapper, Rodgers a rejoint Jared Cook sept verges plus loin pour prolonger la séquence.

Bref, tu as beau faire de bonnes choses en défense, ça se termine quand même mal pour toi. C’est ça, jouer contre Aaron Rodgers. Dans une pochette protectrice, il y a cinq portes de sortie et Rodgers possède une clé pour chacune de celles-ci.

Pour espérer limiter les dégâts, les unités défensives se doivent donc de retenir Rodgers dans sa pochette protectrice et de faire preuve d’une discipline rigoureuse. En aucun temps, les demis défensifs ne doivent arrêter de jouer. Comme le dit le bon vieux cliché, il faut jouer jusqu’au son du sifflet.

Un dimanche entre chums

Témoins chaque semaine des exploits de leur quart étoile, les receveurs des Packers croient forcément aux chances de succès de chaque jeu. Alors que Rodgers étire le jeu et achète du temps, ces receveurs restent actifs, se démènent et modifient constamment leurs tracés de passes dans l’espoir de se démarquer et d’offrir des options à leur chef d’orchestre.

C’est sans compter que bien qu’un jeu soit improvisé, certaines règles de base entrent en fonction. C’est souvent aussi simple que de faire l’opposé de la stratégie initiale. Un receveur convergeant vers les zones profondes se replie ainsi vers les zones courtes, alors que ceux devant patrouiller les zones courtes filent vers les zones profondes. Ceux devant aller vers la gauche, se déplacent plutôt vers la droite, et ainsi de suite...

C’est souvent comme si Rodgers se retrouvait au parc par un beau dimanche après-midi pour une partie de football entre chums. Beaucoup de plaisir, et ça fonctionne.

En plus d’être un maître de l’improvisation, Rodgers sait aussi faire preuve d’une efficacité redoutable, et ce peu importe les conditions. Sa mécanique au moment de lancer n’est peut-être pas toujours parfaite, tout comme son jeu de pieds, mais voilà la réalité de tous les quarts-arrières de la NFL.

Chacun des fronts défensifs de la NFL mise sur de bons joueurs, si bien que les quarts ont rarement l’opportunité de profiter de conditions optimales pour décocher une passe. Mais qu’importe, Rodgers n’en a pas besoin pour lancer le ballon avec précision presque à tout coup. Il est capable de lancer le ballon de toutes les façons, même déséquilibré, ce qui fait de lui un quart-arrière unique, et surtout indispensable.

Depuis que Rodgers a affirmé tout haut que les Packers se devaient de gagner tous leurs matchs pour espérer accéder aux éliminatoires, Green Bay montre une fiche parfaite de 6-0. Et Rodgers n’a pas fait que parler. Dans ces six gains, il a lancé 15 passes de touché contre aucune interception.

La table est donc mise pour l’affrontement de premier tour face aux Giants de New York et leur intraitable défense. Reste à voir si les bons receveurs des Packers auront le dernier mot sur la redoutable tertiaire des Giants.

*Propos recueillis par Mikaël Filion