MONTRÉAL - Cloué au banc lors du quatrième match, ouvertement critiqué par des partisans du Canadien pour une rare fois depuis qu’il est à Montréal, peut-être même la toute première, Brendan Gallagher a pris les moyens pour s’assurer de retourner dans les bonnes grâces de Kirk Muller et surtout pour retrouver sa place de choix dans le cœur des amateurs.

 

Dix secondes après la mise en jeu initiale, Gallagher obtenait le premier tir du match. Un tir de loin, c’est vrai, mais un tir qui s’ajoutait aux 33 qu’ils revendiquaient déjà et qui lui conféraient le premier rang dans la LNH depuis la reprise des activités.

 

Bien qu’anodin, ce tir a permis à Gallagher de donner le ton au match. Car trois secondes seulement après avoir vu Carter Hart effectuer un arrêt à ses dépens, la petite peste du Canadien assénait la première des 39 mises en échec distribuées par le Tricolore. Ce premier coup d’épaule était destiné à Ivan Provorov, le meilleur défenseur des Flyers. Lors de sa présence suivante, Gallagher s’est une fois encore permis d’aller secouer Provorov obtenant du coup la deuxième des trois mises en échec qui lui ont été créditées.

 

Mais attention! Au-delà les trois mises en échec officielles que les officiels mineurs ont détectées, Gallagher a été au centre de plusieurs corps à corps le long des bandes et au centre d’échanges de coups de poing et de coups de bâton pas toujours légaux. Qu’ils soient distribués ou reçus par Gallagher.

 

Les quelques dents qu’il a perdues et le sang qui s’échappait de sa bouche après qu’il eut reçu le manche du bâton de Matt Niskanen ou de son partenaire de jeu Ivan Provorov en fin de troisième témoignaient d’ailleurs de l’importance du rôle joué par Gallagher dans la victoire de 5-3 infligée aux Flyers de Philadelphie. Une victoire qui prolonge le séjour du Canadien dans la bulle à Toronto alors que les deux clubs se croiseront à nouveau vendredi dans le cadre du sixième match.

 

Enfin un but!

 

Multiplier les coups d’épaule, être l’instigateur ou le premier invité à plonger au centre de toutes les échauffourées, narguer les adversaires chaque fois qu’il est possible de le faire, c’est bien beau. C’est même nécessaire. Surtout en séries.

 

Mais pour un gars comme Gallagher, un joueur qui évolue au sein du premier trio, il est aussi primordial de marquer de temps en temps.

 

Il a dû attendre au neuvième match de la reprise, mais ce but est enfin venu lorsque Gallagher a frappé, au vol, la passe que venait de lui acheminer Nick Suzuki à la porte du filet de Carter Hart. Le gardien des Flyers n’a rien pu faire pour priver Gallagher de ce but.

 

Cela dit : je ne sais pas si c’est le coup filé de Gallagher ou la qualité d’exécution et de création de la passe de Nick Suzuki qui était le plus spectaculaire sur ce jeu.

 

Mais peu importe.

 

Ce but ô combien important pour Gallagher qui semblait d’ailleurs très soulagé lors des célébrations avec ses coéquipiers redonnait les devants (3-2) au Canadien après que Joel Armia eut effacé les deux buts marqués par les Flyers au cours d’une attaque massive de cinq minutes – Jesperi Kotkaniemi a été chassé du match pour une mise en échec par derrière aux dépens de Travis Sanheim – en tout début de période médiane.

 

« C’est le Gallagher qu’on aime », claironnait d’ailleurs un Kirk Muller souriant après la victoire qui redonne espoir à ses joueurs et à leurs partisans.

 

Des partisans qui avaient perdu un brin de leur foi – et peut-être même deux – après les deux blanchissages consécutifs signés par Carter Hart.

 

Inversement, Gallagher ne s’est pas fait de nouveaux amis dans le camp des Flyers en jouant comme il l’a fait mercredi. « Il joue du hockey solide. Il a marqué un beau but. Pour le reste, il n’a rien fait de plus que ce à quoi on s’attendait. Ils étaient confrontés à l’élimination. On savait qu’ils offriraient leur maximum », a commenté Matt Niskanen qui a eu Gallagher aux fesses et dans le visage du début à la fin du match.

 

L’effet Gallagher fait dérailler les Flyers

 

Brendan Gallagher n’a pas fait gagner le Canadien à lui seul. Bien sûr que non.

 

Mais pour éviter l’élimination, le Canadien avait un urgent besoin d’émotions sur la patinoire. Le genre d’émotions à haut indice d’octane auxquelles Gallagher carbure. Le genre d’émotions qu’il est capable de partager avec ses coéquipiers.

 

L’effet Gallagher a tellement souvent été au centre de victoires du Canadien que cette expression colle au chandail de la bougie d’allumage du Tricolore tout autant que son numéro 11 et le A qui orne le côté gauche de sa poitrine.

 

C’est d’ailleurs l’effet Gallagher qui a forcé les Flyers à abandonner le plan de match étanche en défense qui leur avait permis de signer leurs trois victoires depuis le début de la série.

 

« Le Canadien a marqué dès le début du match. Après trois minutes, ils avaient déjà obtenu quatre chances de marquer. Ils nous ont pressés. Ils ont joué un très bon match », a d’ailleurs reconnu l’entraîneur-chef Alain Vigneault qui prévoit d’ailleurs un autre bon match vendredi.

 

« Je pense qu’il est clair que les équipes ne s’aiment pas beaucoup. Qu’il y a beaucoup d’émotions et d’intensités sur la glace », a ajouté le coach des Flyers.

 

Répliques rapides du CH

 

Joel Armia qui s’était fait très discret – à l’exception des quelques bien vilaines pénalités  – depuis le début des séries a marqué les deux premiers buts du Canadien.

 

Il a profité d’une belle initiative du défenseur Xavier Ouellet pour ouvrir le pointage. Pendant une pénalité écopée par Ben Chiarot, Ouellet a dégagé la rondelle en fond de territoire ennemi. Ce dégagement était en fait une passe alors que le rebond sur la bande derrière le filet a propulsé la rondelle dans l’enclave d’où Armia a tiré après s’être faufilé entre les deux défenseurs qui n’avaient jamais flairé le danger.

 

Jakub Voracek a effacé l’avance du Canadien et donné les devants à son équipe en marquant au début et à la toute fin de la pénalité majeure écopée par Kotkaniemi.

 

Armia, encore lui, a créé l’égalité en profitant d’un cadeau offert par le gardien des Flyers. Gallagher a ensuite donné les devants 3-2 au Canadien qui aurait ensuite doublé son avance, n’eût été du hors-jeu non détecté par les juges de lignes – Jonathan Drouin avait clairement devancé la rondelle en zone des Flyers – mais qui n’a pas échappé aux Flyers qui ont aussitôt contesté.

 

Avec raison.

 

Joel Farabee encore en avantage numérique – les Flyers ont marqué trois fois en sept attaques massives, le Canadien une fois en sept occasions – a ramené les deux clubs à la case départ en milieu de troisième. Vingt-deux secondes plus tard, Nick Suzuki à qui Jonathan Drouin a servi une passe savante dans l’enclave, a redonné les devants au Canadien.

 

Ces répliques rapides du Tricolore aux buts des Flyers ont été le point tournant du match a assuré Jakub Voracek. « Nous avons raté une chance de passer à la ronde suivante ce soir. Ils ont bien joué en plus d’être motivés par le fait de faire face à l’élimination, mais chaque fois qu’on a trouvé le moyen de mettre le match de notre côté en marquant, nous avons perdu le momentum en leur accordant des buts. Ils nous ont littéralement scié les jambes avec ces répliques », a commenté Voracek après la rencontre.

 

Des canons bien silencieux

 

S’il s’est imposé en attaque avec ses deux buts, Voracek a miné les chances de remontée de son équipe en écopant d'une pénalité en fin de troisième.

 

Voracek revendique quatre buts en cinq matchs disputés contre le Canadien.

 

Il est toutefois le seul « canon » des Flyers à avoir déjoué Carey Price jusqu’ici. De fait, Sean Couturier – il a bousillé deux ou trois occasions en or mercredi soir – Kevin Hayes, Travis Konecny et Claude Giroux n’ont pas encore marqué depuis la reprise des activités dans la LNH.

 

Une source de frustration pour le capitaine des Flyers?

 

« Si on fait les bonnes choses, les résultats vont venir. Il est surtout important de jouer du hockey solide en défense. Gagner 1-0 ou 5-4 c’est la même chose. Il faudra être meilleurs défensivement et lui à côté de moi nous donnera des chances de gagner chaque fois qu’il sera devant le filet », a plaidé Giroux en tournant la tête vers Carter Hart.

 

Hart rappelé au banc, puis retourné dans la mêlée

 

Victime de quatre buts – le cinquième enfilé par Phillip Danault a été marqué dans un filet désert – Hart a reconnu qu’il devait être meilleur qu’il ne l’avait été dans le cinquième match.

 

« Je dois effectuer quelques arrêts de plus c’est clai r», que le jeune gardien a lancé candidement.

 

« Je suis sûr qu’il y a deux buts qu’il aimerait revoir », a ajouté Alain Vigneault qui avait d’ailleurs amorcé un changement de gardien après le but qui a finalement été refusé au Canadien en raison d’un hors-jeu.

 

« J’ai vu les yeux de Carter et j’ai compris qu’il était prêt à demeurer dans le match. Je n’ai jamais hésité à faire appel à ses services malgré la situation de deux matchs en deux jours et je suis convaincu qu’il sera en forme lors du prochain match », a conclu le coach des Flyers.

 

Le principal intéressé ne semblait nullement secoué par les buts accordés, par la défaite et encore moins par la décision initiale de le rappeler au banc. Un affront qu’il a subi lors de la deuxième rencontre gagnée 5-0 par Carey Price et ses coéquipiers.

 

« Quand j’ai vu à l’écran géant que " Moose " -- son adjoint Brian Elliott – commençait à se préparer, j’ai amorcé mon retour vers le banc. Lorsque les arbitres ont annoncé la décision de refuser le but, Alain m’a demandé si je me sentais prêt à continuer. J’ai répondu oui bien sûr. Le match n’a pas tourné en notre faveur. Il faudra donc faire comme après la première défaite : mettre cette partie derrière nous et préparer celle qui s’en vient », a bien calmement commenté Hart qui a blanchi le Canadien deux fois de suite après le revers de 5-0.

 

Derrière Gallagher et Armia

 

L’effet positif généré par Brendan Gallagher et l’éveil offensif de Joel Armia mettent en veilleuse des performances importantes chez le Canadien.

 

À commencer par celle de Carey Price qui, malgré les trois buts accordés, a réalisé de très gros arrêts et des arrêts pas commodes au cours du match dont deux aux dépens de Kevin Hayes.

 

En l’absence de Jesperi Kotkaniemi, Nick Suzuki a pris les bouchées doubles et il a été une fois encore excellent. Pas seulement en attaque comme l’indique le but et la passe qu’il a récoltée, mais aussi en défense alors qu’il a été d’une grande efficacité en désavantage numérique même s’il était sur la patinoire pour le 2e but de Voracek. Seule mauvaise note au cahier : une soirée difficile aux cercles des mises en jeu avec quatre duels gagnés seulement sur les 20 disputés.

 

Phillip Danault, Artturi Lehkonen et Paul Byron ont aussi offert du gros hockey à leur équipe. Tout comme Jake Evans qui a effectué plusieurs présences efficaces. Inséré au sein de la formation pour la première fois depuis la reprise des activités, Charles Hudon n’a pas joué beaucoup. Mais ce qu’il a fait, il l’a bien fait.

 

À la ligne bleue, les Weber, Chiarot et Petry ont encore été très solides. Brett Kulak a surpris une fois de plus avec le hockey efficace qu’il offre à son équipe et les quelques poussées offensives intéressantes qu’il a orchestrées.

 

Victor Mete et Xavier Ouellet ont aussi été à la hauteur.

 

Avant d’effectuer sa passe parfaite à Nick Suzuki sur le but de la victoire, Jonathan Drouin avait été pas mal discret.

 

Même chose pour Max Domi dont le fait saillant du match aura été d’offrir une échappée à Kevin Hayes des Flyers à la suite d’une très vilaine passe.

 

Kotkaniemi : pas de sanction supplémentaire

 

Jesperi Kotkaniemi a été chassé du match, en plus d’écoper une pénalité majeure, en raison d’une mise en échec illégale assénée au défenseur Travis Sanheim.

 

Il y avait punition sur le jeu. C’est clair. Mais le fait que Sanheim ait tourné le dos au centre du Canadien tout juste avant l’impact, permet de remettre en question la pénalité majeure. Mais une fois cette décision prise, les arbitres n’avaient d’autres choix que d’expulser Kotkaniemi puisque Sanheim a été blessé au visage lors de l’impact. Selon le règlement 45.1, le responsable d’une mise en échec illégale entraînant une pénalité majeure, doit être expulsé si sa « victime » est blessée au visage ou à la tête à la suite de l’impact.

 

Les responsables du bureau de sécurité des joueurs analyseront bien sûr la mise en échec illégale de Jesperi Kotkaniemi. Mais les premières indications laissent croire que la pénalité imposée sur la patinoire sera jugée suffisante et qu’aucune sanction supplémentaire ne sera ajoutée.

 

Le sixième match de la série Canadien-Flyers sera disputé vendredi à 19 h.