Je suis Québécois et fier de l’être. Quand un commerçant refuse de me servir en français, je vais dépenser mon argent ailleurs.

Je réclame depuis toujours et le réclamerai encore lorsqu’il faudra remplacer Dominique Ducharme que le Canadien de Montréal ait un entraîneur-chef en mesure de parler à la majorité des partisans de l’équipe dans leur langue.

Mais je n’embarque pas une seconde dans le tollé associé au fait que le Canadien a disputé, lundi soir, le premier match de son histoire sans Québécois francophone au sein de sa formation.

Je pose cette question à ceux et celles qui déchirent leur chemise sur la place publique et toutes les tribunes depuis hier : vous faites quoi de Phillip Danault et Jonathan Drouin?

Pourquoi les écartez-vous comme s’ils ne faisaient pas partie de l’équipe? Ce n’est quand même pas la faute du Canadien s’ils sont blessés et qu’ils ne peuvent endosser l’uniforme.

Est-ce que le Canadien devrait avoir plus de Québécois francophones au sein de son organisation? S’il en repêchait plus, s’il misait sur des « petits gars d’ici » pour compléter son renfort au lieu de se tourner vers le « Rest of Canada », les États-Unis ou l’Europe, il aurait eu les moyens de faire jouer au moins un franco lundi.

Je veux bien. Et ça, c’est un débat intéressant.

Alex Belzile fait partie de cette catégorie de joueurs de réserve francophones que le Canadien a regroupés à Laval où il a installé son club-école. Et Belzile a justement joué samedi à Toronto.

Vrai qu’il a été laissé de côté lundi soir pour faire une place à Paul Byron qui était remis de sa blessure. Mais fallait-il se priver de Byron qui a disputé un fort match au sein du meilleur trio du Canadien lundi soit simplement pour faire une place à un francophone?

Je ne peux comprendre que quelqu’un puisse répondre oui à cette question.

Est-ce que Xavier Ouellet aurait pu occuper une place au sein de troisième duo d’arrière lundi à la place de Jon Merrill ou Alexander Romanov?

Peut-être. Mais Ouellet a eu bien des chances de s’installer au sein de la brigade défensive du Canadien au fil des dernières saisons. S’il n’a pu s’accrocher à cette place est-ce que c’est en raison de la langue qu’il parle ou parce que la direction considère que les joueurs qu’elle a préférés sont meilleurs?

Dans sa formation officielle, le Canadien a trois Québécois francophones : Danault, Drouin et Belzile. Un quatrième, Joël Teasdale, occupe l’une des places au sein de l’équipe de réserve.

Les trois Québécois francophones du Canadien font partie des 54 joueurs et trois gardiens natifs du Québec qui ont disputé au moins un match dans la LNH cette année.

Si on fait le tour du Canada pour voir comment se compare le Canadien avec ses rivaux en matière de places réservées aux petits gars de chez eux, on se rend compte que plusieurs clubs sont moins bien nantis que le Tricolore.

Partons de Vancouver

Les Canucks n’ont pas un joueur au sein de leur formation qui vient de la Colombie-Britannique. Cette province compte pourtant 39 joueurs et cinq gardiens qui ont disputé au moins un match dans la LNH. Les Canucks ont même un Américain de plus (13) que de Canadiens (12) au sein de leur formation.

À Calgary, les Flames n’ont pas un seul joueur venant de l’Alberta. Quarante-neuf joueurs et cinq gardiens issus de l’Alberta ont pourtant joué au moins un match dans la LNH cette année.

Est-ce qu’il y a un tollé à Calgary? Est-ce qu’on accuse les Flames de tourner le dos aux joueurs qui ont grandi dans leur cour?

Les Oilers? Kris Russell et Tyler Ennis sont Albertains. Ennis est même originaire d’Edmonton. Ni l’un ni l’autre n’était de la formation qui a battu le Canadien en prolongation jeudi soir. Est-ce que les fans d’Edmonton ont dénoncé un pied le nez de la part de Dave Tippett ou de son directeur général Ken Holland à l’endroit du hockey mineur d’Edmonton?

Le Manitoba a donné 26 joueurs et deux gardiens à la LNH cette saison. Aucun Manitobain n’endosse l’uniforme des Jets qui comptent sur 12 Américains. Les Jets ont trois Québécois : Mathieu Perreault, Pierre-Luc Dubois et Paul Stastny. Est-ce que les fans des Jets dénoncent le fait qu’on fait plus de place à des petits gars du Québec qu’à des petits gars du Manitoba?

Je n’ai pas la réponse à cette question. Mais je me permets d’en douter.

Cent soixante-quinze joueurs ontariens et 11 gardiens ont disputé au moins un match jusqu’ici cette saison dans la LNH. C’est trois fois plus que le nombre de Québécois.

On ne doit donc pas se surprendre que les Leafs et les Sénateurs en comptent 12 et neuf au sein de leurs formations. Du moins il me semble.

Tout ça pour démontrer, ou du moins tenter de démontrer, que le fait qu’il n’y avait pas de Québécois francophones au sein de la formation du Canadien lundi soir est tout simplement lié aux blessures physiques et morales qui privent l’équipe de Danault et Drouin et au fait que le club a préféré un vétéran qui a marqué un but et disputé un fort match – Byron – à un réserviste qui a fait du très bon boulot samedi lorsqu’il est venu en relève.

Si le Canadien n’a pas un seul Québécois au sein de sa formation en octobre prochain, si Danault a profité du marché des joueurs autonomes pour migrer vers les États-Unis, si Drouin a été échangé dans une ville où il pourra jouer sans être étouffé par la pression qui l’étouffait à Montréal et qu’ils n’ont pas été remplacés. Là on pourra apostropher le Canadien et exiger des explications sur l’absence de joueurs de chez nous.

Car oui la réalité du Canadien et du Québec n’est pas la même que celles des autres clubs du reste du pays alors qu’on accorde bien plus d’importance au fait qu’un joueur soit canadien au fait qu’il vienne d’une province ou d’une autre.

Mais lundi soir, les Québécois du Tricolore étaient blessés. Un point c’est tout!

Pas de Québécois, une 1re en 100 ans