MONTRÉAL – Tristan Bérubé attendait ce match. C’était probablement le dernier.

 

Après une saison de misère sur le plan collectif, le gardien du Titan d’Acadie-Bathurst allait obtenir ce vendredi à Halifax une ultime occasion de briller sur l’une des plus grandes scènes du hockey junior canadien. Et tout ça aux côtés de ses chums Yan Aucoin et Rémy Anglehart, les deux autres joueurs de 20 ans du club.

 

Le portier avait peut-être déjà bien entamé son deuil des séries, mais il n’était pas encore prêt à amorcer celui de sa carrière junior. Cette avant-dernière rencontre du calendrier régulier contre les Mooseheads, cette honorable conclusion, Bérubé y tenait.

 

Elle lui a toutefois été volée par la COVID-19, qui a contraint la LHJMQ mardi à annuler le reste de sa saison régulière.

 

« Halifax, c’est tout le temps une place spéciale où jouer. Les 20 ans, on anticipait ce match puisqu’on ne sait même pas si on va pouvoir avoir la chance de jouer devant des grosses foules comme ça dans [la suite] de notre carrière », se désolait Bérubé, mercredi, en entrevue avec le RDS.ca.

 

Exclu du portrait des séries depuis belle lurette déjà, le Titan se préparait à rendre hommage à ses familles de pension et à ses trois joueurs de 20 ans lors des deux derniers matchs de son calendrier régulier, la fin de semaine dernière, lorsque la pandémie de la COVID-19 a paralysé le sport amateur et professionnel nord-américain.

 

« Au cours de mes quatre années junior, j’ai vécu ces matchs-là. Tous les gars veulent les jouer pour les 20 ans. C’est un match spécial et rempli d’émotions. C’est triste qu’on n’ait pas réussi à vivre ça, mais les circonstances font que ça s’est passé comme ça. C’est sûr que c’est décevant et triste. »

 

Une partie de quilles et un souper

 

À l’instar des autres formations du circuit, le Titan n’a pas tardé à inviter tout son personnel à rentrer à la maison une fois l’annonce de la suspension des activités. Le temps d’organiser un dernier souper d’équipe et de tenir les rencontres individuelles de fin de saison déjà à l’horaire, et tout le monde était parti.

 

Bérubé, Aucoin et Anglehart, de même que le vétéran de 19 ans Mathieu Desgagnés, ont quant à eux décidé de passer une dernière fin de semaine ensemble avant d’imiter le reste de l’équipe.

 

« Pour nous, les trois joueurs de 20 ans, c’était spécial parce qu’on a aussi joué ensemble dans le midget AAA (avec les Albatros du Collège Notre-Dame, NDLR), note Bérubé. On se connaissait depuis un bout. Se retrouver comme ça, à la fin de notre carrière junior, c’était spécial. On voulait juste profiter de nos derniers moments ensemble. »

 

Deux petits soupers et une partie de quilles plus tard, les quatre vétérans rentraient à leur tour à la maison.

 

« On est parti chacun de notre bord, lundi matin. »

 

De retour à son domicile familial de La Pocatière, Bérubé n’a d’autres choix, comme le reste de la population, de se tourner les pouces. Quand il ne va pas prendre l’air en solitaire dans un champ avoisinant, il fait comme tout le monde et regarde la télévision.

 

« On écoute les consignes. On se fait dire de rester dans notre maison. Ce sera probablement la seule fois de notre vie où on va se faire dire ça. »

 

S’il admet avoir déjà des fourmis dans les jambes, Bérubé profite également d’un repos amplement mérité. Avec 50 matchs joués cette saison, il pointe au troisième rang des portiers les plus occupés cette année dans la LHJMQ, sur un pied d’égalité avec trois confrères. Seuls deux gardiens ont été confrontés à plus de lancers que lui cette saison (1704).

 

« Ça fait partie de la vie de goaler », relativise-t-il.

 

« C’est sûr qu’à 20 ans, tu veux jouer le plus possible. Il y a de petits moments où tu te sens fatigué, mais je me disais que c’était ma dernière année. Que probablement c’était la dernière année où j’allais pouvoir jouer autant avant d’aller dans les rangs universitaires », confie la prochaine recrue des Gee-Gees d’Ottawa.

 

Pour jouer, il a joué. Dernier rempart d’une équipe qui a dû patienter jusqu’à son 18e match de la saison avant de signer un premier gain, Bérubé ne l’a pas eu facile au fil de la première moitié du calendrier.

 

« Ce fut une saison difficile en général, on ne se le cachera pas. Douze victoires, ce n’est pas l’objectif de personne.  »

 

Les deux pieds sur le pouf, Bérubé préfère donc pour l’instant savourer les petites victoires qui ont ponctué cette campagne ultimement fauchée par la COVID-19. Il y a d’abord eu ce premier triomphe de la saison, contre les puissants Wildcats de Moncton. Ou encore celui contre l’Océanic de Rimouski, redoutable adversaire de sa région natale pour lequel il a évolué l’an dernier.

 

« C’était ma dernière saison junior majeur. J’ai essayé de profiter de tous les petits moments. En vivant une saison comme ça, il faut davantage penser au positif qu’au négatif, surtout en fin de carrière. J’essayais de vivre chaque moment au max. »

 

C’est ce qu’il comptait faire une dernière fois, vendredi, à Halifax.