Ça peut paraître drôle de dire cela, mais les joueurs du Canadien ont quand même essayé durant ce match au cours duquel ils ont rarement été dans le coup.

Malgré le troisième jeu blanc de la série pour Michael Leighton, largement aidé cette fois par les maigres 17 tirs dirigés vers lui (dont un seul en deuxième période), l'effort y a été jusqu'à la fin. On en a eu un exemple quand Marc-André Bergeron a risqué une blessure dans un plongeon pour empêcher la rondelle de pénétrer dans une cage déserte.

Les Flyers leur ont tout simplement été supérieurs dans toutes les facettes du jeu. Le Canadien s'est vu servir une clinique de hockey. Il s'est buté à des défenseurs qui ont brisé ses tentatives de percée en direction de Leighton, qui ont écarté les rares retours accordés par leur gardien et qui ont bloqué un nombre important de tirs.

Leurs attaquants ont constamment forcé le jeu, limité au minimum les revirements et joué rudement, mais avec discipline. Le Canadien n'avait pas la même énergie que dans le match précédent, mais on a eu l'impression qu'il avait tout donné avec ce qui lui restait dans le réservoir. Mais là encore, s'il avait été dans sa forme des meilleurs jours, c'est à se demander si cela aurait changé quelque chose au résultat, tant les Flyers leur en ont mis plein la vue.

Ils n'ont pas gagné grâce à l'intimidation et à la rudesse. Ils se sont davantage appuyés sur leur talent et c'est ce qui rend le sort du Canadien inquiétant pour la suite des choses.

Talent pour talent, les Flyers en ont davantage. En retournant sur leur glace, il faut s'attendre à les voir offrir le même genre d'effort. Comme l'a fait remarquer leur général à la ligne bleue, Chris Pronger, qui a joué 31 solides minutes à l'âge respectable de 35 ans, ils vont se méfier de ce que le Canadien leur enverra dans la face lundi.

«Ils sont revenus de l'arrière durant les deux séries précédentes et ils sont encore capables de le faire. Il faudra être conscient de ça», a-t-il dit.

Pronger avait connu une soirée lamentable jeudi. On le disait fatigué. On insistait sur le fait qu'en utilisant sa vitesse et en le forçant à courir un peu partout pour contrer ses petits attaquants, le Canadien allait l'épuiser davantage. Il en faudra plus, semble-t-il, pour l'empêcher d'exercer son rôle avec l'efficacité qu'on lui connaît.

L'ajout de leur meilleur franc-tireur de la saison, Jeff Carter, et d'un guerrier comme Ian Laperrière, a donné aux Flyers la dose d'adrénaline dont ils avaient besoin pour gagner ce match et s'approcher à une victoire de la finale de la coupe Stanley. Carter, un joueur vraiment exceptionnel, est sorti de ce match avec quatre tirs et autant de mise en échec. C'était comme s'il ne s'était jamais absenté.

Les Québécois Simon Gagné et Daniel Brière avaient combiné une production de cinq buts dans les matchs précédents, mais on les a moins vus cette fois. Les dommages ont été causés par le jeune Claude Giroux qui représente l'avenir de cette organisation.

Dans un match où le Canadien se devait absolument d'inscrire le premier but pour poursuivre sur sa lancée de l'affrontement précédent, c'est Giroux, en contournant Josh Gorges avec facilité, qui a réussi l'exploit. Les Flyers n'ont plus jamais regardé derrière par la suite et Giroux a fermé les livres dans un filet désert avec son huitième but des séries. À 22 ans seulement, faut-il le préciser.

Le match s'est surtout joué en deuxième période, comme l'indique assez clairement le chiffre des tirs: 13-1 pour les visiteurs. Le Canadien n'avait jamais été aussi dominé jusqu'ici dans les séries. C'est à ce moment que les Flyers ont probablement réalisé qu'ils avaient tout ce qu'il fallait pour s'emparer de cette série s'ils jouaient comme ils en étaient capables. D'ailleurs, ils avaient plusieurs fois déclaré, après chacun des trois premiers matchs, qu'ils n'avaient pas été à la hauteur et ce, malgré deux victoires décisives sur leur glace.

Et la suite?

Que se passera-t-il maintenant? Qui osera dire aux joueurs de Jacques Martin que cette série est quasi terminée après les étonnants revirements de situation contre Washington et Pittsburgh? Ils sont sans doute convaincus de pouvoir ramener la série à Montréal pour un sixième match.

Ils ont remporté trois parties suicides contre Washington, la meilleure équipe de la saison et une formation sûrement supérieure aux Flyers qui ont terminé à 33 points des Capitals. Mais sans rien leur enlever, ils ont effectué ce petit miracle avec des jambes plus reposées, moins lourdes qu'en ce moment. Ils ont disputé 100 matchs cette saison et les 18 derniers ont été parmi les plus épuisants de cette longue chevauchée.

On leur accordait très peu de chance de franchir la première ronde. Pour frapper à la porte de la grande finale et se retrouver à sept victoires d'une coupe Stanley, il leur a fallu jouer chaque match le pied au plancher. C'est éreintant et ça hypothèque sérieusement une banque d'énergie.

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais s'attendre à ce que le Canadien remporte les trois prochains matchs est une très grosse commande à la fin de mai quand on a déjà beaucoup donné.