TOKYO (AFP) - Il le suit à la trace, mâche son chewing-gum à la même cadence, mime chacun de ses gestes y compris de colère: Florent Dabadie n'est pas seulement traducteur et assistant personnel de Philippe Troussier, l'entraîneur français de l'équipe de soccer japonaise, il est son confident et en grande partie aussi l'artisan de son succès.

Malgré vingt années de différence, Dabadie, 27 ans, et Troussier, 47 ans, sont si inséparables pendant les matches et à l'entraînement que d'aucuns les ont surnommé "Men in black" pour leur duo de complets sombres en bordure de terrain et leur évidente complicité.

"Mon rôle n'est pas de traduire mot à mot mais de sentir ce qu'il veut dire, de donner mon interprétation et de le dire aux joueurs de la manière la plus facile à comprendre. Je doit transmettre la vision du coach et sa philosophie. C'est donc naturel que j'ajoute un peu de mes sentiments dans cette traduction", expliquait récemment Dabadie au site Amazon.com.

Si Philippe Troussier est le Français le plus connu au Japon avec Carlos Ghosn, le patron de Nissan, Florent Dabadie, qui l'assiste depuis trois ans et demi, est aussi très populaire, notamment auprès des femmes qui apprécient son physique de jeune premier et ses changements de "look".

Son livre sorti à l'automne 2001 ("Moi au pays des pissenlits", allusion au film "Tampopo" de Juzo Itami qui lui a fait découvrir le Japon) s'est vendu à 30.000 exemplaires, presque aussi bien que celui de son mentor Troussier ("Passion", 35.000 exemplaires).

Passion dans les gènes

En apparence pourtant, rien ne prédestinait Dabadie, fils du fameux scénariste Jean-Loup Dabadie ("Vincent, François, Paul et les autres", "Garçon"...) à devenir l'indispensable alter ego du sélectionneur.

Florent Dabadie, qui parle couramment cinq langues dont le japonais, est diplômé en littérature nippone et féru de cinéma, avait (et a toujours) un travail intéressant à Tokyo pour l'édition japonaise du magazine français "Première".

Mais la passion du soccer était dans ses gènes puisque son grand-père fut président du Paris FC et qu'il pratiquait le soccer étant petit. Avant d'être engagé aux côtés de Troussier, Dabadie, vrai amoureux du soccer avait suivi la Coupe du monde 1998 pour une télévision nippone.

Arrivé au pays du soleil levant en provenance d'Afrique, en septembre 1998, Troussier allait vite comprendre - même sans maîtriser la langue - que les traductions de ses propos n'étaient pas toujours fidèles et il souffrait de ne pas bien faire passer ses idées auprès des joueurs.

Dès la fin de l'année, Dabadie allait devenir la cheville ouvrière de son entreprise de transformation et d'ouverture du soccer japonais, traduisant à grands gestes les instructions de Troussier, même les plus directes ou franches, mais en les détaillant au maximum pour mieux expliquer la pensée d'un entraîneur, de plus en plus respecté par ses joueurs.

Troussier a désormais une confiance absolue dans le jugement avisé du jeune Dabadie et le consulte souvent par exemple sur la gestion de son image. Dabadie, lui, s'est pris complètement au jeu de la grande aventure qu'est en train de vivre le Japon, à l'orée des huitièmes de finale.