Une autre saison sur les circuits internationaux des dames et des hommes est chose du passé et un bilan sur les performances de nos Canadiens les plus en vue est de mise.

 

À tout seigneur tout honneur, commençons par Milos Raonic qui à 27 ans est le meilleur Canadien au classement puisqu'il termine l'année au 18e rang de l'ATP. Quand on considère jusqu'à quel point Milos est en méforme en début d'année, cela représente pour moi un petit hold-up

 

Le leader canadien du grand circuit depuis 2011 est pas mal déprimé en fin d'année 2017 en raison des nombreuses blessures qui l'assaillent sans cesse. Pire encore, il se blesse à l'intersaison et est même incapable de se présenter en Australie fin prêt pour le début de la nouvelle année. Physiquement il est en retard sur à peu près tout le monde et ce n'est pas étonnant qu'en deux tournois « Down Under » il perde les deux matchs qu'il dispute, contre Alex De Minaur (alors 208e) à Brisbane et Lukas Lacko (86e) à Melbourne. C'est à se demander pourquoi il fait ce long voyage jusqu'en Australie. Remplir ses obligations envers ses commanditaires et aussi peut-être faire taire les mauvaises langues qui le croient fini? 

 

Peu importe. Ce qui compte, c'est que le grand gaillard se prend en main et les quelques semaines de durs labeurs en février lui permettront rapidement de complètement changer l'allure de sa saison. Il redevient épatant au service, en coups droits et suffisamment régulier en revers et adéquat en déplacements pour s'offrir une demi-finale à Indian Wells et les quarts à Miami, arrêté chaque fois par le grand Juan Martin Del Potro. Comme transformation radicale en peu de temps, difficile de demander mieux! Il passe d'ailleurs de la 38e à la 22e place en deux tournois! WOW! The Big Man is back!!!

 

Par la suite, il faut noter ses belles performances sur herbe avec une finale à Stuttgart et les quarts à Wimbledon en plus d'une poussée notoire à Cincinnati alors qu'il amène Novak Djokovic au troisième set en quarts avant de s'incliner en ronde des 16 aux Internationaux des États-Unis en cinq sets devant John Isner qui l'avait aussi sorti de Wimbledon quelques semaines plus tôt. Avouez qu'après un début d'année aussi crapoteux, du fait qu'il a toujours couru après la forme et est aussi ralenti dans ses plus beaux élans par de nouvelles blessures, finir 18e, c'est au-delà des espérances.

 

Mon cadeau sous l'arbre de Noël pour l'homme de 27 ans contient de la santé pour une année pleine et une farouche détermination de ne jamais dévier de la voie vers l'excellence avec tous les sacrifices que le haut niveau requiert. Une carrière chez les pros, ça passe plus vite qu'on pense, il ne faut pas avoir de regrets plus tard.

 

Denis Shapovalov célébrait ses 19 ans en avril dernier. Il a déjà tellement accompli de belles choses sur le circuit que cela vaut la peine, pour placer toutes choses dans leurs justes perspectives, de se rappeler qu'il n'a que deux années pleines sur le grand circuit. On se souvient bien de toutes les difficultés encourues par Eugenie Bouchard en 2015 après son année météorite. La première montée au classement est toujours la plus facile puisque l'année d'après, tout le monde te connaît sous toutes les coutures et qu'en plus, tu es obligé de faire le même nombre de points pour éviter la dégringolade.

 

Je vous ramène donc en février 2017 alors que Shapo est expulsé de la Coupe Davis en plein match face à Kyle Edmund après avoir frappé de plein fouet l'arbitre à un oeil avec une balle. Un évènement qui aurait pu changer sa vie pour le pire et surtout celle de l'officiel qui est venu bien près de perdre l'oeil. Quelques mois plus tard en juin au tournoi Queen's de Londres, il s'extirpe des qualifications, bat Kyle Edmund (oui oui drôle de hasard hein?) avant de s'incliner 7-5 au troisième set devant Tomas Berdych, 14e au monde et pendant six ans membre du top-10. C'est ce match qui changera bien des choses pour Denis. Il sait dorénavant qu'il appartient à la cour des grands. 

 

Vous vous souvenez sûrement de la suite, de ses folles envolées à Montréal et au US Open, ahhh que du bonheur! Oui, il faut apprécier tout cela lorsque ça passe parce que dès le début de l'année 2018, on lui serre la main tout en lui souhaitant bonne chance... pas dans ses études mais pour refaire tous ces points!!!

 

C'est donc avec palpitations et en même temps beaucoup d'excitation que je regarde chacun de ses matchs cette année. Demie à Delray Beach en février, tiens, c'est un début. Puis deux excellents résultats en série 1000 : ronde des 16 à Miami, wow c'est impressionnant, et bingo, demie à Madrid. Le kid sera OK lorsque le mois d'août arrivera, pas de panique, il aura le droit de perdre à Toronto et au US Open sans que l'avalanche de points perdus lui coupe le souffle. C'est ça le truc, faire de grandes perfs avant que toute la pression du monde te frappe de plein fouet à Toronto.

 

D'ailleurs, devant les siens, il dispute deux excellents matchs en battant Jérémy Chardy et Fabio Fognini. Certes la rencontre face à Robin Haase est décevante mais il se remet vite de ses émotions en enchaînant bien avec une autre ronde des 16 à Cincinnati et un troisième tour au US Open après une bataille épique perdue en cinq sets devant le finaliste de Wimbledon Kevin Anderson. En fin d'année à Tokyo, même s'il est crevé, il joue du tennis extraordinaire pour sortir Hyeon Chung, Stan Wawrinka et Jan-Lennard Struff (qui vient de battre Marin Cilic, 6e mondial) avant de s'incliner devant Daniil Medvedev en demie. Avouez que c'est fort...

 

Tout n'a pas été parfait cette année cependant et il y a de la place à l'amélioration côté attitude et au service, mais le kid, l'adolescent, termine l'année 27e au monde. Mais réalisez-vous jusqu'à quel point c'est extraordinaire??? Surtout avec toute la pression qu'il portait sur ses épaules en début d'année! Il passe donc de la 51e à la 27e cette saison avec une pointe à la 23e place en juin. Pourvu qu'il reste humble... et ne se contente pas de cela. Il a tellement de talent... En espérant qu'il ne s'éloigne pas de l'essentiel en ne perdant pas trop son temps dans les choses futiles...

 

Ce qui m'amène à vous parler de notre jeune merveille Félix Auger-Aliassime. En 2015, il est 1257e au classement. En avril de cette année, il se positionne à la 185e place. Le voilà en cette fin d'année 108e au monde. Que de chemin parcouru par notre globetrotteur! Si je me fie au site de l'ATP, Félix a joué 29 tournois pour un total de 69 matchs, ce qui est énorme! C'est certain que le but était d'assurer sa place dans le grand tableau au premier Grand Chelem de l'année en Australie l'an prochain et malheureusement je ne crois pas que le 108e échelon lui offrira ce bonheur.

 

Mais peu importe, il faut noter ses hauts faits d'armes : sa victoire à Chengdu sur Hyeon Chung, 23e au monde, dans une rencontre tellement intense de la première jusqu'à la dernière balle en plus d'une place en quarts de finale. Il vit aussi finalement son rêve à Toronto : enfin il joue dans le grand tableau. Il est même dominant face à Lucas Pouille, 10e mondial, au mois de mars de cette année en lui indiquant la porte de sortie 6-4, 6-3 avant de s'incliner dans une bataille dantesque au bris d'égalité du troisième set face à Daniil Medvedev alors que le match lui appartient. Il se qualifie au US Open mais souffre de palpitations cardiaques au premier tour face à son copain Denis Shapovalov dans des conditions climatiques extrêmes. Et puis, que dire de cette performance grand format à Tashkent en gagnant huit matchs pour ainsi remporter le quatrième titre de sa jeune carrière. Wouah! 

 

Bien sûr qu'il est unique et très différent de son frère de sang, le « Shapo ». Il tracera sa voie à sa manière et de grâce ne comparez pas les résultats de ces deux-là. À chacun son chemin et cela prendra le temps que ça prendra mais il avancera. Félix est félin, agile, grand, puissant et pro jusqu'au bout des ongles. Il s'exprime devant la presse avec grâce, intelligence et justesse, et ce, dans la langue de Molière comme celle de Shakespeare. Il comprend instinctivement l'importance des choses. Il est beau comme un prince et respectueux des gens. Soyez patients et généreux alors que se dévoilera, devant nos yeux, son cheminement... Je vous rappelle qu'il n'a que 18 ans...

 

Un mot sur notre belle Genie, celle qui, globalement, fait saliver la gent masculine... Tennistiquement parlant, il y a quand même eu quelques moments intéressants. D'abord, j'aime le fait que Michael Joyce soit à ses côtés présentement. Il partage ceci avec Nick Saviano, l'homme qui a amené Eugenie à ses plus belles performances et la 5e place mondiale. Il est un motivateur hors pair, a lui aussi été joueur jusqu'au 64e échelon et en plus il a été l'homme de confiance de Maria Sharapova, Victoria Azarenka et Johanna Konta. On parle ici de deux numéros 1 au monde et d'une top-10. Donc, il connaît les hauts sommets et connaît très bien le tennis féminin. Les succès de Bouchard sont d'ailleurs évidents au Luxembourg en fin d'année alors qu'elle dispose de Timea Babos, Carla Suarez Navarro et Andrea Petkovic (qui se blesse) avant de tenir le match face à la top-10 Julia Goerges alors qu'elle sert pour le match en demie avant d'être rattrapée par la fatigue. Normal, il s'agit d'un septième match en une semaine.

 

C'est tout de même encourageant alors qu'elle franchit finalement la barrière du top-100 pour finir l'année 88e. Bon, on ne tue pas la une avec cela, mais cela lui offre une place dans le grand tableau en Australie. On se croise les doigts qu'elle profite d'un beau tableau pour continuer d'avancer... S'extirper des qualifications comme elle l'a fait cette année à Wimbledon et au US Open, c'est bien, mais c’est encore mieux d'être du grand tableau et de bâtir du momentum pour améliorer sa situation. Au-delà de tout, il faut maintenant apprendre à bâtir avec cet excellent coach et arrêter de jouer à la chaise musicale... 

 

Le père Noël me souffle à l'oreille qu'il n'oublie pas Vasek Pospisil et Françoise Abanda et qu'il ne demande pas mieux que ces deux-là aient les yeux pétillants en déballant leurs cadeaux. En espérant qu'ils comprennent finalement ce que signifie ce principe universel : on attend beaucoup de ceux qui ont beaucoup reçu...

 

Joyeuses Fêtes tout le monde... et bon tennis en 2019!