LONGUEUIL, Qc - L'année 2020 en est une parsemée d'embûches pour la plupart des gens. Et la nageuse Katerine Savard n'y a pas échappé, après avoir appris plus tôt ce printemps qu'elle devra patienter pendant encore un an avant de pouvoir revivre son rêve olympique.

« Ç'a été difficile, parce que le report d'un an des Jeux olympiques de Tokyo signifie qu'il faudra une autre année d'efforts acharnés, avec toute l'incertitude financière qui entoure ça », a-t-elle expliqué en entretien téléphonique avec La Presse canadienne, vendredi.

La morosité ambiante s'est dissipée soudainement plus tôt cette semaine, lorsqu'elle a appris que le film dans lequel elle a joué, une première en carrière pour elle, a été nommé au Festival de Cannes. En effet, le film Nadia, Butterfly, du réalisateur québécois Pascal Plante, a été retenu dans la sélection officielle de la 73e édition du festival.

« Je suis reconnaissant envers Katerine Savard et les autres filles, car elles ne savaient pas du tout ce qu'était faire un film, a évoqué Plante, lui-même un ancien nageur. Elles m'ont fait confiance, et maintenant je les considère comme des amis. Je suis très fier de ce qui leur arrive à travers le film, et à l'inverse, si elles sont déçues qu'il n'y ait pas de Croisette cette année, je suis certain qu'il y aura les marches d'un autre festival en 2020. »

Bien que le prestigieux événement ait été annulé cette année à cause de la pandémie du coronavirus, les organisateurs ont décidé d'annoncer quand même la liste des films qui auraient été présentés sur la Croisette n'eût été la COVID-19. Il n'y aura toutefois pas de remise des célèbres Palmes d'or.

« Mais on va avoir une petite cérémonie en ligne, je crois », a précisé Savard, qui est âgée de 27 ans.

Le film, qui a été tourné entre Montréal et Tokyo l'an dernier, met en vedette l'athlète de Pont-Rouge, qui joue le rôle titre d'une nageuse qui se prépare à participer à ses derniers Jeux olympiques de sa carrière.

Plante tenait à ce que les scènes sportives soient réalistes, un défi énorme en natation, d'où l'idée de faire appel à de vraies athlètes, dont la Québécoise Ariane Mainville et l'Ontarienne Hilary Caldwell. Savard, qui fut médaillée olympique au relais aux Jeux de Rio de Janeiro, n'a toutefois pas été intimidée par les caméras et tout l'attirail cinématographique.

« Non, du tout. C'est vrai que le téléphone n'arrête pas de sonner aux 15 minutes depuis quelques jours, mais, en tant qu'athlètes de haut niveau, nous sommes habitués à donner des entrevues aux caméras de télévision », a d'abord évoqué Savard, qui jure ne pas avoir d'autre scénario de film à étudier pour le moment.

« Je suis tout de même une fille assez émotive dans la vie, et lorsqu'on me demandait de verser une larme (pour le film), je n'avais qu'à me souvenir d'un moment déchirant dans ma carrière pour que le robinet s'ouvre. C'était assez facile, en fait », a-t-elle dit, désinvolte.

Nadia, Butterfly au TIFF?

Le scénario, qui frôlait pourtant la réalité de Savard au moment du tournage il y a à peine un an, est devenu une véritable fiction en mars, lorsque la planète entière s'est immobilisée en raison de la pandémie du coronavirus. Les Jeux olympiques de Tokyo, qui devaient se dérouler le mois prochain, ont même été repoussés d'un an, à l'été 2021.

Plante jure cependant qu'il n'a pas envisagé de réécrire la fin de son scénario, afin de se coller le plus possible à la réalité actuelle.

« Non, d'abord parce que le film a été complété le 16 février. Et de toute façon, nous avons toujours assumé que ce film se déroulait aux Jeux olympiques, de manière métaphorique, en 2020. Et on a surfé là-dessus. Mais tous les habillages, les costumes, étaient alternatifs, donc ils s'approchaient davantage de l'irréel, de la fiction. Donc, non, ça n'a pas affecté la conclusion de notre film."

Plante a indiqué qu'il espère pouvoir présenter 'Nadia, Butterfly' dans d'autres festivals, peut-être le Festival international du film de Toronto (TIFF) cet automne, dit-il, et le lancer en salles québécoises vers la fin de 2020, si la situation sanitaire le permet.

« Les gens ont besoin de retourner dans les salles de cinéma, et moi, tout ce que je veux, c'est de partager ce film-là », a-t-il résumé.

Savard confie à ce sujet qu'elle n'a pas encore vu le produit final sur grand écran, « mais j'ai vu la bande-annonce, avec tout le montage, et je dois dire que maintenant je comprends ce qu'est la magie du cinéma. J'ai hâte de me voir à l'écran ».

Et qui sait, avant d'y parvenir, peut-être pourra-t-elle finalement fouler un tapis rouge cet automne... à Québec ou Montréal?

« Ah oui, ce serait formidable! Je regarde souvent les actrices lors des grands galas et je m'imagine ce que c'est que de vivre ça. J'aimerais tellement ça avoir l'opportunité de vivre ça ici, avec mes proches, et tout le glamour qui va avec », a-t-elle reconnu.

La nage en laisse

Même si Savard avait admis à La Presse canadienne en début d'année qu'elle songeait à la retraite sportive, elle comptait tout de même essayer de se qualifier au sein de l'équipe canadienne de natation en vue de Tokyo. Ses plans ont donc été reportés d'un an, et malgré cela, elle refuse de lâcher le morceau.

Savard s'est donc remise à l'entraînement avec les moyens du bord, comme la plupart des athlètes de haut niveau en ces temps incertains. Elle a notamment pu s'entraîner ces dernières semaines dans la piscine d'un spa du Vieux-Québec, et dans la piscine hors-terre familiale, comme la canoéiste québécoise Laurence Vincent-Lapointe, notamment.

« J'ai discuté avec mon entraîneur, Claude St-Jean, sur une plateforme virtuelle, mais je ne l'ai pas croisé depuis le début de la pandémie. Je m'entraîne assez légèrement, juste pour garder mes sensations dans l'eau. J'ai très hâte que le gouvermenent autorise la réouverture des piscines partout dans la province, parce que pour l'instant je nage en laisse à la maison », a conclu Savard, en riant.