« C’est comme ça que nous avons toujours fait».

Voilà une phrase qui pourrait nuire à l’évolution de l’Homme.

Ce qui nous amène à parler du titre de joueur par excellence, parce qu’il est temps pour l’Association des journalistes affectés à la couverture du baseball majeur d’évoluer, d’entrer dans le 21e siècle, alors que la valeur des joueurs est plus précisément calculée que jamais.

Pendant des années, le joueur par excellence a été déterminé par les votants en prenant en considération les succès de son équipe. À quelques exceptions près,  dont Andre Dawson en 1987 et Cal Ripken en 1991, les meilleurs joueurs ont fait partie des meilleures équipes.

Cela veut malheureusement dire que les réels meilleurs joueurs sont souvent oubliés parce qu’ils ne peuvent profiter du coup de main de coéquipiers talentueux pour améliorer leur sort.

Récemment, un directeur général a relevé le cas de Mike Trout, qui est généralement considéré comme le meilleur de son sport, pas seulement par ceux qui portent de beaux habits et peuvent vous définir ce qu’est la WAR, mais aussi par un nombre grandissant de joueurs, d’entraîneurs et de gérants. Les Angels donnent l’impression qu’ils auront de la difficulté pendant encore quelques années, a prétendu ce gérant, et il est possible que Trout soit le meilleur joueur du baseball majeur pendant les cinq premières années de sa carrière sans jamais gagner un titre « parce que ses coéquipiers ne sont pas très bons ».

Ça n’a pas vraiment de sens. Dans un monde normal, au 21e siècle, le choix du joueur « le plus utile » doit-il être défini par les aptitudes ou l’inaptitude de ses coéquipiers?

Un précédent a été créé très tôt dans l’histoire de la BBWAA, soit en 1934 dans la Ligue américaine.

Le joueur classé 17e au scrutin cette année-là a frappé pour ,313, 31 circuits et a maintenu une OPS de ,982, mais n’a jamais été sérieusement considéré parce que son équipe a terminé troisième. Il s’agit d’Earl Averill, des Indians de Cleveland. Celui qui a fini 10e a cogné 44 longues balles et a terminé deuxième au chapitre de l’OPS avec 1,102 : Jimmie Foxx, dont les Athletics ont pris le 5e rang de l’Américaine.

Toujours en 1934, celui qui a mené pour l’OPS a été Lou Gehrig, avec un impressionnant 1,172. Il a défoncé les défensives adverses avec 49 circuits, 40 doubles, 6 triples, 124 points et un taux d’efficacité de ,465 au bâton. Gehrig a terminé cinquième au scrutin.

L’athlète qui a été couronné dans l’Américaine aura finalement inscrit 74 points et deux circuits : Mickey Cochrane. Il était à la fois le receveur ET le gérant des Tigers, qui ont conclu la campagne avec un dossier de 101-53, en tête de leur association. Cochrane est maintenant un membre du Temple de la renommée. Cette discussion n’a pas pour but de déprécier son accomplissement, mais écoutez bien. Si vous procédiez à un repêchage parmi tous les joueurs de la ligue cette saison-là, que ce soit au début ou à la fin de celle-ci, il n’y a aucune chance que Cochrane serait le premier choix, ni même le deuxième ou le troisième. En fait, il n’était même pas près d’être le meilleur joueur à cette époque.

Mais parce que ses coéquipiers étaient meilleurs que ceux de Gehrig ou de Foxx, c’est Cochrane qui a été le grand élu.

C’est à ce moment précis que la formule de nomination du MVP a été établie et, de façon générale, elle a ensuite toujours été respectée.

En d’autres mots : « c’est comme ça que nous avons toujours fait ».

C’est le moment pour les journalistes d’évoluer. Il est temps de discuter de la nécessité de dissocier la performance d’un joueur de celles de ses coéquipiers qui l’entourent. Il est temps d’utiliser la même formule déjà employée dans le cas du trophée Cy-Young, remis au meilleur lanceur de chaque association.

Présentement, les instructions données aux votants sont extrêmement vagues et ouvrent la porte à l’interprétation. Au fil du temps, les journalistes ont indirectement et essentiellement déterminé que le MVP doit provenir d’une équipe gagnante. Voilà le précédent. Ces règles doivent changer et être simplifiées. Quelque chose dans le genre de : « lorsque vous remplissez votre billet de vote, votez pour le meilleur joueur de la ligue ». Point.

D’ici là, il doit y avoir de sérieuses discussions. Ce prédédent est un boulet pour les votants, à un certain degré. C’est pourquoi Miguel Cabrera va fort probablement remporter un deuxième titre de joueur par excellence même si Mike Trout a fait mieux que lui chaque fois.

Je n’ai pas le droit de voter, ni dans cette catégorie ni dans une autre (et c’est le cas depuis 1996), mais si j’en avais l’occasion, je trouverais difficile de déroger à la façon de faire habituelle, à moins que la BBWAA change ses directives.

Je crois aussi que Trout est le meilleur joueur du baseball majeur et qu'il est assurément celui qui influence le plus les résultats de son équipe, surtout quand on se fie sur des statistiques offensives et défensives qui n’étaient pas aussi perfectionnées en 1934 ou même en 1994.

Puisqu’il demeure inchangé, le processus de votation devrait encore donner lieu à de l’interprétation. Si je pouvais voter, je devrais m’y conformer, et voici quels seraient mes choix :

Joueur par excellence de l’Américaine

1. Miguel Cabrera, Tigers
2. Mike Trout, Angels
3. Chris Davis, Orioles
4. Josh Donaldson, Athletics
5. Robinson Cano, Yankees
6. Manny Machado, Orioles
7. Dustin Pedroia, Red Sox
8. Evan Longoria, Rays
9. David Ortiz, Red Sox
10. Adrian Beltre, Rangers

Joueur par excellence de la Nationale

1. Andrew McCutchen, Pirates
2. Paul Goldschmidt, Diamondbacks
3. Freddie Freeman, Braves
4. Yadier Molina, Cardinals
5. Matt Carpenter, Cardinals
6. Clayton Kershaw, Dodgers
7. Joey Votto, Reds
8. Allen Craig, Cardinals
9. Jay Bruce, Reds
10. Andrelton Simmons, Braves

Cy-Young : Max Scherzer des Tigers et Clayton Kershaw des Dodgers

Recrue de l’année : Jose Fernandez des Marlins et Cody Allen des Indians

Gérant de l’année : John Farrell (Red Sox) et Clint Hurdle (Pirates).