Dès que Vancouver a obtenu les Jeux Olympiques en 2003, la question du bilinguisme a été soulevée. Le comité organisateur allait-il être en mesure de relever le défi colossal d'en faire des Jeux bilingues? 7 ans plus tard, il semble que l'on va manquer de temps et d'argent pour que les francophones aient droit à ce bilinguisme que l'on proclame et vante autour du monde depuis 1969.

J'ai (http://legrandclub.rds.ca/profils/blogue_de_depart/posts/35891) blogué sur le sujet et les réactions ont été vives.

Résumé de la situation : Les organisateurs n'ont pas assez d'argent pour présenter des Jeux bilingues tel que promis lors de l'obtention des Jeux Olympiques en 2003. C'est ce qui ressort du plus récent rapport du commissaire aux langues officielles du Canada, Graham Fraser.

Il n'y a pas assez d'argent pour embaucher des traducteurs afin de rendre des services bilingues aux spectateurs, aux athlètes ainsi qu'aux média. M. Fraser indique également que les agences gouvernementales impliquées sont en retard sur le processus du bilinguisme. Mettons les choses au clair, le français est une langue officielle aux Jeux Olympiques. Donc, les annonceurs sur les sites de compétitions et les indications “olympiques” seront bilingues. C'est au niveau des bénévoles, des services aux aéroports et tout autres services publics qu'il n'y aura pas de français

Une québécoise qui se trouve en Colombie-Britannique depuis plus d'un an m'a écrit cette semaine concernant son expérience personnelle. Elle veut offrir ses services au comité organisateur… en vain, jusqu'à présent. En voici des extraits.

«Je suis en Colombie-Britannique dans le but de travailler pour les Jeux. J'ai laissé derrière moi famille, amis et un emploi de journaliste aux sports au Courrier de Saint-Hyacinthe pour venir améliorer mon anglais un an et demie avant les Jeux. Je voulais réaliser mon rêve qui est de vivre et de participer à l'organisation des Jeux. »

Elle ajoute :

« Je pensais bien que mon expérience de 5 ans comme journaliste sportive, mes expériences de bénévolat (entraineuse au hockey mineur, administratrice d'un organisme qui vient en aide à des athlètes, membre de différents comités organisateurs de tournoi de hockey et Jeux du Québec, etc.), mes habiletés à communiquer dans les deux langues dites officielles du Canada et du Comité International Olympique, bref, je croyais bien avoir des chances de réaliser mon rêve... »

« 150 jours avant les Jeux et bien rien. Je ne sais pas combien de fois j'ai envoyé mon curriculum vitae pour postuler sur différents emplois offerts sur le site de Vancouver 2010 (ce qui est la seule façon de poser sa candidature). On m'a rappelé une seule fois pour une entrevue téléphonique. Depuis un an, je n'ai pas lu une seule offre d'emploi où la connaissance du français était nécessaire (n.d.l.r: la plupart des postes mentionnent que la connaissance du français serait un atout. De plus, tous les emplois en traduction ne sont offerts qu'en stage pour les étudiants. Pour ce qui est du bénévolat, j'ai reçu ma formation générale il y a plusieurs mois et depuis aucune nouvelle, alors que j'habite à Vancouver et que je parle français. »


Mylène a 2 atouts en sa faveur. Primo, elle est bilingue et deuzio elle habite à Vancouver. Le comité organisateur éprouve toutes sortes d'ennuis à trouver des bénévoles bilingues car ces bénévoles doivent assumer les frais d'hébergement. Le gros problème, c'est qu'il n'y en a plus d'hébergement… Essayez de trouver un endroit où loger durant les Jeux. Presque mission impossible. Les endroits disponibles sont à un prix de fou. Les gens ont beau avoir la passion pour les Jeux Olympiques, ils ne vont certainement pas se mettre sur la paille pour autant. Ils sont passionnés, pas fous!

Et ça se poursuit :

« Tout le monde dit que le français est une grande lacune pour les Jeux de Vancouver. Je suis ici, avec toute la volonté du monde, toute ma passion et mon dynamisme et rien ne bouge. Je ne comprends rien mais je ne me décourage pas. J'ai encore 150 jours pour atteindre mon objectif et réaliser mon rêve. En espérant que les dollars annoncés par le gouvernement ne sont pas que des promesses. »

Effectivement, quelques heures après le dépôt du rapport du commissaire aux langues officielles, le ministre de Patrimoine Canada, James Moore, a annoncé l'ajout de 7,7 millions de dollars pour le bilinguisme aux Jeux de 2010. Belle coïncidence! Ces fonds aideront pour la traduction, pour le bilinguisme aux cérémonies de remise de médailles. Ni le commissaire aux langues officielles ou le comité organisateur n'étaient au courant qu'une annonce allait survenir lundi.

Les Jeux de Vancouver seront mes 5e Jeux Olympiques. Que ce soit à Salt Lake City, à Athènes, à Turin ou à Beijing, les habitants du pays hôte étaient servis dans les langues officielles du CIO (anglais, français) mais surtout dans la langue de leur pays.

La version du comité organisateur de Vancouver 2010

Coup de fil à un des responsables des médias du COVAN, Sébastien Théberge pour avoir leur position dans ce débat qui enflamme l'ouest canadien. Allons-y d'abord avec les statistiques. «Nous avons ciblé 3500 des 25 000 postes de bénévoles comme étant des postes de relations directes avec le public et qui commandent le bilinguisme. À ce jour, 80% de ces postes ont été comblés et nous allons atteindre 100% d'ici février 2010. », explique-t-il.

Il me mentionne que les bénévoles parlant français seront bien identifiés avec un macaron où il sera inscrit « bonjour! ». De plus, les francophones qui seraient incapables d'être servis en français sur les sites olympiques pourraient appeler à un numéro 1-800 où une équipe volante pourra leur prêter main forte pour faciliter la communication.

Les efforts sont là. Plusieurs traducteurs et traductrices travaillent d'arrache-pied pour y arriver. Le problème se situe au niveau du manque de ressources. Il faudrait avoir les moyens de nos ambitions. 15% des 1500 employés du COVAN sont bilingues. 10% possède une capacité intermédiaire en français.

M. Théberge m'assure que les objectifs fixés en 2003 lors de l'obtention des Jeux Olympiques seront atteints. On sait pertinemment au COVAN que la question du bilinguisme sera scrutée à la loupe.

D'ailleurs, la ville de Vancouver a fait quelques efforts pour un affichage bilingue durant les Jeux. Sur les routes, la signalisation des voies olympiques sera bilingue. On pourra même voir le mot « rue » côtoyer « street ». Mes espions sur place m'ont souligné que ces décisions avaient suscité la controverse chez les citoyens qui y voyaient des dépenses inutiles afin de satisfaire une infime partie de gens.

Les yeux du monde entier seront tournés vers le Canada pendant 2 semaines. Voilà une belle occasion de démontrer que le Canada est véritablement un pays bilingue à la face du monde. Cette bataille pour le bilinguisme en est une d'image car dans les faits, le bilinguisme canadien tient à un texte de loi. À défaut de quoi, lorsqu'un représentant du Canada se promènera à travers le monde en disant que son pays est bilingue, la preuve aura été faite qu'il n'en est rien.