La boxe québécoise compte toujours trois champions du monde, mais elle a surtout vu un vieux routier que plus personne n’attendait vraiment refaire surface avec deux victoires inattendues.

Et contrairement aux dernières années, il n’y a pas eu de grandes querelles sur la place publique en 2019, même si l’avenir semble moins rose que par le passé. Revue de l’année en cinq temps.

Boxeur de l’année : Artur Beterbiev

Oui, Jean Pascal est redevenu champion du monde plus de huit ans après avoir été détrôné par Bernard Hopkins. Oui, Marie-Ève Dicaire a défendu trois fois sa ceinture des super-mi-moyennes de l’IBF remportée le 1er décembre 2018 à la suite de son triomphe sur Chris Namus à Québec.

Mais il ne faut pas se laisser raconter d’histoires, l’exploit le plus significatif en boxe québécoise en 2019, c’est la victoire d’Artur Beterbiev contre Oleksandr Gvozdyk en octobre à Philadelphie. Déjà détenteur du titre des mi-lourds de l’IBF, le Montréalais d’origine russe a ajouté celui du WBC en l’emportant par arrêt de l’arbitre au 10e round au terme d’un combat très, très relevé.

C’est la première fois dans toute la grande histoire du pugilat de la Belle Province qu’un athlète d’ici devenait champion unifié, un exploit digne de mention. De plus, Beterbiev est maintenant considéré comme l’un des meilleurs boxeurs « livre pour livre » de la planète d’après The Ring.

Le choc entre Beterbiev et Gvozdyk était également le premier d’unification chez les mi-lourds opposant deux athlètes invaincus, un autre signe de l’importance qu’il revêtait dans l’histoire. À l’heure actuelle, bien malin qui peut prédire qui sera capable de battre l’élève de Marc Ramsay.

Un combat serré, mais une victoire méritée

Combat de l’année : Jean Pascal contre Badou Jack

L’année se termine le 31 décembre et la tentation peut être très forte d’écrire ce texte avant le début des Fêtes afin de profiter pleinement des accords desserts-stouts auxquels l’auteur de ces lignes rêvassait depuis un long moment déjà. Sauf que l’expérience nous suggérait la prudence...

David Lemieux et Max Bursak avaient livré un fort combat le 7 décembre à Montréal, mais Jean Pascal et Badou Jack ont encore fait mieux le 28 à Atlanta. Une très courte victoire par décision partagée du Québécois et une chute au plancher de part et d’autre. Qui peut demander mieux?

Le champion « régulier » des mi-lourds de la WBA a profité d’un très lent début de combat du Suédois d’origine gambienne pour prendre largement l’avance sur les cartes des trois juges, sauf que ce dernier s’est réveillé en deuxième moitié d’affrontement, envoyant même Pascal au tapis au 12e et dernier round. Aux yeux de plusieurs, il en avait ainsi fait juste assez pour l’emporter.

Mais les juges en ont décidé autrement en déclarant Pascal gagnant par décision partagée (114-112, 114-112 et 112-114), un résultat qui témoigne parfaitement de l’allure du duel. Les deux boxeurs se sont échangé 1188 coups pendant le combat, pas mal pour deux mi-trentenaires!

Knock-out de l’année : Saddridin Akhmedov sur Jose Antonio Villalobos

Signe que les temps changent, ce palmarès couronne un « nouveau venu « en 2019 après avoir souvent récompensé David Lemieux ou encore Adonis Stevenson dans le passé. Il faut dire que le premier ne s’est battu qu’une seule petite fois cette année, tandis que l’autre est à la retraite.

Saddridin Akhmedov avait déjà enregistré quelques belles victoires par knock-out dans le passé – dont une sur Jose Francisco Zuniga en novembre 2018 à Rimouski –, mais celle sur Jose Antonio Villalobos le 7 décembre au Centre Bell a surpassé toutes les autres sur la scène locale.

À ses débuts dans le célèbre amphithéâtre, le Kazakh âgé de seulement 21 ans ne pouvait rêver mieux. Le combat contre l’Argentin se déroulait plutôt rondement lorsqu’Akhmedov a asséné une puissante droite au visage de Villalobos, qui a ensuite croulé au sol sous la force de l’impact.

Ce n’est très certainement pas un hasard si The Ring a nommé Akhmedov pour le titre d’espoir de l’année. Il n’est évidemment pas encore du calibre d’un Daniel Dubois ou d’un Vergil Ortiz fils par exemple, mais cela donne quand même une idée du potentiel exceptionnel qu’il possède.

Surprise de l’année : Jean Pascal sur Marcus Browne

Peu de gens accordaient de réelles chances à Jean Pascal de battre Marcus Browne le 3 août au Barclays Center de Brooklyn. La preuve? Les preneurs aux livres le négligeaient à 11-contre-1...

L’ancien champion des mi-lourds du WBC revenait d’une dure défaite contre Dmitry Bivol et le clan Browne y voyait assurément l’occasion d’ajouter un beau nom à leur tableau de chasse. Le menton de l’Américain était peut-être suspect, mais Pascal n’était pas reconnu pour sa droite...

Les trois premiers rounds ont résolument été l’affaire de Browne, mais une première onde de choc est survenue au quatrième assaut quand Pascal a surpris son adversaire avec un contre de la droite parfaitement exécuté. Le vent allait-il tourner? Pas tellement, parce que le champion intérimaire des mi-lourds de la WBA a retrouvé ses sens en gagnant les deux rounds suivants.

Toutefois, Browne est retourné deux autres fois au plancher au septième assaut, permettant à Pascal de virtuellement créer l’égalité, avant qu’un coup de tête accidentel coupe l’Américain à l’œil gauche au huitième round et provoque ainsi l’arrêt des hostilités. Alors? Victoire de Pascal par décision technique des juges (75-74, 75-74 et 75-74) et l’une des grandes surprises en 2019!

Retour de l’année : Jean Pascal

Il fallait vraiment être un inconditionnel de Jean Pascal pour penser qu’il se remettrait de son revers subi contre Dmitry Bivol en novembre 2018 à Atlantic City, au New Jersey. Le champion « régulier » des mi-lourds de la WBA de l’époque lui avait en effet servi une correction qui laissait penser qu’il n’avait plus ce qu’il fallait pour rivaliser avec les meilleurs boxeurs de sa catégorie.

C’est pourquoi l’annonce de son duel face à Marcus Browne n’augurait rien de bon. Nettement moins talentueux que Bivol, Browne possédait cependant la force de frappe pour faire très mal à Pascal. Personne au monde ne souhaitait au Québécois de se faire passer un solide knock-out.

Mais grâce à une stratégie qui consistait à attendre le bon moment pour attaquer le menton fragile de Browne, Pascal a envoyé l’Américain trois fois sur le canevas avant de l’emporter par décision technique des juges à la suite d’un coup de tête accidentel qui a coupé le champion intérimaire à l’œil gauche au huitième round. L’impossible devenait alors bel et bien réalité.

Pascal a ensuite été promu champion « régulier » en octobre et a défendu son titre en battant Badou Jack par décision partagée le 28 décembre à Atlanta. Encore là, le Québécois a su tirer son épingle du jeu au bon moment pour se sauver avec la victoire. On ne peut que le louanger.