Terminé les vacances pour les joueurs et les entraîneurs des Alouettes, alors que tout ce beau monde se rapportera au camp d’entraînement à compter de dimanche, à Lennoxville.

On a tous bien hâte de voir ce que nous réserve sur le terrain l’édition 2016 des Moineaux. Sur papier, plusieurs des changements de personnel apportés sont très intéressants. Encore faut-il cependant que cela se transpose en résultats tangibles!

Et c’est durant le camp (et le mini-camp tenu en Floride) qu’on tente de tout mettre en place afin de démarrer la saison en force.

Lorsqu’on se penche sur les nouveautés, un des faits marquants est certainement la plus grande stabilité à la position de quart-arrière. Tout indique que le vétéran Kevin Glenn débutera l’année comme partant.

Rappelons qu’il avait disputé trois rencontres la saison dernière, récoltant des statistiques somme tout intéressantes (756 verges et 67 % de passes complétées avec sept passes de touchés et quatre interceptions). Ce qui avait été dommage pour lui est qu’il avait été victime de trois interceptions dans un même match, face aux Tiger-Cats de Hamilton. Cette mauvaise prestation avait terni le portrait d’ensemble. Bref, globalement, Glenn avait été efficace, même s’il ne s’était pas avéré un grand sauveur pour l’attaque montréalaise.

La situation est bien différente de celle connue l’an dernier à pareille date. Mettez-vous à la place d’un jeune quart qui se présentait au camp des Als au printemps 2015 : aucune expérience de la Ligue canadienne de football derrière la cravate et pas le moindre vétéran dans les parages pour le soutenir dans son apprentissage, répondre à ses interrogations et jouer le rôle de grand frère. Et comme si ce n’était pas suffisant, le coordonnateur offensif en place, Turk Schonert, en était un dont les connaissances de la LCF étaient limitées, comme on a été en mesure de le constater avant son congédiement. Comme on dit, c’est de partir avec deux prises contre toi! Ce n’était pas une situation gagnante lorsqu’on considère à quelle point cette position est névralgique.

Anthony CalvilloCette fois, les jeunes quarts auront un modèle expérimenté à observer et questionner en Glenn, et pourront compter sur le génie d’Anthony Calvillo, épaulé par Jacques Chapdelaine, qui lui est loin d’être le premier venu. Il s’agit d’un gros changement positif.

Au chapitre des stratégies, Chapdelaine excelle. Il a travaillé longtemps avec les Stampeders de Calgary et les Lions de la Colombie-Britannique, deux équipes qui ont démontré leur capacité à développer de jeunes quarts. C’est un élément non négligeable car dans l’histoire des Alouettes, il y a eu deux quarts – Calvillo et Tracy Ham – et c’est à peu près tout. Ces deux grands joueurs n’ont pas fait leurs premiers pas dans la LCF avec les Alouettes; ils se sont plutôt greffés à l’équipe en tant que joueurs autonomes à l’époque. C’est un vent de fraîcheur, car les outils sont désormais en place pour permettre à un jeune quart de s’épanouir à Montréal.

Et il n’y a pas qu’au plan des mentors qu’on verra les jeunes quarts des Alouettes être bien entourés. Il ne faudrait pas passer sous silence le groupe de receveurs mis en place, une unité alliant talent et profondeur.

D’une part, avec le retour des Duron Carter et Kenny Stafford, des spécialistes des longs jeux, l’attaque va être équipée pour étirer le terrain et faire travailler la tertiaire adverse dans les zones profondes. Ce sont des armes de plus à utiliser pour distribuer le ballon et faire avancer les chaînes. Déjà là, la dynamique n’est plus la même qu’en 2015. Il y des raisons d’envisager le tout avec optimisme.

La ligne offensive : problématique?

Le seul bémol en lien avec l’attaque, à mon humble avis, se situe au plan de la ligne offensive, et ce après plusieurs saisons consécutives où cette facette était le moindre des soucis du personnel d’entraîneurs. Par le passé, on connaissait les membres de l’unité, on se doutait qu’ils allaient performer match après match et agir en leaders. Bref, les éléments de doute se faisaient rares.

Jeff PerrettMais soudain, cette année, c’est une source d’inquiétude. Avec la blessure de Luc Brodeur-Jourdain, Dominic Picard sera appelé à jouer au centre. Il s’agit d’une belle acquisition, puisqu’on parle d’un vétéran fiable de 10 saisons dans le circuit ayant déjà évolué, qui plus est, avec Kevin Glenn lorsqu’il jouait à Winnipeg. Mais ça demeure néanmoins un changement, et Picard devra s’habituer aux nouveaux coéquipiers qui l’entoureront.

Le départ de Josh Bourke, bloqueur étoile du côté gauche, est certainement digne de mention car son mandat principal était de protéger le quart, et il le remplissait très bien. Comment les Alouettes parviendront-ils à pallier cette perte? En donnant la chance au jeune Jacob Ruby? Ce dernier était en mode « apprentissage » l’an dernier avant de jouer le dernier match de l’année face à la Saskatchewan, match durant lequel il a fait très belle figure.

Chose certaine, le scénario idéal serait que Ruby puisse s’acquitter de la tâche. Ça limiterait le nombre de changements à effectuer en plus de conserver le ratio de joueurs canadiens. Peut-il reproduire les belles choses montrées contre les Roughriders semaine après semaine? On lui donnera toutes les chances de s'établir, et s’il répond à l’appel, le travail de chacun sera facilité.

Sinon, décidera-t-on de bouger Jeff Perrett de la droite vers la gauche? Fera-t-on le choix d’utiliser Philip Blake à la position de bloqueur, et par le fait même d’amener un nouveau garde, comme le premier choix Philippe Gagnon? Et si rien de tout cela ne fonctionne, il faudra considérer l’idée d’aligner un bloqueur américain. Ce ne sont que des hypothèses, mais ce sont des scénarios plausibles pour les membres de la ligne à l’attaque.

Le vétéran et la relève

C’était intéressant d’entendre le directeur général et entraîneur-chef Jim Popp parler de ses trois quarts (Glenn, Brandon Bridge et Vernon Adams) lors d’un point de presse donné plus tôt cette semaine.

Bridge a un beau potentiel et il nous en a fait la preuve l’an passé lors d’un départ face aux Riders, durant lequel il avait excellé avec 220 verges de gains, deux passes de touché et aucune interception. Il s’agit d’un beau diamant à l’état brut qu’il faut continuer de polir.

Popp a évidemment parlé en bien de sa nouvelle trouvaille, le jeune Vernon Adams fils, un produit de l’Université de l’Oregon qui a également passé par Eastern Washington. Sans s’emballer précipitamment à son sujet, on peut déduire que l’organisation l’a en très haute estime pour avoir cédé un choix de premier tour pour ses droits de négociations... On devine avant même le début du camp qu’à moins d’une catastrophe inimaginable, son nom est déjà inscrit dans la formation à l’encre indélébile!

Vernon AdamsNul doute qu’on va donner le temps requis à Adams pour s’adapter aux réalités du football canadien.

Fait intéressant : le jeune Adams a grandi dans le même programme collégial que le quart des Stamps, Bo Levi Mitchell, un des meilleurs joueurs de la ligue à sa position.

Sans avoir décortiqué son jeu de fond en comble, certains aspects m’ont sauté aux yeux. Ce qui a attiré mon attention en premier, c’est sa fiche combinée avec les deux universités, soit de 35 victoires et neuf revers. Cela me dit qu’il s’agit d’un joueur qui gagne beaucoup, et il ne faut pas sous-estimer l’importance que cela revêt.  

En carrière, Adams a décoché 136 passes de touché et été victime de 37 interceptions. Avec un tel ratio, sa prise de décisions et sa protection du ballon semblent être des forces. Indéniablement, ce sont des traits de caractère recherchés chez un quart-arrière. Il reste à souhaiter que ces attributs se transposent dans la LCF. On comprend qu’il y a une marche à suivre dans sa progression, mais ce sont des raisons d’entrevoir avec enthousiasme son arrivée.

En prenant bien soin de dire qu’il ne comparait pas l’ensemble du jeu des deux quarts, Popp a confié qu’il voyait des similitudes avec le grand Doug Flutie, en ce sens qu’Adams est reconnu pour avoir des yeux tout le tour de la tête, pour sentir la pression sans nécessairement la voir et pour sa capacité d’étirer le jeu en courant s’il le faut. Il peut appliquer un stress incroyable sur une unité défensive.

Adams est un quart qui se sert de sa mobilité afin de trouver des options de passes, et non pour courir en conservant le ballon en sa possession. Demandez à tout coordonnateur défensif de la LCF s’il est enchanté de devoir affronter un quart capable de se déplacer derrière la ligne d’engagement et « d’acheter du temps » afin de permettre à un receveur de se libérer de son couvreur. C’est un véritable casse-tête, car les chances qu’un des demis défensifs ait abandonné sa couverture lors de ces quelques secondes additionnelles sont  très bonnes.

C’est une qualité qui peut devenir payante, particulièrement sur les larges terrains de la Ligue canadienne. Lorsqu’on additionne ce qu’il fait de bien à l’attitude empreinte de confiance qu’il dégage, on comprend ce qui a éveillé l’intérêt de Popp et des Alouettes.

Adams semble avoir cet impondérable, ce facteur incalculable sur papier, faisant que les joueurs veulent évoluer en sa compagnie. Tout cela mis ensemble fait de lui un joueur ayant un grand potentiel. À condition de lui fournir un encadrement de qualité, les Alouettes seront contents tôt ou tard de compter sur ses services.

Samedi, mon attention se portera sur l’unité défensive des Alouettes dans une deuxième chronique mettant la table à cette saison 2016.  

* propos recueillis par Maxime Desroches