MONTRÉAL – C’est un cliché vieux comme le monde qui veut qu’une équipe se concentre uniquement sur ce qu’elle peut contrôler sans se soucier de ce qui se passe chez le voisin.

Mais Nik Lewis n’essayera même pas de vous vendre cette salade, du moins pas dans le contexte actuel. Après tout, à quoi bon prétendre qu’on porte des œillères lorsqu’on s’aligne pour une équipe qui n’a plus le contrôle de sa propre destinée?

Avec trois matchs à jouer avant la fin du calendrier régulier, le sort des Alouettes repose partiellement entre les mains de ses rivaux. Même s’ils connaissaient une fin de parcours parfaite qui leur permettrait de terminer la saison avec une fiche de 8-10, les Oiseaux pourraient rater les éliminatoires pour la première fois en 20 ans.

Cette perspective n’inquiète toutefois pas Lewis, qui n’a jamais manqué la danse automnale de la LCF depuis une saison recrue ardue avec les Stampeders de Calgary en 2004. D’abord, le vétéran receveur de passes demeure confiant de voir les siens se ressaisir à temps pour aligner les victoires et mettre la pression sur leurs adversaires. Ensuite, il admet sans gêne qu’il a étudié le scénario qui se dresse devant la compétition. Son analyse de la situation le gonfle d’optimisme.  

« Je crois que le calendrier de B.C. est plus difficile que le nôtre », s’encourageait Lewis au terme d’un léger entraînement, mardi.

Jugez-en par vous-même : les Lions, qui occupent actuellement la position au classement convoitée par les Alouettes en vertu du règlement de croisement dans la Ligue canadienne, termineront leur saison avec des affrontements contre les Tiger-Cats, les Argonauts et les Stampeders. Pendant ce temps, Montréal disputera des matchs à l’étranger contre Toronto et Edmonton avant d’accueillir les Roughriders de la Saskatchewan au Stade Percival-Molson.

Un balayage des Lions mettrait fin à toute discussion et confirmerait leur place en éliminatoires. Une seule défaite ouvrirait toutefois la porte aux Alouettes.   

« S’ils peuvent battre ces trois équipes, ils mériteront amplement leur qualification, estime Lewis. Mais c’est toute une mission, surtout quand on considère que tous leurs adversaires se battent encore pour un meilleur positionnement en vue des éliminatoires. Tous leurs matchs auront aussi une signification pour leurs adversaires, rien ne sera pris à la légère. Ça pourrait fort bien jouer en notre faveur. »

À moins de trois semaines de la fin de la saison, les Roughriders sont la seule équipe mathématiquement éliminée de la course aux éliminatoires dans la LCF. Les trois clubs déjà qualifiés dans l’Est – Toronto, Hamilton et le Rouge et Noir d’Ottawa – peuvent encore espérer conclure au sommet de leur association. Dans l’Ouest, les Stampeders et les Eskimos sont à égalité en tête avec 24 points.

Reste les Alouettes, les Lions et les Blue Bombers de Winnipeg, trois équipes avec dix points au compteur qui rêvent à la seule autre place disponible.

« Tous ces matchs seront importants. C’est une situation unique, s’étonne l’entraîneur-chef et directeur général Jim Popp. Je ne me souviens pas d’avoir déjà vu une situation si particulière en fin de saison où on voit cinq équipes en lutte pour les titres de division et trois autres qui se battent pour leur survie. »

La semaine dernière, les Alouettes sont sautés sur le terrain en sachant que les Lions et les Blue Bombers n’avaient pu maintenir la cadence et remplir leur part du marché. Une victoire contre les Tiger-Cats dimanche leur aurait permis de se qualifier provisoirement et de s’installer dans le siège du conducteur pour le dernier droit de la saison, mais ils ont failli à la tâche.

« Cette semaine, c’est nous qui y allons en premier », comparait Popp en faisant référence au match de vendredi face aux Argonauts. « Avec une victoire, on augmenterait automatiquement le niveau de nervosité de nos rivaux, qui devraient absolument gagner pour nous suivre. C’est ce qu’on essaiera de faire. C’est notre plan. »

Pas le scénario envisagé

Lewis, qui affiche ses meilleures statistiques personnelles depuis trois ans, ne s’attendait pas à se retrouver sur le seuil de l’élimination au cœur du mois d’octobre lorsqu’il s’est entendu avec les Alouettes lors de l’entre-saison.

« La principale raison de mon arrivée ici, c’est que je voyais qu’il y avait un bon noyau de vétérans et je savais que j’aurais la chance de jouer pour la Coupe Grey, admet ouvertement le vieux renard de 33 ans, qui a capté 66 passes pour des gains de 669 verges à sa première saison à Montréal. Je crois toujours que c’est possible. Ça nous a pris plus longtemps que prévu avant de cliquer, mais on a montré des signes positifs. Il nous faut juste être constant. »

S.J. Green, qui a besoin d’ajouter 42 verges au compteur pour atteindre le cap des 1000 pour la quatrième fois en cinq ans, caresse les mêmes objectifs que son coéquipier.

« Cette équipe est bâtie avec des vétérans qui comprennent la situation, qui comprennent que tout n’est pas joué et qu’on a encore une chance d’atteindre notre but ultime, qui est de gagner la Coupe Grey », affirme sèchement le grand numéro 19.

« Il n’y a pas de frustration parce que la saison est loin d’être finie. La possibilité de ne pas faire les éliminatoires, c’est une histoire pour vous, les médias. Quant à nous, on ne pense qu’à gagner notre prochain match vendredi », a ajouté Green.

« On s’est nous-mêmes placés dans cette situation, désamorce calmement Lewis. Si je vais me jeter en bas d’un pont, j’aurai à vivre avec les conséquences. Présentement, on ne peut que s’efforcer de rester positifs. Tant qu’on est encore en vie, on doit se battre. »