Quel soulagement que de fouler le terrain à nouveau après quatre semaines d’absence!

Je me suis fait bien discret depuis le début du mois d’octobre. Une politique des Chiefs veut que les joueurs blessés révèlent le moins d’informations possible.

Mais croyez-moi : je n’ai pas chômé – loin de là – durant ce mois à l’écart du jeu!

Il ne faut pas perdre de vue qu’on est toujours à une malchance près de voir notre saison se conclure devant nos yeux. Dans mon cas, à la fin d’un jeu, plusieurs joueurs se trouvaient dans un espace restreint et un de mes coéquipiers est tombé de tout son poids sur ma jambe.

Peut-être que certains d’entre vous l’auront vu dans une capsule réalisée par NFL Films, mais j’ai immédiatement su que quelque chose clochait. Pourtant, j’avais confiance même quand les soigneurs de l’équipe se sont approchés de moi qu’il s’agissait d’une blessure moins grave qu’une déchirure du ligament croisé antérieur (le fameux « ACL »). On peut plaisanter à l’effet que j’ai réalisé mon propre diagnostic sur le terrain! Mais j’avais beau être pratiquement certain, les orthopédistes des Chiefs, eux, l’étaient moins que moi, et il a fallu valider le tout le lendemain matin avec la résonance magnétique.

Quand j’ai pu en avoir le cœur net en obtenant le verdict officiel, ce fut une énorme consolation. Je me suis dépêché à aller voir les images sur l’écran du technicien. Je savais à ce moment que je m’attaquais à une réhabilitation qui s’échelonnerait sur deux à six semaines, et non à un long et ardu processus qui me coûterait ma saison et même plus. Un tel scénario aurait été encore plus demandant : l’aspect médical, la façon de gérer une aussi longue absence, la famille, etc. En regardant la deuxième demie du match de mes coéquipiers face aux Redskins de Washington, allongé avec un sac de glace sur mon genou, je me rappelle m’être dit qu’une carrière de sportif professionnel ne tient parfois qu’à un fil. Peut-être faut-il être sur les lignes de côté pour s'en apercevoir...

Des journées bien remplies

On a tendance à croire que les joueurs sur le carreau doivent prendre leur mal en patience et rester chez eux. La réalité, elle, est toute autre car tu continues d’assister à toutes les réunions d’équipe et à prendre des notes comme si tu allais être envoyé dans la mêlée. C’est un effort de concentration additionnel parce que tu sais au fond de toi que tu n’iras pas vraiment au front avec tes coéquipiers. C’est un exercice mental différent.

En plus de cela, la journée débute une heure et demie plus tôt pour le joueur blessé puisqu’il doit subir des exercices de physiothérapie avant l’arrivée des autres joueurs. Il y a aussi les exercices pendant que les troupes s'entraînent sur le terrain, et celles qui se poursuivent pendant 90 minutes une fois tout le monde parti du stade.

Ce n’est pas non plus le feeling le plus agréable de voir tout le monde revêtir son habit et prendre la direction de l’aéroport pour un match à l’extérieur, alors que tu repars de ton côté, ne sachant pas trop ce que tu vas faire pour t’occuper dans les 24 prochaines heures. Je me suis aperçu que mon tissu social à Kansas City dépendait beaucoup de la présence de ce groupe de gars dans mon quotidien.

Bref, vous comprendrez que j’étais très enthousiaste à l’idée de faire mon retour au jeu dimanche dernier face aux Cowboys de Dallas. La décision n’est évidemment pas celle du joueur blessé, mais plutôt celle des entraîneurs, qui avec l’avis des soigneurs, déterminent ce qui est dans le meilleur intérêt du joueur et de l’équipe. « Est-ce qu’un Laurent pas encore tout à fait à 100 % peut nous donner du meilleur football que son remplaçant actuel? » C’est un exemple de questions avec lesquelles nos instructeurs doivent jongler quand il s’agit de ramener ou non un joueur blessé dans la formation.

Je sais que je peux faire mieux

Le résultat à Dallas n’a pas été celui que chacun de nous espérait, mais d'un point de vue individuel, de remettre la main à la pâte m’a procuré une grande satisfaction. Que l’équipe ait besoin de toi te pousse à mettre tout en œuvre pour offrir ton meilleur rendement.

Je ne vous cacherai pas que le facteur « rouille » entre dans l’équation après un mois d’inactivité. Que ce soit par rapport à la communication avec les membres de la ligne offensive en utilisant la cadence silencieuse sur un terrain ennemi, ou bien par rapport aux capacités en termes de cardio, ça m’aura pris quelques séquences à m’ajuster, et même là, ce n’était pas encore parfait. Je dois m’habituer à performer au meilleur de mes habiletés en portant une orthèse.

ContentId(3.1253271):Laurent Duvernay-Tardif : une semaine pour faire le vide (Chiefs)
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Je suis impatient d’étudier les bandes vidéo et de continuer de travailler sur ma forme afin de maximiser mon apport à l’attaque des Chiefs à notre retour de la semaine de congé. Notre entraîneur Andy Reid est réputé pour diriger des équipes qui performent très bien au retour du « bye week » et on a la ferme intention que cette année ne soit pas différente des autres.

On est en bonne position pour terminer la saison au sommet de notre division, mais on veut plus que cela. On vise plutôt de terminer dans une des positions nous permettant de bénéficier d’un laissez-passer lors de la première semaine des éliminatoires.

Pour ma part, je vais passer ma semaine de repos à Montréal, avec famille et amis. Je vais passer du temps à mon appartement, passer un après-midi au Marché Jean-Talon, aller à la boulangerie de mes parents et profiter des activités automnales qui font de Montréal une ville unique.

De quoi revenir à Kansas City fin prêt à attaquer la deuxième moitié du calendrier, à commencer par le match du 19 novembre face aux Giants de New York!

* propos recueillis par Maxime Desroches