MONTRÉAL – Pas moins de 15 joueurs ont quitté les Stingers de Concordia en raison du changement de culture imposé par Brad Collinson. Si celui-ci savait que ses nouvelles exigences ne plairaient pas à tous, des joueurs prétendent que des entraîneurs ont manqué de respect envers eux et qu’ils ont plutôt été poussés vers la porte de sortie.
 
Après une première année aux commandes de ce programme qu’il veut ramener parmi l’élite canadienne, Collinson a instauré des exigences plus élevées pour son groupe. Ce coup de barre n’a pas fait l’affaire de chacun, mais l’entraîneur-chef prétend qu’il n’a rien imposé de trop éprouvant.

« En janvier, quand on a commencé notre entraînement cet hiver, on a exposé nos exigences pour les heures à investir. On a dit aux joueurs ‘Si c’est trop pour vous, c’est correct, la porte est là’. Certains ont essayé et ils ont vu que ce n’était pas pour eux. Ce n’est pas fait pour tout le monde, mais on veut être un programme élite. Les programmes élites, ça s’entraîne 12 mois par année. On voulait changer la culture ici », a expliqué Collinson au RDS.ca.
 
Brandon Pacheco, un joueur de ligne défensive, fait partie des joueurs qui ne sont pas revenus avec les Stingers pour la saison 2019. Il a accepté de livrer son point de vue sur la situation. Selon lui, ce ne sont pas les exigences rehaussées du programme qui ont mené à ce résultat, mais bien la manière préconisée.
 
« Ce n’est pas parce que le programme était trop difficile. Malheureusement, on a été poussés à quitter. Ça m’a fait mal de lire (dans d’autres médias) qu’on a quitté, ça remet en question notre caractère. On n’est pas du style à quitter quand c’est plus exigeant. On n’est pas comme ça, je ne suis pas comme ça », a d’abord lancé le Californien.
 
« On était excités à propos du nouveau programme et d’avoir un nouvel entraîneur plus exigeant qui nous pousserait davantage sauf qu’on n’a pas reçu le support dont on avait besoin », a-t-il indiqué.
 
Selon ses dires, là où ça s’est gâté, c’est dans la façon de s’adresser aux joueurs.   
 
« Les messages étaient irrespectueux et agressifs envers les joueurs. On dirait que l’idée était plus de nous rabaisser que de nous pousser vers le haut. C’était dur pour bien des joueurs et ils ont été plusieurs à ne pas aimer ça », a soutenu Pacheco.  
 
Dans son cas précis, il tient à souligner qu’il aurait accepté de jouer sa dernière année universitaire avec les Stingers. Il n’est pas resté puisque l’organisation lui a annoncé que ses frais de scolarité ne seraient plus couverts par une bourse.
 
Invité à commenter ce dossier, Collinson ne s’est pas défilé et il a présenté sa version des faits qui tient aussi la route.
 
« On l’a dit dès le début, chaque façon qu’on va choisir pour te parler, ce sera pour t’aider. Il faut que tu sois capable de gérer ça, c’est encore plus dur dans la vraie vie. Dans le milieu du travail, c’est ton emploi que tu peux perdre. Nous, on donnait des chances, on essayait de leur expliquer. Dans la vraie vie, c’est noir ou blanc. Avec nous, il y avait un peu de gris et on voulait les aider. Mais, au final, c’est aussi à eux de s’aider. Ils doivent faire leurs choix, ce sont des adultes. Des joueurs ont dit ça, mais tu peux parler à ceux qui sont restés et ils vont te dire que ce n’est pas vrai », a cerné l’entraîneur qui a pris les grands moyens pour relancer cette équipe.
 
Collinson ne croit surtout pas que les exigences implantées soient trop difficiles.
 
« Pas du tout, c’est le même volume que toutes les autres places, les programmes qui gagnent. C’est une recette qui fonctionne. C’est juste que c’est un gros changement, c’est sûr et certain. Mais on a remplacé ces joueurs avec des gars qui sont à l’aise avec ce que l’on fait. Des gars qui veulent faire partie de ce processus », a-t-il plaidé.
 
Parmi les critères rédigés sur les ententes signées avec les joueurs, Collinson et les Stingers ont haussé de 18 à 24 le nombre de crédits requis pour demeurer dans l’équipe.  
 
« On a décidé de demander 24 crédits parce que c’est important d’avoir ton baccalauréat. Si tu fais 18 crédits, tu n’auras pas ton bac en 4 ans », a souligné Collinson à propos d’une mesure académique.
 
C’est en réfléchissant au portrait plus global de la situation que la quinzaine de joueurs a opté pour se retirer. Ils ont déterminé qu’ils avaient perdu le plaisir de se rendre aux entraînements ce qui rend bien difficile de se dévouer au football pendant quelques mois.
 
Ce plaisir n’a toutefois pas quitté le secondeur Samuel Brodique. Celui qui est considéré comme l’un des meneurs du club a présenté une vision directe de la situation.
 
« C’est sûr qu’on a perdu d’excellents joueurs de football. Cet épisode a fait mal du côté du talent, mais ça nous a quand même aidés à se concentrer sur d’autres choses. Je dirais qu’on possède moins de talent, mais un meilleur esprit d’équipe. Je vois plus d’effort et plus de travail. Jusqu’à présent, la recette a porté fruits parce que ça faisait longtemps que je n’avais pas eu un match aussi serré face aux Carabins », a évalué Brodique en parlant du revers de 10-3 face à l’Université de Montréal en lever de rideau.

De grands changements chez les adjoints aussi
 
Afin d’être conséquent avec sa philosophie, Collinson a également procédé à une métamorphose de son personnel d’entraîneurs. Il est désormais entouré d’adjoints plus orientés vers les mêmes principes et plusieurs sont des anciens du Rouge et Or de l’Université Laval où Collinson a développé ses connaissances d’entraîneur.
 
« Ce n’était pas une décision facile, ce sont des jobs. Tu demandes à des gens de partir quand même et c’était douloureux à faire. Mais, en fin de compte, quand t’as une chance de repartir à zéro, je crois que n’importe qui dans ma position ferait la même chose. J’ai fait ça pour travailler avec des gens que je connais et qui pensent comme moi. On a un plus petit groupe d’entraîneurs, mais on est tous sur la même longueur d’onde », a expliqué l’entraîneur-chef.
 
Pour gérer la défense, Collinson a convaincu Ed Philion de se lancer dans l’aventure du football universitaire québécois. L’ancien joueur de ligne défensive des Alouettes - qui a aussi été adjoint dans la LCF - doit s’habituer à ce calibre et au départ de quelques joueurs talentueux.  
 
« Au niveau professionnel, tu peux simplement te départir d’un joueur quand ça ne fonctionne pas avec ton groupe. Tu peux le faire dans les rangs universitaires, sauf que tu essaies avant tout d’aider les jeunes. Mais, à un certain point, il faut que le joueur veule s’aider aussi. Tu ne peux pas vouloir plus que le joueur. Ceux qui ne veulent pas embarquer dans ce qu’on prêche, ils peuvent aller trouver une autre équipe. On veut des jeunes qui aiment ce qu’on prône et ce qu’on fait. Ça fonctionne mieux ainsi », a tranché Philion qui a causé des maux de tête aux Carabins dès son premier match comme coordonnateur défensif.

Les Stingers affronteront l'Université McGill vendredi après-midi à 16 h.

McGill et Concordia prêts à surprendre