Après avoir répondu à toutes les questions des journalistes et remercié ses coéquipiers qui le félicitaient au passage après sa victoire de 2-1 en prolongation marquée de 28 arrêts dont 13 au cours de la seule troisième période, Sergei Bobrovsky s’est assis devant son casier pour retirer les dernières pièces de son équipement.

 

Bien sûr qu’il était fier de son arrêt magistral aux dépens de Jacob De La Rose. « J’étais mal pris et j’ai effectué une glissade en espérant pouvoir toucher la rondelle », a expliqué Bob The Goalie.

 

Cette rondelle, Bobrovsky l’a touché avec le bout de son bouclier. Un bouclier qui ne tenait plus de bâton parce que le gardien des Blue Jackets l’avait échappé. « Ça m’a peut-être permis d’être un peu plus rapide sur mon déplacement et ça m’a donné plus d’aisance avec mon bouclier », a-t-il ajouté.

 

ContentId(3.1253848):Blue Jackets 2 - Canadiens 1 (Prolongation)
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Au fait, ce bâton, Bobrovsky l’a-t-il simplement échappé ou il l’a plutôt volontairement perdu pour maximiser ses chances d’arrêts? « Dans le feu de l’action, je ne me souviens pas vraiment comment c’est arrivé », a répliqué le gardien qui a servi aux journalistes une esquive aussi brillante que son arrêt aux dépens de De la Rose. Car si Bobrovsky avait admis avoir volontairement échappé son bâton, il se serait rendu coupable d’une infraction...

 

Une fois son équipement retiré, Bobrovsky a quitté le vestiaire. Après une performance qui lui a permis d’offrir deux points à son équipe et d’obtenir la première étoile de la rencontre, le gardien aurait pu se rendre aux douches et réclamer un massage.

 

Il n’a rien fait de ça.

 

Quelques minutes après être disparu derrière le rideau qui sépare la section où les joueurs de changent du vestiaire proprement dit, Bob The Goalie est ressorti avec un survêtement tout propre et tout sec sur le dos. Il est sorti du vestiaire et s’est rendu sur un tapis. Pour faire quoi? Pour recommencer à garder les buts.

 

Visiblement plongé dans une bulle où il était seul au monde, pieds nus sur le tapis, le dos bien droit, la tête bien haute, les mains écartées et prêtes à recevoir des rondelles malgré le fait qu’il ne portait ni mitaine dans sa main gauche ni bouclier dans sa main droite, Bobrovsky se déplaçait vers sa gauche et vers sa droite pour faire face à des tirs imaginaires.

 

Il a continué comme ça un bon moment avant de sauter sur un vélo stationnaire.

 

Après sa très solide performance aux dépens du Canadien, le gardien des Jackets aurait pu se la couler douce, mais non. Il était déjà à l’entraînement. Et à en juger par ses yeux rivés sur Dieu seul sait quels adversaires, il était clair que ces adversaires étaient nombreux et avaient la gâchette facile.

 

Quand j’ai posé la question : « Il est spécial votre gardien ou juste un peu fou », à David Savard, le défenseur québécois a esquissé un sourire en répondant : « c’est de la belle folie! »

 

À sa façon, Sergei Bobrovsky a hanté le Canadien comme Carey Price a hanté bien souvent des adversaires du Tricolore au fil des dernières années.

 

Le gardien des Blue Jackets a permis à son équipe de sortir de Montréal avec deux points dont elle se serait passé, n’eût été sa performance. Le Canadien manquait sérieusement de conviction au cours des 40 premières minutes. C’est clair. Mais en troisième, lorsqu’il a décidé de se mettre en marche, Bobrovsky a fait ce qu’il fait de mieux : des arrêts spectaculaires.

 

« Bob a déjà les deux plus beaux arrêts effectués dans la LNH à son actif. Celui de ce soir était fumant, mais celui de samedi soir contre Detroit était plus sensationnel encore. De fait, je n’ai jamais vu d’arrêt plus spectaculaire », a lancé John Tortorella en parlant de l’arrêt réalisé aux dépens d’Andreas Athanasiou qui s’est fait voler un but certain après qu’il eut reçu une passe parfaite d’Anthony Mantha.

 

Bobrovsky a vu et revu l’arrêt réalisé à Detroit sur des bandes vidéo. Il avait frais en mémoire celui aux dépens de De La Rose, mais se promettait d’aller le revoir également. Lequel des deux est le plus spectaculaire? « Je vous laisserai décider », a-t-il répondu.

 

Auteur du but gagnant, le défenseur Zach Werenski l’a fait à sa place :  «Je ne sais pas s’il est possible de battre l’arrêt contre Detroit. »

 

« Ce que vous avez vu ce soir, on le voir souvent. Même à l’entraînement alors que Bob se donne complètement. Il ne nous donne aucune chance », a ajouté David Savard.

 

« Il est dangereux de s’en remettre trop souvent à notre gardien comme on l’a fait ce soir, mais en même temps, Bob est tellement fort physiquement, il est tellement rapide dans ses poussées et agile avec ses mains. Mais sa plus grande qualité est qu’il n’abandonne jamais. Il ne se compte jamais comme battu », a ajouté John Tortorella.

 

Je ne sais pas à quel point la chance peut venir appuyer le talent et la combativité pour permettre à Bobrovsky d’être aussi solide devant sa cage, mais quand je l’ai vu multiplier des arrêts virtuels alors que ses coéquipiers étaient pour la plupart déjà douchés, changés, voire prêts à sauter dans l’autobus, j’ai compris qu’il y avait aussi beaucoup de travail derrière les arrêts dont le Canadien venait d’être victime.

 

Mes observations sur cette défaite du Canadien signée Sergei Bobrovsky :

 

  1. Prolongation : Drouin et Galchenyuk sur le banc
  2. Byron a su se reprendre
  3. Dubois profite de la confiance de Tortorella
  4. Mete à toutes les sauces
  5. Niemi si et seulement si...

 

Chiffre du match : 2 – Charlie Lindgren a encaissé sa première défaite en prolongation en carrière dans la LNH. Le fait qu’il affiche six victoires et qu’il ait permis à son équipe de récolter au moins un point lors de sept de ses huit premières sorties est déjà phénoménal. Lindgren repousse toutefois les limites alors qu’il n’a toujours pas accordé plus de deux buts au cours d’une même partie. Mardi contre Columbus, le gardien recrue a effectué « seulement » 23 arrêts, mais bien qu’il n’ait pas été lapidé de tirs, il a réalisé plusieurs arrêts importants au cours des deux premiers tiers alors que son équipe offrait du jeu très brouillon en défense qui aurait pu permettre aux Jackets de s’offrir une avance de deux ou trois buts...

 

 

Prolongation : Drouin et Galchenyuk sur le banc

 

Tomas Plekanec et Paul Byron étaient au banc du Canadien lorsque Zach Werenski a reçu une passe parfaite de Cam Atkinson pour déjouer Charlie Lindgren et confirmer la victoire de 2-1 des Blue Jackets aux dépens du Canadien.

 

Même s’ils n’avaient rien à se reprocher sur le but décisif, but qui a été marqué aux dépens de Danault, Pacioretty et Petry qui s’est rendu coupable d’une perte de rondelle qui a mené au but des Jackets, Plekanec et Byron étaient frappés de critiques associées au fait qu’ils ont encore amorcé la prolongation sur la patinoire.

 

Je vous ai offert des explications sur cette stratégie adoptée par Claude Julien après la victoire de samedi aux dépens des Sabres de Buffalo. Libre à vous de ne pas les aimer. De les détester. Et même de les balayer du revers de la main.

 

Cela dit, je peux comprendre, facilement à part ça, que vous soyez furieux de voir que les deux meilleurs attaquants du Canadien, Jonathan Drouin et Alex Galchenyuk n’ont pas posé les patins sur la patinoire en prolongation dans cette défaite du Canadien.

 

La prolongation est une affaire de contrôle de la rondelle. Tant qu’à décocher un tir imprécis et donner la rondelle à l’adversaire, mieux vaut revenir en zone défensive, se reprendre pour mousser la qualité des occasions. Pour maximiser ses chances de contrôler la rondelle, il faut gagner la mise en jeu. D’où les présences de Plekanec et Danault qui, sans être flamboyants hier soir, ont été meilleurs que Drouin aux cercles des mises en jeu.

 

Tout ça est vrai.

 

Mais y aurait-il moyen de permettre à Plekanec et Byron de remporter la mise en jeu initiale et de retraiter au banc sur-le-champ pour permettre à Drouin et Galchenyuk d’aller rejoindre Weber sur la glace le plus vite possible?

 

La question mérite d’être posée.

 

Byron a su se reprendre

 

Paul Byron est un patineur ultra rapide. C’est pour cette raison qu’on lui donne des mandats au sein des premiers trios, qu’on l’utilise en désavantage numérique et aussi en prolongation alors qu’il y a beaucoup plus de place sur la patinoire.

 

Paul Byron a aussi de bonnes mains. Des mains qui lui ont permis de marquer 22 buts l’an dernier, dont plusieurs au terme d’échappées.

 

Comme plusieurs de ses coéquipiers, Byron peine à marquer cette année. En première, après que Sergei Bobrovsky eut réalisé un très bel arrêt à ses dépens aux termes d’une longue échappée, Byron a piqué une vive colère à son retour au banc. Le casque, le bâton, tout à revolé!

 

Ironiquement, c’est Byron qui, plus tard en troisième période, a marqué le seul but du Canadien.

 

Personnellement, je n’ai pas vu d’un mauvais œil la réaction de Byron. Le gars était en « Simonac! » et il a laissé sortir la pression. Grand bien lui fasse. Et Claude Julien n’a pas détesté non plus cet excès de colère.

 

« Paul est tellement combatif. Il veut marquer. Il a réalisé un très bon jeu, mais a été victime d’un très bel arrêt. Il était en colère contre lui. Il était frustré. Il n’y avait rien de mal dans ce qu’il a fait. J’aime le fait que nos joueurs soient beaucoup plus engagés émotivement qu’ils ne l’étaient plus tôt cette saison», a commenté l’entraîneur-chef du Canadien.

 

Au-delà sa vitesse, sa combativité et ses mains qui lui ont permis de marquer 22 buts l’an dernier, il est important de souligner que Byron n’est peut-être pas un marqueur naturel de 20 buts par saison. Son implication est totale. Mais il serait peut-être démesuré – sans doute même – un brin injuste de s’attendre à une production égale ou supérieure à sa récolte ô combien inattendue de l’an dernier.

 

Dubois profite de la confiance de Tortorella

 

Avec une minute et des poussières à faire à la troisième période, alors que le score était de 1-1, la recrue Pierre-Luc Dubois était sur la patinoire pour donner une chance aux Jackets de gagner tout en minimisant les risques de victoire du Canadien. Toute une marque de confiance pour celui qui a fait le saut dès cette année des rangs juniors à la Ligue nationale.

 

« Dubois était sur la glace parce qu’il méritait d’y être. Son trio a peut-être été notre meilleur ce soir. Notre plus responsable. Notre plus constant. J’ai mis mon quatrième trio dans le pétrin en ayant recours à trois trios pendant un bon moment, mais je tenais à garder Dubois actif parce qu’il jouait bien », a analysé John Tortorella après la rencontre.

 

Le coach des Jackets a été élogieux à l’endroit du jeune Québécois muté au centre en raison des blessures qui frappent Columbus. « Dubois est très intelligent. Il sait ce qu’il fait de bien et de moins bien. Il prend les moyens pour s’améliorer. Pour corriger ses lacunes. Il doit apprendre à mieux se servir de son corps. De sa force. Mais c’est normal. Nous avons à faire à un solide jeune joueur de hockey qui se rendra là où on voit qu’il se rendra et peut-être pas où les attentes l’envoient », a ajouté Tortorella en parlant du choix de première ronde des Blue Jackets (troisième sélection) au repêchage de l’été dernier.

 

Quant au principal intéressé, il a savouré pleinement son premier match en carrière au Centre Bell. « C’est la première fois que je mettais les pieds ici pour un match de hockey [de la LNH]. J’avais des attentes et elles ont été comblées. C’était vraiment plaisant. De l’échauffement, à la musique, à l’ambiance, tout était comme je m’y attendais. J’avais des frissons. En plus, il y a eu l’ovation pour saluer GSP avant le match », a commenté Dubois qui, sans récolter de point, a tout de même terminé la rencontre avec un différentiel de plus-1.

 

Mete à toutes les sauces

 

Parce que Torrey Mitchell a déclaré forfait tout juste avant l’échauffement en raison d’un virus, Victor Mete est passé de la ligne bleue à l’attaque.

 

Plusieurs ont vu dans cette décision de Claude Julien une démotion. On bouchait un trou sur le quatrième trio avec le jeune qui a commencé la saison à la gauche de Shea Weber, mais dont le temps d’utilisation a baissé depuis quelques parties.

 

Je ne l’ai pas vu du même œil. On a placé Mete à l’attaque, parce qu’il est bon patineur et bon avec la rondelle, parce qu’il a une bonne vision, de bonnes mains et un bon sens du hockey. Et quand un joueur est bon comme le jeune Mete, il sera bon peu importe l’endroit où il jouera. Du moins dans une situation de dépannage comme ce fut le cas mardi.

 

En plus, Mete a déjà joué à l’avant dans les rangs juniors. « Je suis allé le voir avant l’échauffement lorsqu’on a appris que Mitchell ne pourrait pas jouer. Il m’a dit qu’il était bien à l’aise avec cette décision et qu’il avait même déjà joué au centre. Je l’ai avisé que ça n’arriverait pas, mais il nous a donné un bon match », a témoigné Claude Julien.

 

Pourquoi devoir envoyer Mete à l’attaque pour compléter l’alignement au lieu de rappeler un attaquant de Laval et d’envoyer Davidson ou Morrow sur la galerie de presse.

 

De un : le Canadien n’avait pas le temps de procéder à un rappel 20 minutes avant le match. Laval c’est proche, mais quand même...

 

De deux : le Canadien ne pouvait rappeler de joueur puisqu’il comptait 23 joueurs sur sa liste d’admissibilité et que le seul défenseur qui n’avait pas à être soumis au ballottage pour faire une place à un attaquant était Victor Mete. Et si on retranche Mete, il doit non seulement retourner dans les rangs juniors, mais ne peut qu’être rappelé par mesure d’urgence.

 

Ce que le Canadien n’aurait jamais fait.

 

Parce qu’Artturi Lehkonen est blessé – bas du corps – pour une période indéterminée, son nom sera placé sur la liste des blessés mercredi – il ira rejoindre ceux de Carey Price, Al Montoya, David Schlemko, Nikita Scherbak et Ales Hemsky – ce qui libérera une place sur la liste des 23 joueurs admissibles et permettra à Marc Bergevin d’effectuer un rappel.

 

Niemi si et seulement si...

 

Même si Carey Price a levé le voile sur la blessure mineure qui le tenaille et qui prend plus de temps que prévu à guérir, les partisans du Canadien ont replongé dans les scénarios dignes de mauvaises télés-réalité lorsque le Tricolore a confirmé avoir réclamé Antti Niemi au ballottage.

 

La décision de réclamer Niemi ne veut pas dire que Price soit perdu pour l’année. Non. Elle ne veut pas dire non plus que Montoya soit sur le point d’être échangé ou largué par le Canadien non plus.

 

Avec ses deux vétérans sur la touche – qui sait combien de temps Montoya aura besoin pour se remettre de la commotion cérébrale attribuable au tir frappé de Dustin Byfuglien qu’il a reçu en plein front il y a deux semaines à Winnipeg – et Zachary Fucale comme adjoint à Charlie Lindgren, Marc Bergevin ne pouvait se permettre de vivre aussi dangereusement.

 

En Niemi, Bergevin a mis la main sur un gardien en perte de vitesse c’est clair – le CH est son troisième club déjà cette saison – mais il a mis la main sur un gardien d’expérience. Un gardien qui arrive comme police d’assurance et qui sera l’adjoint de Lindgren tant et aussi longtemps que Lindgren jouera avec l’aplomb qui le caractérise depuis son rappel.

 

Lorsque Price reviendra? Si Price est remis complètement, qu’il est en forme et en pleine possession de ses moyens, Niemi sera deuxième – en attendant le retour de Montoya – et Lindgren pourra retourner à Laval pour jouer plus régulièrement.

 

Si Price ne se remet pas physiquement ou qu’il donne encore de signe de faiblesse et que le Canadien a besoin d’aide sur une base régulière, Lindgren reviendra et les autres attendront en arrière.

 

Lorsqu’il rejoindra le Canadien, Niemi jouera si et seulement si les choses se mettent à aller tellement mal qu’on n’aura d’autre choix que de faire appel à ses services.

 

Cela dit, Niemi retrouvera à Montréal Stéphane Waite avec qui il travaillait à l’époque à Chicago avec les Blackhawks. Et bien que le gardien finlandais ait perdu des plumes au fil des dernières années, il a malgré tout mené les Hawks à la coupe Stanley en 2010. Qui sait? Un retour à la source avec Waite l’aidera peut-être à retrouver ses repères et ses moyens.

 

Le mot clé est peut-être!

 

Mais pour le moment, Niemi représente une police d’assurance. Et au hockey comme dans la vie, on préfère ne jamais avoir à réclamer l’aide de nos assurances...