MONTRÉAL – C’est vrai, le Canadien ne perd pas souvent par les temps qui courent. Mais ses défaites ont un petit quelque chose de dérangeant. D’inquiétant, peut-être.

Il y a eu les Sénateurs à la mi-janvier, puis les Coyotes et les Sabres de façon consécutive deux semaines plus tard. Trois équipes qui seront en congé lorsque les séries éliminatoires se mettront en branle dans un peu moins de deux mois.

Jeudi soir, les Oilers d’Edmonton ont joint cette liste noire. En créant l’égalité avec 24,9 secondes à faire en troisième période, puis en complétant leur remontée en prolongation, ils ont laissé la nation tricolore en état de choc et le chef du clan dans une humeur massacrante.

« En ce qui me concerne, on a joué un très mauvais match. Ce soir, on ne méritait même pas un point », a sèchement tranché Michel Therrien après la défaite de 4-3 subie par ses troupes.

« Tout le match m’a déçu. Notre jeu avec la rondelle, notre jeu sans la rondelle. Très mauvais match de notre part. C’est peut-être un manque de maturité », a fini par laisser tomber l’entraîneur devant l’insistance de quelques journalistes.

Quelques minutes auparavant, le Canadien pouvait pratiquement toucher à sa quatrième victoire consécutive. Tomas Plekanec, qui avait écopé de deux pénalités mineures en troisième période, avait le but d’assurance au bout de son bâton, mais l’intervention d’Oscar Klefbom l’a empêché de marquer dans un filet désert.

Prenant au sérieux son rôle de bourreau, le défenseur suédois a ensuite préparé le but égalisateur de Ryan Nugent-Hopkins, qui a déjoué Dustin Tokarski pour la deuxième fois du match alors que les Oilers avaient retiré leur gardien à la faveur d’un attaquant supplémentaire.

Klefbom a aussi été à l’origine du but vainqueur de son compatriote Anton Lander à 1:47 de la quatrième période. Nail Yakupov, qui avait été sonné par une mise en échec d’Alexei Emelin en début de troisième, s’est vengé en récoltant lui aussi une passe sur le jeu décisif.

« On ne méritait même pas un point »

Tokarski, qui venait d’encaisser un contact avec le défenseur Tom Gilbert lorsqu’est venu le temps de constater les irréparables dégâts, a subi une troisième défaite à ses quatre dernières sorties, séquence au cours de laquelle il a concédé 14 buts. Plusieurs de ses 34 arrêts ont semblé plus difficiles qu’ils n’auraient probablement dû l’être jeudi, mais il a reçu l’absolution d’un entraîneur pourtant intransigeant après la rencontre.

« Ce soir, Tokarski nous a donné un point », jugeait Therrien.

« C’est malheureux qu’il ait si bien fait et qu’on ait été incapables de fermer les livres pour lui. Ça rend la défaite encore plus difficile à avaler », déplorait pour sa part Max Pacioretty, auteur de son 25e filet de la saison dans la défaite.

« Peu importe qui on affronte, on doit être meilleurs que ça », a tranché le meilleur franc-tireur du Canadien.

Les échos de vestiaire

Christian Thomas, avec son premier dans la Ligue nationale, et Alex Galchenyuk, qui célébrait son 21e anniversaire de naissance, ont réussi les autres buts du Tricolore. David Desharnais a été blanchi pour la première fois en six rencontres.

C’est la deuxième fois de la saison que les Oilers jouent ce genre de tour au Canadien. En octobre, lors de la visite de la formation montréalaise en Alberta, l’équipe qui croupit encore une fois cette année dans les profondeurs du classement de l’Association ouest avait mérité un blanchissage de 3-0. Ce soir-là aussi, Tokarski avait été le gardien perdant.

Place aux jeunes

Impressionnante deux jours plus tôt contre les Flyers, la nouvelle escouade jeunesse soudée par Therrien depuis un peu plus d’une semaine a cette fois dépassé son mandat. Pour la visite des Oilers, c’est elle qui a permis au Canadien d’ouvrir la marque quand Thomas a fait scintiller la lumière rouge pour la première fois dans la LNH.

ContentId(3.1115455):À 25 secondes d'une victoire
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Après avoir hérité d’un revirement provoqué par Jacob De La Rose en zone neutre, Thomas est descendu sur le flanc gauche et a laissé partir un tir des poignets qui est passé comme un missile par-dessus l’épaule gauche de Viktor Fasth.

Thomas a noirci la feuille de pointage pour la première fois à son 12e match de la saison, son 15e au total dans les grandes ligues.

« C’est fou comme sentiment, était en mesure d’apprécier l’ailier de 22 ans après le match. J’ai de plus en plus de matchs derrière la cravate et j’avais comme l’impression que ça allait arriver bientôt. »

De La Rose, 19 ans, a lui aussi été crédité de son premier point dans le circuit Bettman sur la séquence. Les mauvaises langues diront qu’il n’aura eu besoin que de cinq matchs pour égaler la production offensive de Manny Malhotra, celui qu’il remplace au centre d’un quatrième trio revigoré par l’entrée en scène de l’adolescent suédois.

Galchenyuk a doublé l’avance des locaux dès la deuxième minute du deuxième vingt. Le jeune vétéran a laissé P.K. Subban faire le gros du boulot, observant le quart-arrière partir de sa propre ligne bleue pour investir la zone adverse à l’aide de quelques feintes de son cru. Pour la finale, le fêté du jour n’a eu qu’à attendre la passe parfaite du 76 et la propulser derrière Fasth d’un violent tir sur réception.

Galchenyuk a rejoint Tomas Plekanec au deuxième rang du classement des buteurs du CH avec son 16e de la campagne. C’est notamment dix de plus que Nail Yakupov, son ancien coéquipier au niveau junior qui lui avait été favorisé par les Oilers lorsque ceux-ci possédaient le tout premier choix du repêchage de 2012.

Scénario de déjà-vu

Écart comblé

Les Oilers, qui s’étaient pourtant pointés à Montréal avec une fiche de 1-15-3 lorsqu’ils tiraient de l’arrière après 20 minutes de jeu, sont parvenus à revenir dans le match.

À 4:04 de l’engagement médian, alors que les célébrations étaient déjà entamées dans les gradins du Centre Bell, Hendricks a fait dévier un tir de la pointe du défenseur Jeff Petry entre les jambières de Tokarski.

Puis dix minutes plus tard, le second de Carey Price a perdu de vue le retour d’un lancer anodin de Jordan Eberle. Nugent-Hopkins a rapidement foncé sur le disque laissé libre dans le demi-cercle réservé au gardien pour créer l’égalité avec son 13e de la saison.

Eberle récoltait alors un huitième point à ses sept derniers matchs.

Pacioretty a brisé l’égalité à mi-chemin en troisième, déjouant Fasth d’un tir des poignets de la gamme de ceux qui sont devenus sa spécialité. Tout semblait indiquer qu’il s’agirait d’un autre but gagnant pour la principale arme offensive du Bleu-Blanc-Rouge, dont les trois filets précédents avaient directement permis aux siens d’obtenir deux points.

Surtout que Tokarski, pendant une séquence d’une dizaine de minutes, s’est mis à collectionner les petits miracles. Il y a eu cet arrêt spectaculaire aux dépens de Yakupov, après un mauvais retour de lancer, juste avant que Pacioretty ne se fasse porteur d’espoir. Puis celui qui privait Hendricks d’un but presque certain, alors que le cerbère était étendu ventre contre glace.

Ryan Hamilton a frappé le poteau de plein fouet après avoir reçu une passe parfaite de Yakupov sur une descente à 2-contre-1. Nugent-Hopkins a aussi vécu sa petite frustration avant de finalement obtenir justice. Le prometteur joueur de centre a maintenant sept points en six matchs face à Montréal depuis le début de sa carrière.