Je me souviens que des internautes avaient émis des réserves quand P.K. Subban avait accepté un ronflant contrat de huit ans. Certains ne croyaient pas pour autant qu'il soit un membre du Canadien jusqu'à la fin de sa carrière.

On prétendait que Subban ne laisserait pas filer la première occasion de sa carrière, à 33 ans, de tester sa valeur sur le marché. Le Canadien pourrait alors difficilement se lancer dans une très coûteuse surenchère pour le garder à son service, croyait-on.

C'est un scénario toujours possible. Qui sait ce que Subban aura en tête à l'expiration de cette entente fabuleuse? Il peut se passer tellement de choses d'ici là. Le Canadien pourrait tomber entre les mains d'un nouveau propriétaire moins entiché de son riche défenseur (l'équipe n'en est-elle pas à son troisième propriétaire depuis 15 ans?). Si jamais l'équipe ne gagnait plus, Subban serait-il toujours aussi heureux à Montréal? S'entendra-t-il aussi bien avec le prochain entraîneur?

Pour l'instant, on apprécie son étonnante profession de foi envers les Montréalais et le Canadien. L'engagement qu'il vient de prendre, c'est du solide. On ne promet pas d'investir 10 millions de dollars en sept ans dans un hôpital pour enfant pour quitter la ville durant la huitième année. À titre de membre du conseil d'administration de la Fondation de l'hôpital de Montréal pour enfants, il va s'assurer que son argent serve à la cause qui lui tient à coeur. Il ne sera pas silencieux durant les assemblées du C.A.. Et vous pouvez parier qu'on portera beaucoup d'attention à ses opinions. Bref, c'est son intention d'exercer un impact à Montréal pendant très très longtemps.

Par ailleurs, le Canadien a aussi un jeune capitaine qui a compris que parler la langue de sa ville d'adoption peut s'avérer un atout pour lui. Max Pacioretty n'est pas uniquement un athlète courageux dont le seuil de la douleur est très élevé. Il a de la classe, du panache. C'est un attaquant qui va à la guerre, peu importe les blessures, et ses coéquipiers le respectent pour ça.

Subban et lui ont beaucoup mûri depuis deux ans. Le premier était un cheval fou à son arrivée à Montréal. Il n'était pas reposant pour son entraîneur et ses coéquipiers. La discipline n'était pas son point fort. Le second, qui ne faisait pas bon ménage avec l'entraîneur, est maintenant son allié. Le grand Américain est un leader sur lequel Michel Therrien peut vraiment compter.

Je ne sais pas à quel point Marc Bergevin porte une attention à un détail comme celui-là, mais les joueurs qu'il greffe à son organigramme sont généralement de bonnes personnes, disciplinées et agréables à côtoyer. Des athlètes qu'on sent soucieux de préserver l'image de l'organisation.

Ces dernières années, on n'a pas laissé des joueurs contaminer le vestiaire trop longtemps par leur comportement détaché ou par leur laissez-aller. On ne sentait pas Erik Cole très attaché au Canadien; il est parti. Rene Bourque ne se présentait pas souvent; il est allé se faire discret ailleurs. Travis Moen n'apportait plus rien à l'attaque; on l'a remercié pour ses précieux services. Scott Gomez était un boulet au pied de l'entraîneur; on n'a pas hésité un instant à racheter son contrat. Thomas Vanek n'offrait aucune assurance pour l'avenir et Bergevin n'a rien fait pour le retenir. Finalement, si Pierre-Alexandre Parenteau n'a pas fait long feu au Centre Bell, c'est parce qu'il coûtait trop cher pour ce qu'il avait à offrir. Dès que le directeur général a pu trouver des gars mieux disposés ou plus vaillants pour les remplacer, il a agi.

Bien sûr, ils n'ont pas été remplacés par des supervedettes, mais Bergevin a déniché des joueurs qui, croit-il, cadrent mieux dans le décor. Des Dale Weise, des Torrey Mitchell, des Brian Flynn, des Zack Kassian et des Smith-Pelly. En espérant également que l'acquisition d'Alexander  Semin s'avère heureuse pour tout le monde.

Le seul nouveau venu qui sera un joueur d'impact dès le début de la saison est Jeff Petry. Si Bergevin l'a choisi à l'heure limite des transactions au printemps, Petry, lui, a choisi le Canadien au cours de l'été. Il s'était dit emballé d'évoluer dans l'ambiance des dernières séries éliminatoires à Montréal. D'un autre côté, il se voyait offrir la possibilité d'empocher tout un magot sur le marché des joueurs autonomes. Entre l'argent et la possibilité de rester dans une niche faite sur mesure pour lui, il a préféré la ville où sa famille et lui se plaisaient déjà. Cela ne nous en dit beaucoup sur les valeurs de celui que le Canadien a déraciné d'Edmonton. Une tête solide et un talent sûr à la ligne bleue.

On ne boude plus le Canadien

Quand on analyse ce qui se passe, on est très loin de la période de misère au cours de laquelle la majorité des joueurs de la ligue, y compris les Francophones, boudaient le Canadien. Certains craignaient la pression de Montréal. D'autres y venaient à la recherche d'un proposition de contrat qui leur permettrait d'exercer une surenchère ailleurs. Plusieurs ont attendu d'être en fin de carrière pour accepter de jouer ici. Ce n'était pas une période très glorieuse.

L'équipe a changé radicalement de visage avec le temps. Des efforts louables ont été faits pour améliorer l'image de l'organisation, à commencer par un centre d'entraînement ultra-moderne, à Brossard, qui n'a pas laissé indifférents les athlètes courtisés. Les joueurs et leurs familles sont traités avec classe. On fait absolument tout pour qu'ils se plaisent ici. Ça fait des petits une attitude comme celle-là. Quand les athlètes affirment quitter le Canadien avec beaucoup de regret, toute la ligue note qu'il se passe des choses enviables à Montréal.

Aujourd'hui, le Canadien c'est Carey Price. C'est Subban. C'est Pacioretty. C'est également la formation numéro deux en titre dans la Ligue nationale.

On verra si Kassian fera mieux que Brandon Prust tandis que Semin ne devrait pas avoir trop de mal à faire oublier la récolte anémique de Pierre-Alexandre Parenteau. À trois millions de moins par saison.

Le Canadien représente-t-il une formation supérieure cette saison? Ça reste à voir. L'équipe n'a perdu aucun des joueurs qui lui ont permis de causer une surprise l'an dernier et elle a rajouté deux éléments expérimentés en Kassian et Semin.

Le seul aspect qui n'a pas changé, c'est l'importance de Carey Price dans tout cela. Sans lui, point de salut. Bergevin le sait, Therrien le sait et le public le sait.

Dans l'ensemble, en évitant les blessures, c'est une équipe qui a tout ce qu'il faut pour conserver sa place parmi les puissances de la ligue.