Il se passe présentement quelque chose d’étrange avec le Canadien de Montréal. Bien que les blessures continuent de frapper le club sans pitié, le Canadien est passé d’une bonne à une excellente formation à égalité numérique. Le CH se classe présentement au troisième rang de la LNH quant au Corsi ajusté (53,67%), tout en générant 51.26% des chances de marquer et 55.23% des chances de marquer à haut risque à forces égales.

C’est la deuxième saison consécutive où le Canadien est une bonne formation à égalité numérique. Aussi désastreuse la dernière campagne fut-elle suite aux pertes de Carey Price et de Brendan Gallagher, les joueurs avaient extrêmement bien joué jusqu’à ce que la campagne devienne cause perdue.

Voir le Canadien jouer de mieux en mieux à égalité numérique, même s’il est affligé par les blessures, est très bon signe pour le reste de la saison. Cela lui a également permis de résister à la tempête du mois de décembre, période où Carey Price ne fut pas lui-même, affichant un pourcentage d’arrêts terrible de ,899 en ce dernier mois de l’année civile.

Considérant que tout le monde devrait avoir confiance que Carey Price retrouvera ses marques ce mois-ci, il n’y a qu’une seule source d’inquiétude à ce que le Canadien soit un prétendant aux grands honneurs: ses unités spéciales.

Le Canadien se classe présentement au 11e rang de la LNH en avantage numérique et au 20e rang en désavantage numérique, mais ce rendement est en réalité flatteur au regard de leur performance globale dans ces facettes du jeu. Malgré les excellents chiffres qu’affiche le Canadien à forces égales quant aux chances de marquer, ceux-ci ne sont pas aussi impressionnants dans l’ensemble, le CH générant que 48.86% des chances de marquer et 52.15% des chances de marquer à haut risque au total. Comparons les performances du Tricolore à égalité numérique et sur les unités spéciales.

Tableau unités spécialesLe Canadien est quelque peu gêné par son penchant pour le banc des punitions, alors que 52.56% de son temps passé sur les unités spéciales est en infériorité. Sur l'avantage numérique, le CH se classe dernier au moment de générer des chances de marquer et des chances de marquer à haut risque. En désavantage numérique, il accorde le dixième plus grand nombre de chances de marquer à l'adversaire et le plus grand nombre de chances de marquer à haut risque.

Il pourrait être tentant d'expliquer ces déboires par les blessures, mais le Canadien a performé à ce niveau sur les unités spéciales à tous les mois de cette présente saison. Ce qui les a épargnés est le tir foudroyant de Shea Weber sur l'attaque à cinq et les excellentes performances de Carey Price à court d'un homme, celui-ci faisant mieux que la moyenne de la ligue en de telles circonstances, même s'il fait face à plus de tirs de qualité que tout autre gardien.

Cela signifie, pour ceux se plaignant déjà du rendement de l'attaque à cinq et du désavantage numérique, que des périodes encore plus creuses sont à prévoir, à moins que ne surviennent des changements drastiques. Cela pourrait bien s’avérer difficile à réaliser, comme le Canadien a peut-être perdu l'un de ses meilleurs éléments à court d'un homme en Paul Byron.

Une formule qui pourrait théoriquement permettre au Canadien de renforcer son jeu en désavantage numérique serait de changer les joueurs appelés à tuer le plus de minutes dans ces circonstances. Plus particulièrement, Torrey Mitchell et Brian Flynn pourraient ne plus avoir de responsabilité à court d’un homme. Mitchell est meilleur au cercle des mises au jeu que n’importe quel autre joueur du Tricolore, ce qui peut mener à une sortie de zone rapide, mais cela n’a pas empêché l’équipe d’être embourbée dans sa zone lorsqu’il se trouve sur la glace. Le même raisonnement vaut pour Flynn. Utiliser Phillip Danault et Max Pacioretty plus régulièrement permettrait d’accorder beaucoup moins de chances de marquer.

Limiter le temps d’utilisation du duo Shea Weber et Alexei Emelin sur le désavantage numérique pourrait aussi mener à des progrès énormes. Ces deux joueurs peuvent remporter leurs batailles pour récupérer la rondelle et Weber excelle au moment de dégager son territoire, mais quand le disque circule rapidement dans leur zone, ces deux défenseurs ont tendance à être quelque peu largués et à être vulnérables.

Les problèmes de l’avantage numérique sont les mêmes qui ont frappé le Canadien ces dernières années. Je suis quelque peu surpris qu’un brillant stratège de l’attaque à cinq, Kirk Muller, n’ait pas réellement changé les choses, surtout que le groupe d’attaquants a beaucoup plus de profondeur. Que ce soit Weber, P.K. Subban, Marc-André Bergeron, Mark Streit ou Sheldon Souray, le Canadien privilégie toujours les tirs sur réception depuis la pointe avec l’avantage d’un homme.

Pendant longtemps, cette stratégie fut extrêmement efficace. Cependant, la majorité des bonnes unités en avantage numérique, aujourd’hui dans la LNH, ne préconise pas cette ligne directrice, comme les équipes évoluant à court d’un homme sont en mesure de s’y ajuster bien plus facilement. Je l’ai déjà mentionné, en abordant le cas de Gallagher en décembre, mais le Canadien doit commencer à travailler plus près du filet adverse, de manière à étirer la couverture défensive pour ensuite se créer de l’espace menant à d’éventuelles chances de marquer.

Dans l’état actuel des choses, la stratégie de l’équipe consiste trop à faire circuler le disque en périphérie, créant ainsi des batailles inutiles pour récupérer la rondelle derrière le but et étant peu créative offensivement.

Le Canadien se trouve présentement en excellente position, alors qu’il domine les autres équipes à forces égales et qu’il compte sur une bonne avance au classement, pour trouver une solution aux problèmes de ses unités spéciales. Toutefois, s’il n’y a pas de progrès, ce genre de soucis pourrait le faire passer de prétendant à potentielle déception.